500
fédaïs; nous leur souhaitons bonne
chance. Des s o u p ç o n s p è s e n t sur les A r –
m é n i e n s et on en parle sourdement; le
mu s u lma n ignorant et le soldat qu i a soif
de pillage, savent donner aux choses, dans
leur ima g i n a t i on , une importance e x a g é r é e
el pensent aux moyens et aux motifs du
c h â t i m e n t . P r i v é e de tous les moyens de
se d é f e n d r e e l l e - m ê m e , l a population
anxieuse a peur d ' ê t r e victime d'une folle
fantaisie; si un malheur nous attend, c om–
bien nous serions heureux d'avoir en nous
tous les moyens de d é f e n s e , car ainsi, au
moins, la population se sentirait un peu
en s û r e t é .
Les Ku r d e s auraient r e ç u l'ordre de
partir pour Kn o u s s ; nous i gno r on s o ù
ils peuvent aller de là.
L E T T R E DE T C H I M I S UKA Z AKH .
2 3
Mai
igo3.
I l e s l inutile de vous dire que le district
entier, villes et villages, o p p r i m é s par tous
les moyens, se trouvent dans une situation
d é s e s p é r é e .
A une distance de 2 heures de la ville,
se trouve le village de Ha g h t o u g h , q u i lors
des é v é n eme n t s , g r â c e à la protection des
Ku r d e s , n'eut pas le malheur d ' ê t r e livré
au pillage; depuis lors, la politique d u
gouvernement a toujours élé d ' a n é a n t i r ce
ce village. D e r n i è r e m e n t , des tribus tur–
ques et kurdes des environs ont fait des
e mp i é t e m e n t s sur les p r o p r i é t é s des ma l –
heureux paysans ; elles se sont e m p a r é e s
des champs et des forêts q u i forment leur
unique moyen d'existence ; le gouverne–
ment ne p r ê t e pas oreille à leurs protesta–
tions ; le gouvernement a déjà délivré des
actes de p r o p r i é t é à ceux q u i avaient déjà
délivré des actes de p r o p r i é t é à ceux q u i
avaient confisqué les champs, et q u i sont
devenus les p r o p r i é t a i r e s l é g i t i me s . Le s
fonctionnaires affamés du gouvernement
profilant ainsi de l'occasion se sont fait
largement graisser la patte par les brigands
devenus p r o p r i é t a i r e s .
D e r n i è r eme n t , les Ku r d e s , marchant con-
tre une autre tribu de Kh a r b a l , emportent
les troupeaux, et viennent passerla n u i t p a r
force dans le village a r m é n i e n de H a g h –
tough. S u r quo i la tribu de Kh a r b a l se
plaint au gouvernement en disant que ce
sont les habitants de Ha g h t o u g h q u i ont
e mp o r t é les bestiaux. L e gouvernement
emprisonne les gens de Ha g h t o u g h et les
maltraite comme receleurs; c'est pour l u i
un nouveau p r é t e x t e pour leur extorquer
de l'argent; i l a pu , j u s q u ' i c i , leur extor–
quer plus de 100 livres. L e gouvernement
a d é c i d é de garder 50 soldats dans le v i l –
lage de Ha g h t o u g h , qu i p o s s è d e à peine
25
maisons, c ' e s t - à - d i r e 2 soldats pour
chaque maison ; dans ces conditions, vous
pouvez vous faire une idée de l a situation
de ces pauvres gens ; que de crimes abo–
minables ne se c omme t - i l pas sous le
ciel ! Le s soldats ont e n l e v é d e r n i è r e m e n t
une jeune fille du village de T e k k è ; quand
les paysans ont d é p e n s é tout leur argent,
le gouvernement r é p o n d ainsi aux protes–
tations sans nombre : « Pu i s q u e vous vous
plaignez que vos voisins, kurdes ou turcs,
vous maltraitent, pou r quo i donc n ' ê t e s -
vous pas satisfaits des soldats qu i sont
g a r d é s dans le village pour vous p r o l é g e r !
Cela ne fait pas votre atl'aire, n'est-ce pas?
O les ghiaours, pensez-vous que le g o u –
vernement vous laissera libre d'agir à
votre m a n i è r e ? »
,
Telle est plus ou moins la situation dans
tous les villages; i l serait beaucoup trop
l o n g de vous é n u m é r e r les d é t a i l s . O n a
c o n f i s q u é de nouveau les champs des A r –
m é n i e n s des villages de P i l o u r et Ma k h m é a ,
ainsi qu'une dizaine de champs apparte–
nant à la famille Ad j ém i a n . Le s protesta–
tions sont nombreuses, mais le r é s u l t a t
est toujours n u l .
