amé l i o r a t i on quelconque du sort des
A rmé n i e n s et des autres peuples de
l'empire. Ma i s les
gouvernements
d'Europe peuvent fort bien obtenir de
lui qu'il tienne enfin la parole d o n n é e
en 1878. Certains d'entre eux, le gou–
vernement anglais par exemple, dans
la crise de 1894-1896 et r é c emme n t
dans la crise ma c é d o n i e n n e , ont vu et
i nd i qu é la mé t h o d e qu'il fallait em–
ployer : rien ne peut ê t r e a r r a c h é au
Sultan que par la coercition et voici
que m ê m e dans les Co n g r è s de la Paix,
on en est venu à r e c o n n a î t r e que, dans
ce cas particulier, les bons offices et
les sages conseils ne peuvent suffire el
qu'il faudra recourir à d'autres argu–
ments non contre le peuple turc, mais
contre son hideux souverain.
L ' o p i n i o n du monde civilisé est una–
nime : c'est aux gouvernements de l u i
donner satisfaction. S i non , i l sera per–
mis de dire que les vrais r é vo l u t i on –
naires, ceux qui condamnent l ' Armé n i e
au pire des destins, ce ne sont n i
An t r an i k , n i ses fédaïs, mais les chefs
d'Etat et les ministres e u r o p é e n s qui
h é s i t e n t encore à accomp l i r leur devoir,
quand i l ne s'agit pas d'obtenir d'Yldiz.
des concessions de mines ou de che–
mins de fer et le paiement des c r é a n c e s
a r r i é r é e s .
Pierre
Q
U I L L A R D .
Une Page de Théodore Roosevelt
M .
T h é o d o r e R o o s e v e l t vient d ' ê t r e é l u à u n e
é n o r m e m a j o r i t é , P r é s i d e n t des E t a t s - U n i s d ' A m é –
r i q u e . 11 a toujours fait preuve de la p l u s grande
é n e r g i e , p o u r d é f e n d r e dans les pays d ' a b s o l u t i s m e
c o mm e l a T u r q u i e et l a R u s s i e , les droits des
citoyens a m é r i c a i n s , citoyens par naissance o u par
n a t u r a l i s a t i o n . O n ne saurait m i e u x faire son é l o g e
qu'en citant cette belle page sur l ' A r m é n i e , parue
dans
YIndépendant
d u
21
d é c e m b r e
1899 :
L a grande t â c h e sur la mo r a l i t é i n –
ternationale e u r o p é e n n e dans la der–
n i è r e d é c a d e de ce siècle,
c
'
a é t é non
pas une guerre, mais l'infâme paix
maintenue par l'action conjointe des
grandes puissances, tandis que la Tu r –
quie infligeait les d e r n i è r e s horreurs
de la boucherie, de la torture, et de
l'outrage aux hommes, femmes et en–
fants de la d é s e s p é r a n t e A r mé n i e . L a
guerre fut évitée ; la paix fut maintenue ;
mais quelle paix ! Une infiniment plus
grande mi s è r e humaine fut infligée
durant cette paix que dans les d e r n i è r e s
guerres de l 'Al l emagne avec la France,
de la Russie avec la Turqu i e ; et cette
mi s è r e tomba, non sur des hommes
a r mé s , mais sur des femmes et des en–
fants sans défense, sur la barbe grise
et sur l'adolescent non moins que sur
le chef de famille ; et elle vint sous la
forme, non pas simplement de mort et
d'emprisonnement, mais de tortures
infligées aux hommes, et, par-dessus
tout, aux femmes, trop horribles pour
ê t r e r a c o n t é e s — tortures auxquelles i l
est trop terrible m ê m e de penser. De
plus, aucun bien ne r é s u l t a du sang
v e r s é et de la m i s è r e .
L E T TRE
DE
VAN
L e combat d'Aghtamar
V a n , le 12 septembre l'JOi.
Après le victorieux combat d'Aghtamar,
nos fédaïs se réfugièrent à Va n , dans un édi–
fice dont ils o c c u p è r e n t les positions favo–
rables. Le gouvernement turc plaça des sol–
dats et des canons en face de cet édifice et
engagea indirectement les i n s u r g é s à quitter
la ville. Le consul d'Angleterre é t a n t absent,
son remplaçant, le missionnaire américain,
docteur Asher, négocia avec notre camarade
Goms et l u i déclara que le vali exigeait le
départ des 14 é t r a n g e r s se trouvant dans ta
ville. Goms l u i r é p o n d i t qu'il n'y avait point
d ' é t r a n g e r s mais des frères décidés à ne pas
abandonner les armes tant que n'aurait pas
été obtenue la sécurité pour la vie et des
biens de leurs compatriotes. I l exigea, en
outre, qu'on reconduisit en leurs demeures
les A rmé n i e n s qui, dans l'imminence des
massacres, s'étaient réfugiés à l'école et dans
les consulats. L e docteur As he r alla i mmé –
diatement trouver le vali pour négocier.
