A la m ê m e é p o q u e , le chah de Perse,
mu s u l ma n , a p u b l i é le ferman suivant :
Je m'occupe d'une affaire qui me tient à coeur. La
nation arménienne, qui a été estimée par le trône depuis
l'antiquité et qui à toujours donné des preuves de
patriotisme et de loyauté, pense augmenter le nombre
de ses écoles à Téhéran, ïerbiz et dans d'autres villes
de la Perse, et fonder plusieurs écoles centrales parti–
culièrement importantes. Les intentions des Arméniens
étant absolument conformes à mes désirs, et leur
initiative constituant une sérieuse impulsion vers le
progrès de nos sujets dans tous les domaines de l'acti–
vité, nous accordons par ce ferman l'autorisation d'ou–
vrir des écoles de ce genre. Nous prenons ces écoles
sons notre protection spéciale, et nous ordonnons que
tous nos fonctionnaires donnent leur appui et leur
assistance énergiques à cette entreprise hautement
civilisatrice.
Fait au mois de Redjeb 1318.
Tou t commentaire affaiblirait le contraste
entre le tsar très c h r é t i e n et le mu s u l ma n
fanatique persan.
A . U .
—
, .
L A Q U E S T I O N D ' O R I E N T A U S É N A T
Rapport de M . M i l h a u d
La Macédoine n'est plus maintenant un
pays éloigné. A trois jours de nous par
l'express-orient, nous voyons se renouveler
chaque a n n é e , les même s férocités, les même s
pillages, les même s exodes, les même s scènes
de terreur et d'effroi !
Si la France semblait ignorer ce qui se
passe du côté des Balkans, elle ne serait
plus la France. Sans doute, la Russie et
l'Autriche, plus directement intéressées, ont
les intentions les meilleures ; mais nous
avons de tels intérêts d'ordre supérieur à
défendre et de telles traditions à garder,
qu'il nous est impossible de fermer les yeux
et de paraître nous recueillir. Noblesse oblige.
Devrons-nous donc trembler pour la paix
-
chaque fois que nous verrons arriver le
printemps et le soleil d'avril? Devrons-nous
sans agir nous exposer à voir recommencer
la guerre et les p e r s é c u t i o n s ?
(
Très bien!)
j-
On promet des réformes. On a essayé de
toutes sur le papier ; on a tenté de tous les
procédés possibles : la gendarmerie inter–
nationale — c'est là la grande réforme d'il
y a cinq ou six ans — puis des commissaires
spéciaux n ommé s par telle ou telle nation ;
puis des percepteurs d ' imp ô t s é t r a n g e r s ;
puis des troupes mobiles d'un vilayet à l'autre.
Cetle année, on a inventé les secteurs.
Je n'ai pas plus de confiance dans le par–
tage de la Macédoine en secteurs que dans
les promenades de quarante-huit heures à
Mitylène comme celle d'il y a deux ans pour
avoir raison du sultan de Constantinople.
Monsieur le ministre, permettez-moi d'être
d'autant plus sincère que vous me savez de
vos amis...
M. LE MINISTRE. Vous me devez la vérité
aussi.
M . L E RA P P OR T E UR . Je vous la dois et je
vous la dis aussi amicalement que je Te
peux.
Je ne crois pas suffisants les moyens em–
ployés j u s q u ' à ce jour.
A côté de la Russie et de l'Autriche, notre
action peut être plus efficace qu'elle ne l'a
été j u s q u ' à ce jour. Donnez-nous, je vous
prie, quelques explications qui seront très
bien accueillies, je n'en doute pas, par la
haute Assemblée qui me fait l'honneur de
m'écouter.
(
Marques d'assentiment.)
Dé c l a r a t i o n de M . De l c a s s é
U n fait nouveau s'est produit dans le déve–
loppement des affaires balkaniques. L a
Porte, après l'avoir rejetée, a accepté dans
son ensemble, se r é s e r v a n t d'en discuter les
points successifs, la note par laquelle l ' A u –
triche et la Russie ont réclamé des garanties
pour l'exécution du programme de réformes
qu'elles lui avaient p r é s e n t é au mois de fé–
vrier.
'
.
De m ê m e qu'elles avaient r e c omma n d é ce
programme à la Porte, les puissances, la
France au premier rang, et avec une é n e r g i e
toute particulière, ont. appuyé la demande
de garanties. Chacun était ainsi dans son
rôle : l'Autriche et la Russie prenant l'initia–
tive parce que, par leur situation même ,
elles sont le plus directement intéressées au
maintien de la tranquillité dans les Ba l kan s ;
les autres puissances secondant les initia–
tives de l'Autriche et de la Russie parce que,
comme puissances signataires du traité de
Berlin,, elles ne peuvent pas ne pas avoir à
cœu r l'amélioration du sort des populations
balkaniques et la fin de mouvements insur–
rectionnels susceptibles de compromettre à
la l o n g u e l a paix générale, à laquelle elles
sont toutes é g a l eme n t a t t a c h é e s .
L a Porte ayant donc accepté en principe
la note austro-russe, les cabinets de Saint-
P é t e r s b o u r g et de Vienne, sans se perdre en
discussions interminables avec elle, ont i m –
mé d i a t eme n t n ommé s les c o n t r ô l e u r s qui,
aidés de secrétaires et de drogmans, auront
pour mission de tenir la main à l'exécution
des réformes.
