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ATROCITÉS
d a n s
l e s R é g i o n s d e M o u s h
e t d e
S a s s o u n
(
S U I T E )
Le 30 mai.
Le Kurde Guendjer et ses
camarades blessent grièvement Sarkis Co-
roïan et Vo h r i h Sererian. Ohrom, la femme
du sassouniote Thomas est violée par les sol–
dats p r è s de Moush. Le prêtre Manuel Per-
teïan, originaire de Haskeuy, est assassiné
par le Kurde Hassim, à son retour du village
de Chemlag, Ce prêtre avait hospitalisé, le
5
mai, le consul de France. Bogos Onéïan,
villageois de Gartz, est assassiné près de vil–
lage par le criminel Adjemissar. La fille de
Sarkis, originaire de Pertag, et Goulé, la
femme de Hélo, sont violées. Le chef du vil–
lage de Bostaken et les villageois Daniel et
Bogos sont assassinés par les Kurdes. 11 en
est de même du chef du village de Tevnek,
Mékitar Àh d o ï a n , assassiné par les Kurdes
Ahmat, Ahmey et leurs camarades.
Le 31 mai.
Le chef de gendarmerie Izzet
Bey avec ses hommes et les soldats se trou–
vant dans les villages environnants attaquent
et cernent le villags de Gôrner vers 10 heures
du soir. L a fusillage commence i mmé d i a t e –
ment. La population, terrifiée, commence à
fuir dans une vallée touffue. Pendant cette
fuite, le chef de village Sarkis Ossepian,
Margos Sarkissian, Guiragoss
Mgroïan,
Ohan Mguerditchian sont assassinés. Ont
été blessés : Ovig Mgroïan, Sarkis Daloïan,
Sanam et les femmes, Nubar, Mariam et
Soguig. Emo, femme d'Ohan avorte. Artin
Garabedian, Aram Ohanian et Mafdo Àrti-
nian perdent la raison. Les deux églises et
toutes les maisons du village sont mises à
sac. L a population se disperse. Le nombre
des nécessiteux est de 463. 32 maisons
brûlées.
Le 1" juin.
Le, même chef de police cerne
Dadracome avec ses hommes ; les maisons
sont pillées et le bétail enlevé; trois jeunes
gens, Moské Tamo ï a n , Hatchig Sakoïan, Sté-
pan Osseïan sont tués ; la population se dis–
perse. Le nombre des nécessiteux est de 151.
Le même jour les biens des A rmé n i e n s du
village de Blel sont pillés. Le nombre des
nécessiteux de ce village est de 125.
Le 2 juin.
Bascho, le chef du village de
Poghrgor est assassiné par les beys de la lo–
calité. Hounan Ghantilian, Sélal Niroïan et
Gaspar Ghantirian, originaires de Khdjan,
sont assassinés dans leurs champs par les
Kurdes de Séïdan.
Le 3 juin.
Gro Mcstian, Ohan Belen
Koïan, originaires d'Ourogh sont tués, et
Ghougo Gasparian, Kliourchout Djargoïan et
Bedros Gasparian sonl blessés, aux environs
de leur village par les Kurdes Mezré Mehmet,
Véli, Ahmet et Ussuf.
Le 5 juin.
Khourchouk Déloïan et Do-
nig Croïan furent assassinés par les Kurdes
au moment où ils rendaient à Kégliachen.
Le 6 juin.
Le chef de police attaque le
village T e r g u é v a n k à 4 heures du matin sous
prétexte d'y trouver des fédaïs. Furent tués :
Verto Boghossian, Mesrob
Boghossian,
BeghdoHatchiguian, Bedros Artinian, Sehah-
nazar Tchadoïan, Archag Tchadoïan, Me-
kliig Krikorian, Kélio Serkoïan, Mardiros
Zretzian, Kr i k o r Néehoïan. Hatchig Ohanes-
sian fut blessé. Plusieurs {maisons furent
mises à sac. Mourad Artinian, originaire
d'Alighouloum, Mekhig Kouloïan, Mouchegh
Paroïan, originaires d'Aragh, furent égale–
ment assassinés à T e r g u é v a n k ; les jeunes
femmes Héros Donoïan, Ho rmi g Méguer-
ditchian, Takouhi Ménoïan, Dilbar Khat-
choïan, Choùchari Khalchiguian furent vio–
lées, près du village d'Aragh. Le nombre des
nécessiteux d'Aragh est de 621 et celui de
T e r g u é v a n k de 314.
Le 7 juin.
Le gendarme Até tua le petit
garçon de Tigran Ossessian, âgé de 2 ans en
l'écrasant sous son talon.
Le 8 juin.
Gaspar Sarkissian, originaire
de Khizilaghadj, fut fusillé par les Kurdes,
aux environs de. son village.
Le 10 juin.
Les femmes Goulé Ohanian,
Saré Khatchoïan, A i mo Osmanian, origi–
naires de Dadra Kome, furent violées en
plein jour et en plein public par les soldats.
Le
12
juin.
Hagop Poghodiun. origi–
naire d'Avariuteh, fut assassiné par Hassan,
fils de Hadji Féro au moment où il travaillait
aux champs. Artine Ohanian est mort dans
la prison sans avoir passé en jugement.
