c é do i n e ont, e n f e rmé leur commandant
•
et leurs officiers dans les casernes et
d é c l a r é qu'ils ne les r e l â c h e r a i e n t pas
avant d'avoir r e çu leurs soldes a r r i é –
r é e s . On a d o n n é l'ordre aux caisses
agricoles et au Mi n i s t è r e d e P a g r i c u l t u r e
de donner l'argent n é c e s s a i r e .
Constantinople, 5 novembre.
U n ancien gendarme a t i r é sur A r i f
Pa cha , va l i d 'And r i nop l e , mais sans
l'atteindre ; l'aide de camp du v a l i a été
g r i è v eme n t b l e s s é . L e meurtrier se
plaindrait que sa solde ne l u i ait pas
•
été p a y é e .
Constantinople, 11 novembre.
L'attentat d i r i g é contre le v a l i d ' An –
drinople a c a u s é une certaine émo t i o n
dans les. garnisons : un groupe d'otfî-
ciers, r é u n i s clandestinement, a a d r e s s é
au sultan un mémo i r e sans signatures,
exposant les griefs ayant trait aux
a r r i é r é s de l a solde et au favoritisme
dans l'avancement. Ce mémo i r e attire
l'attention sur l'état d'esprit qu i r è g n e
dans l ' a rmé e et sur les c o n s é q u e n c e s
possibles que pourraient e n t r a î n e r
l'arrestation de plusieurs ofiiciers et
leur interrogatoire au Pa l a i s .
La Censure.
Constantinople, 30 octobre.
A la douane on a saisi un envoi de
t r a i t é s de chimie d e s t i n é s à un l y c é e .
L a censure a j u g é ces ouvrages t r è s s é –
ditieux à cause de la formule de l'eau :
H 2 0 qu'on y trouve. E l l e a soutenu
que c'est une attaque contre le Su l t an ,
cette formule voulant dire : H am i d II
est un pas grand'chose.
(
Le Soir de
Bruxelles).
LA QU I NZA I NE
Le Livre Blanc
III
L e L i v r e Blanc contient d ' i n t é r e s –
sants renseignements sur l'action des
r é v o l u t i o n n a i r e s a r mé n i e n s ; i l va de
soi que les agents consulaires anglais
se gardent bien d'approuver le s y s t ème
de self défense emp l o y é par les fédaïs;
mais ils ne peuvent se défendre d'une
certaine admiration pour l ' é n e r g i e de
ces hommes qui vont à la mort avec
un imperturbable courage et ils se
rendent compte aussi que ce mouve –
ment n'est pas artificiel et que la popu –
lation a rmé n i e n n e a pris pleine cons–
cience de sa d é t r e s s e et ne tardera
pas à faire dans son ensemble, tacite–
ment ou ouvertement, cause commune
avec ceux qu'on n'ose plus appeler des
bandits dans les documents e u r o p é e n s .
V o i c i comment M . Hamp s on s'ex–
prime sur les combattants de Passen
et sur An t r an i k :
Les A r m é n i e n s semblent avoir combattu désespé–
rément- L e V a l i m'a dit que l'un de ces hommes irisant
à terre frappé de six balles, i l continuait à tirer
(
annexe
au n"
4)-
Leur chef Antranik est un h omme véritablement ca–
pable et est e x t r ê m e m e n t obéi.
M . Sb i p l ey parle avec au t an t - de
sympathie des combattants de Zivine :
Les A r m é n i e n s combattirent avec un courage déses–
péré j u s q u ' à la fin, tirant bien à longue distance, mais
perdant leur sang froid à la dernière attaque. U n offi–
cier me dit que c'était une pitié de voir ces hommes
vidant sauvagement leurs magasins de cartouches sur
les soldats sans prendre de but et au dernier moment
ramassant des pierres pour leur jeter. Il ne fut pas fait
de quartier et je n'ai pas pu établir qu'il en ait été de–
m a n d é
(
anne.re au
n°
82). •
L ' imp r e s s i on produite sur les assis–
tants de cette terrible mê l é e doit ê t r e
soigneusement retenue :
L'affaire fit une profonde impression sur les troupes
et sur la population. P a r m i les officiers, je n'ai pas pu
découvrir de traces d'animosité contre les malheu–
reux qui avaient vainement sacrifié leur vie ;
mais
parmi
eu.v et parmi les Turcs du voisinage,
je n'ai
entendu que des imprécations
contre le
gouvernement
qui avait poussé
les Arméniens
à une telle
e.iiré–
mité.