Deux heures a p r è s , le docteur Asher fît
savoir à Goms que les consuls avaient envoyé
des dépêches à Constantinople, avec la
signature du vali, en disant qu'il n'y avait
pas à Va n de r é v o l u t i o n n a i r e s é t r a n g e r s . L e
vali fit retirer de la place les soldats et les
canons. Les A rmé n i e n s r e n t r è r e n t chez eux.
Le docteur Asher rassura la population et
lui a n n o n ç a des perquisitions dans 8-10jours.
Voilà la copie de la dépêche reçue de Cons–
tantinople : « Nous avons reçu votre d é p ê c h e
et nous avons négocié avec la Porte. Ras–
surez la population ».
Le ma r c h é de Va n est fermé depuis une
semaine. Depuis cet incident, la ville est
absolument calme.
«.
U n D i s c o u r s e t u n A r t i c l e d e J e a n Jaurès
Dans les débats consacrés à la discussion de l'accord
franco-anglais, notre éminent collaborateur Jean Jau–
rès a été a m e n é à rechercher certaines causes de la
criminelle inertie de l'Europe lors des massacres a r m é –
niens. II s'est e x p r i m é comme il suit :
Lo r s que je parle, lorsque nous par–
lons ainsi, nous ne sommes suspects
ni mes amis, n i mo i , d'une complai–
sance excessive pour la diplomatie
allemande. Je n'insiste pas l à - d e s s u s ,
mais nous avons tout lieu de craindre
qu'en couvrant d'une protection s y s t é –
matique le sultan, elle ait rendu trop
faciles des é v é n eme n t s douloureux qui
ont é t é pour la conscience humaine
une terrible é p r e u v e . (Tr è s b i en ! t r è s
b i en ! sur divers bancs.)
Nous avons lieu de craindre qu'en
1895,
au moment où s'est n o u é , comme
le rappelait tout à l'heure M . Denys
Co c h i n , le drame d ' e x t r ême - O r i e n t qui
se d é v e l o p p e à cette heure, nous avons
tout lieu de craindre que l'influence de
l'Allemagne, s ' e x e r ç a n t avec celle de
la Russie, avec celle de la France, dans
le sens d'une solution partiale et exclu–
sive, qui ne paraissait respecter l'inté–
g r i t é de l'empire chinois que pour le
d émemb r e r le lendemain au profit d'au–
tres puissances...
Le citoyen Edouard Vaillant.
—
T r è s
bien !
Jaurès.
— ...
ne se soit pas e x e r c é e
à cette heure dans le sens de l ' é qu i t é
et de la pa i x . Au j ou r d ' hu i encore nous
pouvons nous demander avec quelque
i n q u i é t u d e s'il n'y a pas pour la d i p l o –
matie allemande un calcul d ' é g o ï sme à
encourager la prolongation d'un conflit
lointain qu i , en d é t o u r n a n t l'attention
de la Russie des choses d'Europe et
des choses de Turquie, mé n a g e à l ' i n –
fluence allemande un d é v e l o p p eme n t
plus aisé sur cette partie du monde.
Un membre à droite.
—
C'est év i –
dent.
Jaurès.
—
Messieurs, je n'insiste pas.
Ce que j ' a i dit suffit à vous marquer
que nous n'avons, comme je vous le
disais, pour la diplomatie allemande,
pour son œu v r e , aucune complaisance
excessive; et nous avons pu regretter
plus d'une fois — nous l'avons dit à
cette tribune au temps où l'honorable
M . Hanotaux d é t e n a i t le portefeuille des
Affaires é t r a n g è r e s — que des i nsp i r a –
tions russo-allemandes dans lesquelles
la p e n s é e de l 'Al l emagne paraissait
tenir souvent une place p r é p o n d é r a n t e ,
aient trop d i r i gé notre politique fran–
ç a i s e .
Dans un article de
VHumanité
(14
novembre),
M . Jean J a u r è s insiste à nouveau sur le rôte néfaste
de M . G . Hanotaux.
Ce n'était pas pour assurer la paix de
Fonds A.R.A.M