En ville, les pauvres boutiquiers sont
o b l i g é s de donner les marchandises pour
rien ou de fermer leurs bouliques, s'ils ne
veulent pas encou r i r une amende [dus
forte. Le s portes des maisons sont tou–
j ou r s f e r mé e s ; car les loups a i ï a m é s du
s u l l a n , a u s s i t ô t qu'ils voient une porte ou –
verte, ils e n l r e n l , el a p r è s avoir d é s h o n o r é
jeunes filles el femmes, ils s ' é l o i g n e n t em–
portant tout ce qu'ils t r ouven l .
L I R E :
L'EUROPÉEN
C o u r r i e r 1
11
1
e r ' r
1
a t i o n a 1 I I e l > d o r r i a ( i a , i î ' e
POLITIQUE. DROIT' INTERNATIONAL
QUESTIONS SOCIALES, LITTÉRATURES, ART.
Direction: O h . S E I G N O B O S
(
Paris)
Rédacteur en chef : A . FERDINAND I I E R O L D .
2 4 ,
r u e D a u p h i n e , P A R I S
(
vu)
Articles de M M . Frédéric PASSY. Francis de PRESSENSÉ
John.-M. ROBERTSOIV, D
1
'
M . KRONENBERG, A . AULARD
Marcel COLLIÈRE, Xavier de RICARD, Raoul ALLIER,
A n d r é FONTAINAS, Pierre QUILLARD, Georges EEKHOUD.
Vient < lo paraître :
Nouveau Dictionnaire illustré
français-arménien
Par Guy de LUS IGNAN
Deux forts volumes de
1,060
et
816
pages.
5 0
f r .
Chez l'Auteur: 108, Avenne de Neuilly (Neuilly-sur-Seine).
LES CAHIERS DE LA QUINZAINE
S, rue de la Sorboi_xie
Ont publié
Mémoires et Documents pour
la De'fense des Arméniens.
Par P I E R R E Q U I L L A R D
(
Un volume de 160 pages).
LA QUINZAINE
En Perse et en Turquie d'Asie.
A Tauris, la sédition religieuse des
mollahs est e n t i è r eme n t t e rmi n é e : les
é co l e s el les magasins fermés sont ou–
verts à nouveau; le directeur belge des
douanes a rejoint son poste et le tarif
douanier est a p p l i q u é i n t é g r a l eme n t ,
bien qu'il mette la population de la
Perse dans la d é p e n d a n c e é c o n om i q u e
de la Russie. Il a donc suffi que le gou–
vernement du shah prît la défense des
A rmé n i e n s et des E u r o p é e n s lésés pour
que le fanatisme des p r ê t r e s s ' a p a i s â t
a u s s i t ô t .
De Turquie, au contraire, nous vien–
nent de sinistres nouvelles. L a d é p ê c h e
de Tiflis ne donne pas d'explications
sur le détail des é v é n eme n t s , mais les
lettres que nous publions plus haut,
ainsi que d'autres informalions plus
r é c e n t e s , permettent de l ' i n t e r p r é t e r
dans le pire sens.
Déjà l'attitude de plus en plus mena–
ç an t e des Kurdes a clé s i gna l é e ici à
maintes reprises. Le voyage d'Hussein
Pacha à Constantinople et les instruc–
tions de meurtre qu'il y a vraisembla–
blement r e ç u e s n ' é t a i e n t pas de nature
à apaiser les tribus ni les troupes ha–
midiés qui demandent à recommencer
les profitables exploits de 1895-1896.
Ave c ou sans l'assentiment du sultan,
les Kurdes paraissent d i s p o s é s à agir.
A Dersim, ni eux ni les Ki z i l ba ch s
n'ont jamais clé soumis que de nom et
lorsqu'il leur plut, l'an dernier, de dé–
valiser le consul russe, la promenade
militaire exé cu t é e autour de leurs fo–
r ê t s fut une simple d émo n s ! r a t i o n de
bonne vo l on t é ottomane à l'égard du
puissant voisin moscovite : jamais i l
n'était venu à l'idée du ma î t r e d ' Y l d i z
qu'elle eû t aucun r é s u l t a i effectif.
A Al a s gh e r d , à Khnou s , dans la
plaine de Mou s h , les nchircls se ras–
semblent, ainsi qu'il en avait été con–
venu depuis plusieurs mois, dans des
intentions qui n'ont rien de pacifique.
En attendant de plus amples brigan–
dages, à Tc h i i n i c h Ka z ak
(
Rapport du
10
juin)
les tribus du district voisin de
Tcharsandjak se battent entre elles; i l
y a, en grand nombre, des lues el des
b l e s s é s . Les villages a rmé n i e n s de la
r ég i on , les seuls où existent des exploi–
tations agricoles (Kurdes, Kizilbachs
Fonds A.R.A.M