de l'argent à l ' É t a t ? Des influences plus
hautes l ' emp o r t è r e n t sur celle de M . de
Wi t t e , l'influence de M . de Plehwe et celle
sans doute de Pobedonotzefî.
L e m é c o n t e n t e m e n t est toujours très v i f
au Caucase. Selon certaines informations,
les A r m é n i e n s auraient tenu des r é u n i o n s
secrètes; ils auraient eu l'intention d'exiger
la d ém i s s i o n du catholicos d ' E t c hmi a d z i n
qui n'a pas protesté contre la décision du
gouvernement. L e bruit de cette d ém i s s i o n
parvint m ê m e à Constantinople où l ' i n d i –
gnation est vive aussi, les A r m é n i e n s de
Tu r q u i e c o n s i d é r a n t que les biens confis–
qués sont la propriété de toute la nation
a r m é n i e n n e . L a nouvelle a été d éme n t i e
tardivement, longtemps après l'envoi d'une
dépêche à E t c hm i a d z i n par le patriarche
Orma n i a n . Il est vrai que d ' a p r è s
la Vérité
française,
d'ordinaire bien i n f o rmé e sur
les choses d'Orient, les lettres et dépêches à
destination du catholicos K h r i m i a n sont
interceptées par la police russe. Selon d'au–
tres rumeurs en cours, i l aurait été question
de donner c omme successeur à celui-ci le
catholicos de Sis, r é c e mm e n t élu et installé,
et de fermer les églises pendant un certain
temps, ainsi q u ' i l fut fait à Constantinople
après les p r emi è r e s tueries qu i suivirent la
manifestation d e B a b - A l i .
E N MAC É DO I N E .
Condu i t e avec une
mé t h o d e audacieuse et prudente, l'insur–
rection m a c é d o n i e n n e gagne du terrain. S i
la région o ù éclata le mouvement principal
de l ' a n n é e d e r n i è r e est relativement tran–
quille, j u s q u ' à nouvel ordre, le.vilayet de
Monastir et celui d ' And r i nop l e sont en état
de guerre ; non seulement des villages,
mais des bourgs et des villes ont été pris par
les bandes et i l ne faudrait pas s ' é t o n n e r
outre mesure d'un coup de ma i n hardi sur
Constantinople m ê m e ; le pays entre ' la
frontière bulgare et la capitale turque est
propice à une o p é r a t i o n de ce genre, et de
Tchataldja ou de T c h e r k e s k e u ï une bande
hardie peut, pousser une pointe jusqu'aux
Sept-Tours ou d u mo i n s j u s q u ' à la banlieue
de Ku t c h u k Tc h e kme k j e et de San Stefano.
L'aventure aurait une valeur purement d é –
monstrative, mais c'est déjà un singulier
signe que les faibles troupes des i n s u r g é s
puissent é v o l u e r a si peu de distance d ' Y l d i z
et menacent de couper les communications
entre la résidence de l'Assassin et ses pro–
vinces d'Europe.
Bien que dans toutes leurs proclamations
les chefs des i n s u r g é s aient déclaré qu'ils
n'avaient aucun sentiment hostile à l'égard
des habitants non bulgares de Ma c é d o i n e
(
Turcs, Hellènes, Serbes, Valaques), ils pa–
raissent n'avoir pas été écoutés et avoir
traité en belligérants .les Tu r c s et les H e l –
lènes alliés contre eux. Les é t u d i a n t s hel–
lènes d ' A t h è n e s qu i envoient demander à
Saadeddine bey, chargé d'affaires de T u r –
quie, l'autorisation de prendre d u service
dans l ' a rmé e turque, donnent u n é t r a n g e
exemple à leurs frères i r r é d i m é s ; ils prépa–
rent à l ' h e l l é n i sme u n désastre mo r a l a u p r è s
duquel les défaites de Larissaet de Domo k h o
furent sans importance; et ils auraient
tort de prendre au sérieux l'extraordinaire
Premier-Paris du
Temps,
qu i les loue de
leur sauvage nationalisme, beaucoup mo i n s
par sympathie pour eux que pour prendre
en l'absence de M . de Pressensé le contre-
pied de ce que celui-ci aurait écrit en pa–
reille circonstance. Les Serbes du vilayet
de Kossovo semblent, au contraire, dispo–
sés à faire cause c ommu n e avec l'insurrec–
tion : ils ont souffert et souffrent les m ê m e s
ma ux que les révoltés d'aujourd'hui.
L'attitude des puissances, ma l g r é la d é –
monstration navale russe, demeure incer–
taine et hésitante. Les deux empires unis
pour une politique négative se surveillent
sournoisement et lorsque les navires russes
parurent au large d'Iniada, ce fut u n beau
tumulte dans la presse officieuse autri–
chienne. Pu i s tout s'apaisa c omme par m i –
racle une fois connues et acceptées les exi–
gences russes : punition de l'assassin et de
ceux q u i avaient assisté au meurtre du
consul Ro s t ows k i ; destitution et mise en
jugement de vingt-quatre . fonctionnaires
ma l notés par les consuls russes; mise en
liberté des prisonniers incarcérés pour avoir
o s é ' s e plaindre des violences administra–
tives; b l âme officiel à l'inspecteur général
H i l m i P a c h a ; destitution des chefs de la
gendarmerie et de la police de Sa l on i que ;
nomination d'officiers de gendarmerie eu–
r o p é e n s ; ce dernier point était visé par
acquit de conscience, en m é m o i r e de la
(
ameuse note du
21
février dont i l était l'es–
sentiel. L a Porte se serait adressée au gou –
vernement belge : mais les
deux
officiers
suédois n o mm é s déjà veulent d ém i s s i o n n e r
n'ayant reçu ni solde n i ration.
