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A R M E N J A -
la présence de la bande est vite signalée ; des
soldats et des kurdes y arrivent en grand
nombre. Les fédaïs voyant qu'ils ne pou–
vaient plus penser à se reposer, occupent
des positions dans le village, ils hissent le
drapeau au milieu du village et ouvrent l a
lutte avec le chant « Mer Haïrénick ».
Le gouvernement turc déplace toutes ses
forces, i l fait venir des soldats d'Erzroum, de
Déli-baba, de Kara-Kilissé, i l n'oublie point
do faire venir aussi des canons ; ils tirent le
canon des dizaines de fois, mais sans atteindre
le but.
Les fédaïs, après avoir lutté toute la jour–
née, n'ont eu qu'une seule victime, Nicole,
venu de Bakou ; l a perte de l'ennemi était
grande; les lédaïs ont pu prendre à l'ennemi
de nombreux fusils mausers, mais voyant
que les balles leur manquaient, et qu'il n'y
avait pas moyen de continuer la route ; ils
se décident à retourner en Bussie, et à re–
partir avec une nouvelle provision : i l y
avait à parcourir un chemin de 6 heures. Ils
prennent à l'ennemi, 19 chevaux, sur les–
quels montent les lédaïs fantassins, et tous
ensemble, environ 70 hommes, se p r é p a r e n t
à renter en Russie. Malheureusement, à une
heure de distance de la frontière, ils ont eu
à soutenir une nouvelle lutte ; une partie de
la bande, 14 hommes, sous la conduite de
Djallat, s'échappe et arrive à la frontière
russe ; mais a p r è s avoir passé la frontière,
10
hommes sont arrêtés à Isdahan et ame–
nés à Karaghouroud. Ils avaient 8 fusils
mausers et 7 chevaux kurdes; l'autre partie
de la bande se dirige vers d'autres en–
droits.
On envoie le chef russe des soldats gar–
diens de l a frontière à Kara-Kilissé, village
turc, pour y prendre des renseignements.
Le commandant turc exprime son mé c o n –
tentement en disant que les Russes ne gar–
dent pas l a frontière d'une façon régulière,
que 600 fédaïs l'avaient traversée en semant
partout la ruine et la dévastation, que 400 per–
sonnes avaient été tuées, tant militaires que
civils,qu'uncommandantavait été é g a l eme n t
tué, ainsi qu'un k a ï ma k am , trois officiers,
cinq caporaux et le fils aîné de Rachid pacha,
résidant à la frontière, et l'un des chefs des
tribus kurdes nomades.
Erzeroum, 21 octobre.
Ici, on ne parle que de la lutte livrée à
Passen; l'incident a eu lieu près de Kamat-
zor et Uzvéran. Les lédaïs, par leur attitude
prudente, réalisent vraiment des miracles.
Quand ils voient l'approche des soldats, ils
vont vite occuper des positions sur les mon–
tagnes, et commencent à tuer d'abord les
Kurdes — qui, en pareilles circonstances,
forment la bande offensive —et ensuite les
soldats. Des renforts furent envoyé d'Erze–
roum, avec quelques canons. Tewfik pacha,
commandant militaire, quand i l voit le mas–
sacre de ses soldats, et le triomphe d'une
p o i g n é e d'hommes, est irrité, et sans y
songer autrement, fait tirer le canon sur les
villages ; 61 obus sont lancés, sans qu'aucun
d'eux é c l a t e ; une partie de l'église dé K o -
matzor est seulement détruite. Non content
de cela, i l fait s é p a r e r les hommes a rmé n i e n s
des femmes, pour les fusiller; mais heureu–
sement, son adjudant Ahmed pacha survient
et l u i montre la responsabilité qui peut peser
sur l u i , et l u i déclare qu'il n'a pas affaire à
la population d é s a rmé e , alors que l'ennemi
est là.
Les fédaïs après avoir lutté h é r o ï q u eme n t ,
remportent la victoire; ils ont perdu 36
hommes, sans compter 9 personnes qui sont
prisonnières ; parmi ces d e r n i è r e s sont Mé-
lik de Karapagh, N i g h o g h a ï o s s de Kars et
Alexan de Kantzagh qu i seront probable–
ment remis à l'autorité russe. L'ennemi a eu
comme victimes 200 Kurdes, parmi lesquels
se trouvent aussi quelques chefs de tribus
kurdes et plus de 150 soldats, ainsi qu'un
commandant et quelques centeniers. L a
bande des fédaïs a semé la terreur parmi les
Turcs, soit à Passen, soit à Erzeroum; une
surveillance étroite est o r g a n i s é e en v i l l e ;
tous les soldats sont en mouvement; on en–
voie à Moush ou à Passen les soldats qu i
sont ici et on en fait venir d'autres d'Erzin–
ghian.
Passen, 2o octobre.
Le drapeau révolutionnaire a rmé n i e n a
flotté aussi sur les hauteurs de Passen.