Quant à l'organisation non moins urgente
de la gendarmerie, pour la protection 'des
personnes et des biens, elle devra être assu–
rée par des officiers et des sous-officiers de
leur nationalité. L a France — ai-je besoin
de le dire? — est toute prête à collaborer à
cette r é o r g a n i s a t i o n et, voyant, non sans
quelque a p p r é h e n s i o n , la saison s'avancer,
elle est plus que jamais décidée, dans la me–
sure où ses propres intérêts le permettent,
et où sa participation aux traités internatio–
naux le commande, à ne rien négliger pour
qu'avant la fonte des neiges, l'œuvre des
réformés soit assez e n t amé e pour donner
confiance aux populations et d é c o u r a g e r les
tentatives des partisans quand même de
l'insurrection.
(
Très bien! très bien!)
_
;
•
<>
.
A P P E L
AUX
Philarmènes d ' E u r o p e e l a u x l e c t e u r s d e " P r o A r m e n i a "
(
SUITE)
Vexations commises par les " mullézims "'.
—
Ceux qui achètent la dîme s'appellent
«
mnltézims » ; une fois que le gouverne–
ment a vendu la dîme au « multézim », i l ne
s'en occupe plus ; que les villages soient i n –
cendiés, les habitants anéantis, peu l u i i m –
porte. Les paysans sont à la merci de ces
«
multézims » ; i l est facile d'imaginer la s i –
tuation des paysans a rmé n i e n s quand le
«
multézim » arrive dans le village avec ses
hommes. L u i et ses hommes, avec les che–
vaux se font nourrir pendant trois longs
mois et de la plus belle façon. Us volent de
nuit les meules des paysans et leur font en–
suite payer des amendes sous prétexte que
ce sont les paysans e u x -même s qui oat volé
le blé pour ne pas payer la d îme . Pendant
des semaines et des mois, ils restent sans
mesurer les meules j n s q u ' à ce que la pluie
vienne a n é a n t i r le blé ; i û agissent aipsi, car
ils veulent faire payer au paysan plus qu'ils
n'auraient reçu en faisant payer la d îme . Le
paysan qui ose protester est atrocement
fouetté. J'en ai vu plusieurs qui étaient tom–
bés malades par suite des coups reçus. Le
pauvre paysan qui paye la d îme abandonne
en réalité la moitié du fruit de son travail
aux percepteurs barbares.
3
° A T ROC I T É S K U R D E S .
—
Il y avait une
é p o q u e où, ainsi par exemple du temps
du Congres de Berlin, nous autres, nous
protestions contre les pillages des Kurdes,
dans l'espoir que le gouvernement turc met–
tra un terme aux méfaits de ces brigands
effrénés. Aujourd'hui nous enregistrons les
faits barbares des Kurdes et nous protes–
tons contre le gouvernement turc qui, mal–
gré les promesses faites dans le traité de
Berlin qu'il mettra un terme à leurs méfaits,
les a pris sous sa protection et les a autori–
sés à voler sous son nom.
Le colonel Hamidié, Suleyman de Hass–
nan, emporta, l'automne passé, du village
de Erizak, 107 vaches et mulets ; parmi les
paysans qui ont poursuivi les brigands, i l y
en a deux tués par ces derniers qui ont em–
p o r t é tout le butin.
Les chéïkes d'Ekmal ont brûlç dans le
même village 1.200 gerbes de fourrages ; ils
ont emp o r t é pour 2.000 piastres de combus–
tible, 600 gerbes de fourrages, 200 poules,
45
brebis, 30 kilos d'orge, 30 kilos de b l é ; ils
ont fait travaillé par force 200 hommes avec
leurs 800 bestiaux. -
Dans le même susdit village, un Kurde
n omm é Nossé enlève une femme a r mé n i e n n e
n o mm é e Meymo. Dans le village d'Avazagh-
pur, le Kurde n o mm é Séhin enlève la femme
d'un A rmé n i e n n omm é Arouth.
Le monstre n omm é Djazo, coupe, dans la
plaine, les pieds de quatre mulets, les laisse
ainsi et s'éloigne ; i l incendie l'étable d'un
n omm é Melkon ; les animaux sont a s p h y x i é s ;
il incendie de même la maison de ce der–
nier qui arrive à peine a s'échapper parmi
les flammes; le pauvre homme a aujourd'hui
perdu la raison.
Chacun est obligé dans le village, à l'oc–
casion de son mariage, de faire un cadeau
au susdit monstre, Djazo; un A rmé n i e n
n omm é Oh a n n è s qui s'y était refusé, a vu
son bœuf et ses 10 litres d'huile emp o r t é s .
A Arindjvank, le colonel Hami d i é , Ismaïl
de Djibran, avec 30 Kurdes, arrive dans le
village et exige des paysans de donner à
chacun d'eux une femme pour coucher en–
semble, sous menace de passer tout le
monde au fil de l'épée. Le Kurde Fadoullah
d é s h o n o r e une femme a r mé n i e n n e ; i l coupe
2.000
arbres dans le même village.
Le chef de municipalité de Moush, Mouss–
tafa, coupe par force 100 peupliers et les
emporte à Moush pour ses constructions; i l
Fonds A.R.A.M