A i n s i , du moment que le gouvernement
russe a retiré sa flotte, sans avoir d e m a n d é
aucune réforme sérieuse, l'optimisme des
hommes d'Etat e u r o p é e n s est presque satis–
fait; i l le sera mi eux encore, qu a nd plus de
sang aura coulé q u ' i l était facile d ' é p a r g n e r .
L a presse d'Europe non i n d é p e n d a n t e
rejette toute la faute sur les i n s u r g é s q u i
ont le tort, dans une lutte inégale contre
un adversaire cent fois plus puissant, d'user
de tous les moyens de défense en leur
pouvoir. Elle ne mentionne pas les faits
certains, anciens ou récents, q u i ont causé
l'exaspération d'hommes naturellement pa–
cifiques et en regard de ses d é c l ama t i o n s
i n d i g n é e s contre les r é v o l u t i o n n a i r e s , i l
faut toujours mettre les atrocités commises
par ordre i mp é r i a l . V o i c i donc un fragment
du
Mémorandum
bulgare
adressé aux
puissances e u r o p é e n n e s .
Le
4
mai, tous les professeurs et six notables
de Castoria,
14
bulgares de Krupisehta,
6
de
Dambeni sont mis en prison ; le
7,
sont incar–
cérés le professeur Stefanow, de Tschetirog, et
Kimon, de Drenitschewo. Le
3
o
mai, sont em–
prisonnés, à Monastir,
4 0
Bulgares des villages
voisins de Kossinetz, Smardesch, Lubanitza et
Bambel, dont huit prêtres. Le même jour Smar–
desch est bombardé : le village de
3
oo
maisons
est aujourd'hui un monceau de cendres. Le
i 3
juin, rencontre d'une troupe de bachibou–
zouks et de réguliers avec une bande près du
village de Gabresch ; au lieu de poursuivre la
bande, les troupes se jetèrent sur le village et
tuèrent
17
habitants. Le
3
juillet, un détache–
ment de soldats commandé par l'officier Meh–
med effendi entre à Zagoritchani, roue de coups
dix paysans, pend deux malheureux, la tête en
bas, par le gros orteil
A Smardesch, plus de
200
personnes ont été
fusillées, mutilées, brûlées; plus de
25
o
maisons
avec l'église et l'école, incendiées au pétrole . .
Après l'attentat de Salonique,
2.800
Bulgares
ont été emprisonnés, sans compter ceux qni
sont gardés dans les prisons de district. A A n -
drinople, d'un seul coup, sans jugement,
81
Bulgares, dont
4
prêtres, ont été déportés en
Asie-Mineure.
Et c'est ainsi i n d é f i n i me n t . Cependant la
presse hami d i enne de tous les pays néglige
d'informer son public de ces faits divers
sans importance et préfère flétrir quo t i –
diennement les attentats des brigands ma –
c é d o n i e n s .
S E R V I L I T É D'OPPRIMÉS.
Les j ou r n a ux
turcs d u
18
a o û t enregistrent quelques dis–
tinctions honorifiques accordées à des rayas
q u i ont fait montre de servilité: M i k a e l
effendi Mam i g o n i a n , directeur d u bureau
de traduction au m i n i s t è r e de la guerre, et
Mehraje effendi, du m ê m e bureau, le D
r
colonel Gabriel bey, les D
r s
colonels L a m -
b i k i bey et Al exand r e bey A r a b i a n , d u ser–
vice sanitaire du seraskiérat, ont été déco–
rés de la mé d a i l l e du
Liakat
pour avoir
a b a n d o n n é au profit d u c h emi n de fer
H a m i d i é du Hedjaz u n mois de leurs
appointements. Passe encore pour les H e l –
lènes qu i vainquent en loyalisme, mome n –
t a n é m e n t , toutes les autres nations de
l ' Emp i r e ; mais que des A r m é n i e n s attirent
l'attention du ma î t r e par leurs flagorneries,
voilà q u i ne leur est point à grand h o n –
neur.
L E FOU D ' Y L D I Z .
Les troupes h am i –
diennes, non payées, pillent les pays qu'elles
ont soi-disant mission de d é f e n d r e . Sa
Majesté Imp é r i a l e q u i n'a pas d'argent pour
ses soldats ni pour ses fonctionnaires, sait
en trouver et en dilapider avec prodigalité
sitôt q u ' i l s'agit de sauvegarder sa précieuse
personne contre des ennemis réels ou i ma –
ginaires. Ses terreurs et ses folies ayant
grandement a u gm e n t é depuis la tuerie de
Belgrade, H a m i d effendi a r é o r g a n i s é 1e
service des gardes dans ses appartements
particuliers.
Fonds A.R.A.M