T r è s satisfait de ce r é g ime anod i n ,
Ab d - u l - Ham i d l u i octroya faveurs sur
faveurs. Malheureusement pour l u i ,
t m i n bey était un grand génital. Outre
ses musulmanes, i l avait une ma î t r e s s e
c h r é t i e n n e . A un moment d o n n é , sa
passion s'accrut tellement q u ' i l parla
de divorce avec sa femme légitime.
Celle-ci s'en vengea comme savent se
venger les Orientales, en adressant un
rapport au sultan. Elle accusait son
ma r i de comploter contre l'existence
de Sa Hautesse. A l'appui de son dire,
elle fournit des preuves, preuves que
cette aimable mé g è r e avait d'ailleurs
forgées de toutes pièces. Dans sa ter–
reur, le sultan ordonna qu'on é t r a n –
glât de suite le soi-disant coupable.
Mais, au moment de l'exécution, ses
douleurs ayant cessé, i l commua la
peine de mort en bannissement per–
pétuel. Em i n n'est plus revenu, l u i non
plus, de la terre d'exil. Et ne croyez
pas que j ' i nven t e ; les journaux alle–
mands ont, à l'époque, relaté tout au
long ce tragique incident.
Les toutes dernières lettres que j ' a i
reçues de Constantinople disent que le
mal dont souffre Sa Majesté a fait d'ef–
frayants ravages. C'est pitié, paraît-il,
de voir dans quel affaissement phy s i –
que et moral se trouve le Comma n –
deur de tant de millions de musu lmans
prêts, quo i qu'on en dise, à verser
j u s qu ' à la de r n i è r e goutte de leur sang
pour la cause du Khalifat. Peu t - ê t r e
une op é r a t i on intelligemment prati–
quée prolongerait-elle sa pauvre exis–
tence. Mais toujours i l se refuse à une
intervention chirurgicale, p e r s u a d é que
le bistouri dépasserait le b u t .
A u surplus, qui lira les sombres tra–
gédies du Palais my s t é r i e u x ? T a p i au
fond de ses appartements, celui dont le
nom seul fait trembler est l u i -même
l'esclave de la Peur. Ne l'a-t-on pas vu
se réfugier une nuit sous le lit d'un de
ses mé d e c i n s ? Ne choisit-il pas chaque
soir, pour abriter ses cauchemars, une
chambre d i f f é r e n t e ? . . . Nous avons
essayé de lever un coin du vo i l e ;
puissent ces lignes tomber sous les
yeux des confrères français qu i vivent
sous le plus beau ciel du monde, dans
le plus doux pays, et qu i se plaignent
de leur sort !
D
r
H É R A N .
LES CAHIERS DE LA QUINZAINE
8,
rue de la Sorbonne
Ont publié
Mémoires et Documents .pour
la De'fense des Arméniens.
Par PIF.IIKF. Q I T L L A R D
(
l'n volume (le UHI pages}.
DOCUMENTS
Correspondance diplomatique sur les
affaires de Zeïtoun (Octobre 1895-
Avril 1896).
(
Livre Jaune de 1R97).
(
SUITE)
N°
73 .
M . P . C A M B O N , ambassadeur de la Ré–
publique française à Constantinople,
à M . B E R T H E L O T , ministre des affai–
res é t r a ng è r e s .
Péra, le
i"
janvier
i8g6.
Le Sultan a fait dire aux ambassadeurs
que leMutéssarif de Marache, accompagné
de notables, se rendait à Zeïtoun pour né–
gocier une capitulation. En cas d'échec de
cette mission, Sa Majesté aurait recours à
nos bons offices.
J'ai des raisons de croire que la mise en
mouvement des gens de Marache n'a d'au–
tre but que d'écarter notre intervention et
que le commandant militaire a reçu l'ordre
d'en finir vite afin qu'on puisse nous op–
poser le fait accompli.
Mais, si les Zeïtounlis ont encore des
approvisionnements, leurs positions sont
tellement fortes que la médiation des am–
bassades s'imposera comme en
1
863
et en
P.
