sonnes dirigée par le chef Waga r chag ,
de Mou s h , a eu le
7/21
juin une ren–
contre près de Z i v i n e (district de Pas–
sen) avec les Kurdes et réguliers. Le
combat très a c h a r n é dura toute la
j o u r n é e .
Les A r mé n i e n s r e p o u s s è r e n t p l u –
sieurs fois les assaillants et leur c a u s è –
rent de grandes pertes en l a n ç a n t des
bombes pa rmi eux. A la nuit tombante,
la bande, quoique r édu i t e de mo i t i é ,
réussit à gagner les montagnes.
T i f l i s , 9 juillet.
Mo u s h
7
j u i n ,
via
T i f l i s .— Les mas–
sacres dans les
v i l l a g e a r m é n i e n s d e l a
plaine de Mo u s h s ' é t enden t de jour en
jour avec une r ap i d i t é me n a ç a n t e .
L ' i r adé du sultan pour la réinstallation
des Sassouniotes dans leurs villages en
ruines n'est qu'une m a n œ u v r e pour
tromper l'opinion publique en Europe;
le m ê m e iradé ordonne de construire
d'abord des casernes sur les hauteurs
de Sassoun : cela signifie l ' ané an t i s s e –
ment définitif de la population a r m é –
nienne dans cette r é g i o n ; par une co ï n –
cidence é t r a ng e avec la promulgation
de cet i r adé , les massacres ont pris une
é t e ndu e plus grande, ainsi depuis le
4
j u i n on a ma s s a c r é les vi'lages a rmé –
niens de Comme r , Blel, Guarkof, K z l a -
ghadj, Raoud , Te l guebann , les femmes
et enfants ont été violés, les hommes
égorgés ou d i s p e r s é s ; dans les ruines
de ces villages et les alentours les cada–
vres gisent par centaines; à Mo u s h
m ê m e toute vie est devenue impossible,
magasins toujours fermés, personne
n'osant quitter sa demeure; partout on
égorge, surtout les gens riches et nota–
bles pour s'emparer de leurs biens.
Toute commun i c a t i on est interrompue
entre Mo u s h et ses environs.
Ceux qu i bravent le danger en sor–
tant de leurs villages ne reviennent
plus, m ê m e s'ils sont en nombr e ; pres–
que chaque nuit on tue
10
ou i 5 per–
sonnes. Dans divers villages a r mé n i e n s
les travaux des champs ont c e s s é ; de
tous côtés une masse de paysans cher–
chent refuge et nourriture à Mo u s h où
les provisions manquent, les affamés
meurent par dizaine chaque jour. Le
gouvernement et ses fonctionnaires né –
gligent c omp l è t eme n t la présence des
consuls eu r opé en s qu i recueillent des
renseignements i n d é p e n d a mm e n t des
agents gouvernementaux. A i n s i , les ha–
bitants du village r u i n é We r g o u n , de–
puis longtemps cha s s é s de leurs demeu–
res, r a s s u r é s par le dernier iradé du
sultan, étaient hier venus voir ce qu i
reste de leurs foyers r u i n é s ; leur con–
fiance fut châtiée terriblement : on les
massacra en masse; les consuls ont pu
avec indignation constater le fait le
m ê m e jour sur la place où gisaient les
cadavres. L a conduite du consul fran–
çais est digne d'éloges : i l fait tout son
possible pour soulager un peu la popu–
lation malheureuse, mais ses actions
ainsi que celles de ses collègues sont
s y t éma t i q u eme n t paralysées pa r l e gou–
vernement turc qu i , sous leurs yeux,
commet les horreurs de
1894-1896.
L a tête d 'An t r an i k est mise à prix
pour
1.000
livres.
M o u s h , 7
/21
j u i n ,
via
T i f l i s
16
juillet.
Ap r è s avoir ma s s a c r é les Sassounistes,
le gouvernement turc cherche par tous
les moyens à emp ê c h e r le retour des
survivants dans leurs foyers. Le vali
Fé r i d Pacha les fait venir chaque jour
au Ko n a k par groupes, et les oblige à
signer une pétition dans laquelle ils
d é c l a r e n t ne pas vou l o i r retourner au
Sassoun, et disent qu ' i l s préféreraient
s'installer dans la plaine, aux endroits
i n d i q u é s par le gouvernement. Le refus
de signer e n t r a î n e pour eux toutes sor–
tes de vexations. On les emprisonne et
on les menace, Les A r mé n i e n s ont de–
m a n d é l'aide des consuls afin de pou –
voir s'installer à nouveau dans leurs
montagnes.