U n vieux turc me dit avec des larmes dans les yeux :
«
Nous vivions si tranquillement auparavant. Mainte–
nant les Kurdes nous ruinent eux et nous. Ils étaient
si jeunes et si forts et ils ont fait un effort s i déses–
péré.
A i n s i les fédaïs commandent le res–
pect et l'admiration de ceux qu'un
monstrueux gouvernement charge de
les d é t r u i r e et des paysans turcs qu i les
voient à l ' œu v r e . S i l'on c o n s i d è r e
que d'un autre côté^ les Ku r de s m ê m e s
sont assez d i s p o s é s en certaines r é –
gions, à se retourner eux aussi contre
les a u t o r i t é s locales, i l est aisé de faire
justice d'un des arguments a l l é gu é s
pour éviter de faire des r é f o rme s : le
soi-disant mé c o n t e n t eme n t qu i s'ensui–
vrait dans la population musulmane.
Cette population souffre aussi : elle
comprend déjà que la r évo l t e a rmé –
nienne est l é g i t ime et que le salut ne
peut venir que de l ' é t a b l i s s eme n t d'un
r é g i me tout différent i mp o s é au Sultan
par les puissances civilisées.
Ce n'est pas sans quelque surprise
que les agents consulaires ont c o n s t a t é
cet é t a t d'esprit. L e capitaine Ty r r e l l
avoue son é t o n n eme n t d'avoir t r o u v é
dans les montagnes sassouniotes des
paysans qu i n ' é t a i e n t pas, comme i l
l'avait s u p p o s é d'abord, les jouets
aveugles d'un petit nombre de « me–
neurs » ; mais que chacun d'eux élait
imbu de principes d ' i n d é p e n d a n c e et'
voyait dans les consuls une sorte
d ' émi s s a i r e s politiques qu i avaient en
vue les m ê m e s i d é e s . Dans une conver–
sation avec un notable A rmé n i e n , i l
s ' a p e r ç u t ainsi que la propagande r é –
volutionnaire des d e r n i è r e s
a n n é e s
avait p é n é t r é chaque classe de la popu–
lation, ainsi que l'espoir d'une inter–
vention e u r o p é e n n e qu i briserait le
j oug harnidien.
Il est vrai que dans cette m ê m e d é –
p ê c h e , le capitaine Ty r r e l l se pose
cetle question : « U n peuple o p p r i mé
n'a-t-il pas le droit mo r a l de se r é –
volter ? C'est possible, mais i l doit
ê t r e p r é p a r é à supporter les con–
s é q u e n c e s de sa r é vo l t e . » Jama i s ,
d'ailleurs, les fédaïs n'ont refusé de
subir les c o n s é q u e n c e s de leurs actes;
ils auraient pu sans doute, en avril,
obtenir toutes les sauvegardes pour
leur s é c u r i t é personnelle ; ils ne le
voulurent pas, o b s t i n éme n t d é c i d é s à
demander les r é f o rme s
é l éme n t a i r e s
que l ' Eu r ope a promises à leurs com–
patriotes, voilà plus d'un quart de
siècle.
On n'a pas le droit de rejeter sur eux
la r e s p o n s a b i l i t é des é v é n eme n t s san–
glants qu i se reproduisent et se p e r p é –
tuent dans les vilayets a rmé n i e n s . L a
vie normale des populations est un
enfer, de l'avis de tous ceux qui ont élé
à même de c o n n a î t r e sur place la d é –
tresse de toute une race ; d'innombra–
bles t émo i g n a g e s recueillis i c i et ailleurs
prouvent que la mort m ê m e a p p a r a î t
comme une d é l i v r a n c e à des malheu–
reux en proie à toutes les vexations et
à toutes les souffrances, e n t o u r é s de
voisins dont on leur a fait des ennemis,
qui souffrent aussi d'un atroce r é g ime
et qu i aspirent à ê t r e d é l i v r é s .
L ' a c t i on des fédaïs, qu i oblige les
plus aveugles à constater l ' i r r émé d i a b l e
ma l , ne crée pas ce ma l , L a cause en
est ailleurs et une double r e s p o n s a b i l i t é
est é v i d e n t e , celle du Sultan, celle de
l ' Eu r ope .
Il est parfaitement inutile d'attendre
du bon vouloir d ' Ab d - u l -Hami d , une
Fonds A.R.A.M