Le 20 juin.
La fille de Vartan, originaire
du village de Guédzang, fut enlevée par le
Kurde Mirkhan qui la vendit moyennant 6
livres turques au Kurde Seghuer, originaire
de Guédzang. Bédo Dersenian, originaire
d'Alidjan fut assassiné à 2 heures du soir de–
vant la porte de sa maison par trois Kurdes.
Le nombre des victimes de cette a n n é e est
de 100 tués, 29 blessés, 47 femmes violées,
9
avortées, 2 enlevées. 11. églises ont été
souillés. Le total des nécessiteux dans la
plaine est de 5.324.
LA S I T U A T I O N A V A N
RAPPORT ADRESSÉ AU PATRIARCHAT
L e
25
Juillet
1904
Dans ma précédente lettre je vous avais
écrit au sujet d u désastre r e n o u v e l é dans la
plaine de Mo n e t dont les suites terribles se
font a m è r e m e n t sentir sur la destinée des
A r m é n i e n s habitant la plaine. Les A r m é –
niens habitant les villages n'osent pas en–
core entrer dans leurs maisons d émo l i e s .
L a frayeur, les menaces continuelles, les
vexations mettent la population a r m é –
nienne dans une situation désespérée. L e
désespoir pendant la moisson signifie la
famine. L e cultivateur a r m é n i e n n'ose pas
monter dans ses champs.
Izet Bey continue ses tristes exploits, avec
ses i5o gendarmes il attaque les villages
a r m é n i e n s , i l soumet les habitants de ces
villages à d'horribles tortures afin d'enlever
leurs armes. Ap r è s cinq jours de pratiques
torturantes il a d é s a r mé Va r t é n i s s e , A r d o n k ,
Chartz, Arnist, Megrakome. Des cris de
détresse nous parviennent de tous les côtés.
Des bandes a r mé e s de Kurdes parcourent
les dilférents points de la plaine et pillent
les habitants. Les A r m é n i e n s n'osent pas
aller d'un village à l'autre. Dans la ville
les boutiques sont fermées. Au t o u r du cou–
vent de Sou r p Garabet le cheik kurde Ibra–
h i m et d'autres Kurdes semblent vouloir
recommencer leurs sinistres exploits. Les
r é v o l u t i o n n a i r e s a r m é n i e n s sont en activité
dans la plaine de Mo u s h . Mo r t ou réformes,
voilà leur devise qui est aussi celle de toute
la population a r m é n i e n n e qui se trouve
dans u n état de s u p r ê m e désespoir. Ils sont
prêts à tous les sacrifices pour apporter un
r emè d e à leur lamentable situation. Mo r t
ou r é f o rme s , voilà le cri unan ime des popu–
lations de V a n et d u Sassoun. Les conseils
et les suggestions d'espoir, ne donnent pas
de résultats, ils r é p o n d e n t à tous les conseils
qu'ils sont décidés de mo u r i r pour obtenir
des reformés. Dans cet état de choses le
vali exige que je fasse la mouchardise, pro–
position que j'ai refusée avec horreur et que
je refuserai toujours ma l g r é toutes sortes
de menaces qui pleuvent sur ma tête.
Le nombre des nécessiteux a a u gm e n t é ,
il est de
18.000.
Les moissons ont subi de
c o n s i d é r a b l e s dégâts. L a p a u v r e t é est indes–
criptible et l'approche de l'hiver m ' é p o u –
vante. Qu e l sort mi s é r a b l e attend la po–
pulation. Pendant l'hiver nous aurons
3
.
ooo
malheureux à peu près et j u s q u ' à
p r é s e n t n u l secours n'est parvenu. S i la
population parvenait à é c h a p p e r à l'épée
j u s q u ' à l'automne, l'hiver se chargera de
l ' œu v r e de l'extermination. Réfléchissez et
trouvez une issue.
Il n'y a plus de facilités c omme i l y en
avait les a n n é e s précédentes pour ém i g r e r
à D i a r b é k i r ou à O r f a ; personne ne peut
remuer de sa place. Que faire, commen t se
défendre contre ces affreux désastres. Je
m'adresse à votre protection et à votre m i –
séricorde et je vous prie de nous envoyer
des secours ou une r é p o n s e définitive pour
que je la c ommu n i q u e à la population.
Vo u s avez probablement entendu que
je la c ommu n i q u e à la population.
Vo u s avez probablement entendu que
le consul d'Angleterre à Bitlis et Je consul
de France à V a n sont partis au commence–
ment du mois courant. L e consul d'Angle–
terre à V a n et celui de Russie à Bitlis sont
restés provisoirement. L e consul d'Angle–
terre à V a n , q u i va partir au Sassoun pour
la troisième fois, va partir après son retour.
N u l secours n'a été d i s t r i b u é par leur inter–
mé d i a i r e aux Sassouniotes q u i se trouvent
dans un état de mi s è r e indescriptible.
Le consul amé r i c a i n de Kh a r pou t est ar–
rivé ici depuis deux semaines; i l est venu
plus d'une fois me rendre visite. Je m'étais
adressé à l u i pour des n é c e s s i t e u x ; j u s q u ' à
présent, il n'a rien fait, mais il m'a promis
d'écrire.
Fonds A.R.A.M