L a situation est grave. Le
6/20
j u i n ,
le village de Te rquevank a été cerné
par les Kurdes : massacre, incendie.
Les assassins étaient conduiis par le
chef de la police, n o mm é Ahme d .
C o n s t a n t i n o p l e ,
28
j u i n (par lettre).
Les consuls de France, d'Angleterre
et de Russie transmettent à leurs am–
bassadeurs les rapports les plus précis
et les plus détaillés sur les atrocités
commises par les Kurdes dans le Sas–
soun. Ri en n'indique encore que les
actes de sauvagerie dont sont victimes
les populations c h r é t i e nn e s aient pris
fin.
L a c r u a u t é des p e r s é c u t e u r s s'exerce
sur les individus isolés et non plus sur
la masse des habitants.
D ' a p r è s une correspondance qu i re–
late les derniers é v é n eme n t s qu i se sont
produits m ê m e pendant la seconde
I
quinzaine du mois de j u i n , voici c om–
ment op è r e n t les fonctionnaires du sul–
tan., escortés dans leur t o u r n é e par un
d é t a c h eme n t de Ku r de s . Izzet bey,
commandan t de la gendarmerie de
Mo u s h , visite un à un les villages de
la plaine.
Au s s i t ô t que son arrivée est signa–
lée, les chefs des villages ottomans se
p r é s e n t e n t à l u i et l u i adressent un
rapport.
I mmé d i a t eme n t , sans jugement, p l u –
sieurs A r mé n i e n s sont exécutés. On
cite ce fait que deux chefs c h r é t i e n s ,
qu i ne s'étaient pas p r é s en t é s devant
l u i , ont été fusillés.
Lo r s qu ' un consul adresse des remon–
trances au
f OUCULU - i i i a i r c t u r c e u r
l'illé–
galité de pareils p r oc édé s , on l u i r é p o n d
que ces p r é t e n d u e s victimes ont été
trouvées les armes à la ma i n et qu'elles
n'ont été exécutées q u ' a p r è s jugement,
ce qu i est manifestement faux.
Dans un village, à l'approche d'Izzet
bey et de ses Kurdes, plusieurs hab i –
tants préférèrent se jeter à l'eau et se
noyer, p l u t ô t que d'être saisis par le
fonctionnaire ottoman. On a r e t r ouv é ,
le
16
j u i n , en pleine route, les corps de
plusieurs c h r é t i e n s , tenaillés.
Ces scènes quotidiennes sont rappor–
tées avec d'effrayants détails, dans les
rapports des consuls. Les grandes puis–
sances, qu i sont maintenant édifiées
sur les massacres d ' A rmé n i e , adressent
des remontrances verbales et écrites à
la Sublime-Porte et au sultan pour que
cesse de r é gn e r un état de choses con–
traire à l ' h uma n i t é el à la civilisa–
tion.
E n r é pon s e aux protestations de l ' E u –
rope, le sultan a d o n n é f u i d i e
q u e
deux cheikhs kurdes, Ab d el Ad d i et
A b d el D a k k i , fussent emb a r q u é s à
T r é b i z o n d e pour l u i être ame n é s , sous
p r é t ex t e de les consulter. Ces deux
cheiksj qu i exe r ç a i en t une grande i n –
fluence politique et religieuse dans la
région de Bitlis, et m ê m e dans tout le
Ku r d i s t an , avaient pour père un che i kh
dont la tombe, encore très vénérée, est
un lieu de p è l e r i n a g e . Ce che i kh a été
e n t e r r é non l o i n d'un s émi n a i r e mu –
su lman fondé et entretenu à ses frais.
Son fils a î n é , Ab d el Ad d i , a c o n t i n u é
ses œu v r e s .
Ces deux che i khs passent pour être
les véritables instigateurs des derniers
massacreurs. Le sultan, ap r è s les avoir
appelés à Constantinople, vient de les
exiler à T r i p o l i de Barbarie. S i x autres
Fonds A.R.A.M