Les bandes de fédaïs, cavaliers et fantas–
sins s'avançaient iièrement, affrontant tout
danger, quand elles furent a p e r ç u e s par l'en–
nemi et obligées de soutenir la lutte.
Notre perte n'est pas insignifiante; mais
les Turcs et les Kurdes, les Hami d i é s et les
Circassiens ont apprécié le feu révolution–
naire arménien
Aujourd'hui à Passen,
nuit et jour, on transporte les soldats bles–
sés, sur des chariots, de Déli-baba àHassen-
Kalé et de Ha s s a n -Ka l é à Erzeroum, ont été
tués de nombreux soldats et plus de 150 Kur–
des, Circassiens, etc. Le nombre des blessés
est également grand; les lédaïs ont eu 34
victimes et 11 hommes ont é t é faits prison–
niers.
Nos fédaïs ont enlevé aux soldats de nom–
breux chevaux et q u a n t i t é de munitions de
guerre ; quelques-uns des fédaïs arrêtés se
trouvaient à l a prison de Kassan-Kalé, mais
on les a maintenant t r a n s p o r t é s à Erzeroum.
Nous avons appris que l'un des prisonniers
était mort des suites de ses blessures et avait
été e n t e r r é à Erzeroum avec grande pompe
et cérémonie.
Partout, parmi les musulmans, on ne parle
que de la lutte de Passen, et on entend le
fonctionnaire turc qu i dit : « L o i n , loin de
nous, ce feu destructeur », et i l ferme en
même temps les yeux; le musulman paisible
s'écrie avec colère : « Périsse un tel gouver–
nement! nous n'avons point de tranquillité,
point de repos ».
LIRE :
L'EUROPÉEN
Courrier International Hebdomadaire
P O L I T I Q U E ,
D R O I T
I N T E R N A T I O N A L
Q U E S T I O N S
S O C I A L E S ,
L I T T É R A T U R E S , A R T .
Direction: C h . S E I O I V O B O S
(
Paris)
Rédacteur en chef : A . F E R D I N A N D
I I E R O L D .
2 4 ,
r u e D a u p h i n e , P A R I S (vt°)
Articles de M M . Frédéric P A S S Y . Francis de P R E S S E N S É
John.-M. R O R E R T S O N , D ' M . K R O N E N B E R G , A . A D L A R D
Marcel
C O L L I È R E , Xavier de R I C A R D , Raoul
A L L I E R ,
A n d r é F O N T A I N A S , Pierre Q U I L L A R D , Georges E E K H O U D .
L A R U S S I F I C A T I O N A U C A U C A S E
A la suite de l'ukase du
12
juin der–
nier, le tsar refusa ou ses conseillers l u i
firent refuser de recevoir le catholicos
d ' E t chmi adz i n qu i l u i avait d ema n d é
audience. Mais i l v a un moment où
Nicolas II est un peu moins le prison–
nier de ses terribles ministres : c'est
pendant son séjour à Darmstadt.
Les bruits du dehors y parviennent
plus a i s éme n t j u s q u ' à l u i et i l y reçoit
des informations plus précises sur l'état
où M . de Plehwe et ses pareils mettent
l'empire. Le catholicos a donc pu faire
parvenir à Darmstadt une lettre attris–
tée : comme n a g u è r e le patriarche Ismir–
lian déclarait devant le peuple a s s emb l é
à K o um Ka pou que son serment de
fidélité au sultan imp l i qua i t que la vie,
les biens et l'honneur des A r mé n i e n s
seraient en sécurité dans l'empire turc,
Mg r d i t ch K h r i m i a n , avec toutes les
réserves et tous les e u p h ém i sme s que
comporte le protocole moscovite et le
langage d'Église, déclare à son tour
qu ' i l ne peut, sans crime contre la na–
tion, s'associer aux mesures de spolia–
tion prises par le gouvernement du
tsar.
Vo i c i son é l o q u e n t e lettre :
Lettre autographe de MGRDITCH I,
catholicos de tous les Arméniens, à
L'EMPEREUR NICOLAS II, tou–
chant la décision du Comité des
Ministres du12 juin 1903, concer–
nant la gestion des biens et des
capitaux appartenant à l'Eglise ar–
ménienne.
12
septembre 1903.
A Sa Majesté Impériale, humble
supplique du catholicos de
tous les Arméniens.
Qu'il me soil permis, Sire, d'ouvrir mon
cœur devant Votre Majesté et de lui expri–
mer la grande douleur qui m'étreint et
que j'espérais pouvoir exposer personnelle–
ment aux pieds de Votre glorieux trône.
Vieillard de 84 ans, je me suis décidé à un
voyage lointain dans l'espoir d'avoir le
bonheur de me présenter devant la per–
sonne auguste de Votre Majesté, mais,
hélas ! j ' a i trouvé fermé pour moi l'accès
de ce trône, accessible à tous.
Une lettre officielle deM. leminisire de
l'intérieur m'informe que Votre Majesté a
bien voulu accorder son allention à mes
!
actes, actes qui L u i ont apparu comme
Fonds A.R.A.M