C A M B O N .
N° 74.
M . P . C A M B O N , Ambassadeur de la
Ré p u b l i q u e française à Constanti–
nople, à M . B E R T H E L O T , Ministre des
Affaires é t r a ng è r e s .
Péra, le 3 janvier
i8g6.
La Sublime Porte a réclamé aujourd'hui
les bons offices des Ambassadeurs pour
faire cesser la résistance de Zeïtoun. Elle a
annoncé la suspension des hostilités pour
nous permettre d'exercer notre médiation.
Ce recours aux Puissances s'explique par
le bruit probablement fondé d'un échec des
troupes ottomanes.
Nous avons prescrit immédiatement à
nos Consuls à Alep de se concerter sur des
mesures propres à amener un arrangement
et de se mettre en rapport avec des insur-
P.
C A M B O N .
N°
7 5 .
M . P . C A M B O N , Ambassadeur de la
Ré p u b l i q u e française à Constanti–
nople à M . B A R T H É L É M Y , Gé r a n t du
Consulat de France à Al e p .
Péra, le 3 janvier
i8g6.
La Porte a recours aux bons offices des
Puissances pour mettre fin au conflit de
Zeïtoun. Elle a déjà donné l'ordre aux au–
torités militaires de suspendre les hostilités.
Réunissez-vous d'urgence avec les Consuls
pour arrêter la marche à suivre et convenir
des mesures propres à amener un arrange–
ment.
Les Consuls d'Angleterre et d'Italie ont
déjà adressé à leurs chefs des propositions
dont l'esprit général paraît bon. Vous pour–
rez vous en inspirer.
Nous avons demandé à la Porte de don–
ner des ordres aux autorités d'Alep, de
Marache et de Zeïtoun pour faciliter votre
médiation, assurer vos communications
télégraphiques ou autres avec les habitants
de Zeïtoun, garantir la sécurité des Consuls
ou de leurs délégués en cas de transport.
D'après ses communications, la Porte
voudrait imposer comme conditions : t ° la
reddition des armes de guerre; 2 " la recons–
truction de la caserne par des Zeïtounlis;
3
° la poursuite devant les tribunaux régu–
liers des chefs du mouvement.
Les Ambassadeurs ne se sont pas pro–
noncés à ce sujet. Ils laissent aux Consuls
la liberté de donner aux insurgés les con–
seils qui paraîtront les meilleurs pour les
faire renoncera la résistance et pour ame–
ner une capitulation acceptable. Tenez-moi
fréquemment au courant par le télégraphe.
Soyez en relations constantes avec les
autres agents. Sachez que l'entente des
Puissances est complète et que les Consuls
doivent se tenir en parfait accord.
P.
C A M B O N .
N°
7 6 . '
M . S U MM A R I P A , Vice-Consul de France
à Mersine, à M . P . C A M B O N , Amba s –
sadeur de la Ré p u b l i q u e française à
Constantinople.
Mersi?ie, le
3
janvier
i8g6.
Ma dernière dépêche relatait à Votre
Excellence le bruit que les troupes s'étaient
emparées de Zeïtoun. Rien n'est venu de–
puis confirmer cette nouvelle que je crois
avoir été propagée à dessein par l'autorité
pour écarter tout sujet d'effervescence dans
la population turque. Ce qui, aussi, a pu
faire considérer le fait comme vrai a été la
circulaire reproduite dans la presse euro–
péenne qui représente le gouvernement
turc comme exaspéré des atrocités com–
mises par les Zeïtounistes sur leurs prison–
niers et qui aurait donné l'ordre à ses trou–
pes d'entrer dans Zeïtoun. Comme les
Turcs pensent qu'un ordre du Sultan ne
saurait être différé, les autorités ont pensé
que l'exécution avait dû suivre la décision.
Le Gouvernement, en insistant sur la
rébellion de Zeïtoun, se sert habilement de
la seule arme qu'il ait pour essayer de con–
vaincre l'Europe de son bon droit et, pour
appuyer sa cause, i l croit utile de charger
Fonds A.R.A.M