l i è r eme n t E . T . Moneta e l à Rome , l ' i l –
lustre professeur S e r g i q u i « au d é t r i me n t
de ses propres travaux » s'est o c c u p é avec
une ardeur infatigable au s u c c è s de l ' œu –
vre ; i l remercie aussi l'Association des
femmes et la jeunesse intellectuelle ita–
lienne et se félicite que le hasard bienveil–
lant, l u i ait fait retrouver à Rome , Anatole
France « que ce serait d imi nu e r que d'ac–
compagner son n om d'une é p i t h è t e quel–
conque. » Il termine ainsi :
Je ne tenterai pas de vous exprimer l'émotion pro–
fonde que j ' é p r o u v e en ce moment, mais, parmi tant
de pensées, d'inquiétudes et d'espérances, ce qui domine
en moi c'est l'immense gratitude pour tout ce que
votre présence ici semble me promettre. Elle me pré–
sage une A r m é n i e protégée et reconnaissante.
Vive l'Italie !
De longs applaudissements é c l a t e n t et
on crie : « V i v e l ' A r m é n i e ! V i v e la Ma c é –
doine ! »
Le Professeur de Gubernatis
expose les raisons historiques qui c om –
mandent à l'Italie d'intervenir en Ma c é –
doine et en A r mé n i e . Comme i l entre dans
des détails p r é c i s et rappelle les origines
et les gestes de la nation a r m é n i e n n e , une
partie de l ' a s s emb l é e s'impatiente. « Mais
l'histoire est instructive ! » r é p l i q u e l'ora–
teur qu i continue au mi l i e u des applaudis–
sements. I l conclut en disant que les peu–
ples civilisés ne peuvent t o l é r e r qu'une
nation qu i a u n g r and p a s s é historique soit
la victime d'une soldatesque ignorante et
du plus odieux des gouvernements.
Anatole France
ne peut commencer à parler q u ' a p r è s
plusieurs minutes d'applaudissements et
de cris de : V i v e la France ! A maintes re–
prises, i l est i n t e r r ompu par des clameurs
d'approbation et i l termine, au mi l i e u d'une
ovation enthousiaste, son v é h é m e n t dis–
cours aux p é r i o d e s harmonieuses et pures.
Le Dé pu t é Del Balzo
r e m é mo r e les luttes soutenues par l a R é –
publique de Venise pour a r r ê t e r l'expan–
sion de la barbarie turque. P u i s i l parle
des m é t h o d e s de gouvernement emp l o y é e s
en Tu r q u i e et des m œ u r s j ud i c i a i r e s tur–
ques. Il parle des tortures e x e r c é e s dans
les prisons et « s u r ce point », d i t - i l , faisant
allusion à la mort de G i a c omo d ' Ang e l o ,
«
nous avons aussi u n peu de Tu r q u i e en
Italie. » Il poursuit :
Après les discours que vous avez entendus, je n'ai
pas à vous décrire les massacres d'Arménie et de
Macédoine, massacres qui sont une honte pour l'Eu–
rope.
L'Europe autrefois s'est émue el a fait les stipula–
tions du traité de Berlin. Ces stipulations ont la va–
leur de certains billets de banque de notre connais–
sance.
(
Rires).
Laissons donc à leur place hommes d'Étal et diplo–
mates et tournons-npus vers le peuple. Notre peuple
ne peut pas, ne doit pas assister impassible à l'oppres–
sion par une puissance barbare de peuples aspirant à
la liberté et à la civilisation.
Nous pouvons beaucoup pour l'Arménie et la Macé-
donie.
Ce n'est plus la Rome impériale ou la R o m e papale,
mais la Rome du peuple qui doit être partout où i l y
a un peuple o p p r i m é .
(
Vifs
applaudissements).
M. B. Pandolfi
L e d é p u t é Mazza q u i devait parler é g a -
ment est retenu à Ravenne. L ' e x d é p u t é
Pandolfi d é m o n t r e que p a rmi toutes les
nations civilisées, l'Italie a le devoir et
l'intérêt majeur d'intervenir pour la s o l u –
tion de la question a r m é n i e n n e . Les A r m é –
niens veulent ce que voulurent les R u l -
gares, les Ro uma i n s et les Serbes et ce
que nous aussi nous voulons : la l i b e r t é .
(
Applaudissements.)
Le Citoyen Garzia Cassola
est accueilli par des applaudissemenls
p r o l o n g é s . L'orateur socialiste dit que vu
l'heure a v a n c é e i l fera « un massacre turc
de ses arguments. » Mais i l doit dire que
le parti socialiste ne pouvait s'abstenir
qu a nd on proteste contre l'injustice et la
c r u a u t é du gouvernement turc. L a grande
utopie de la paix universelle sera en notre
siècle une r é a l i t é . A l a p é r i o d e des peuples
de proie s u c c è d e celle des peuples soli–
daires; l'industrie, la c ommun e , la science
et l'art font tomber les b a r r i è r e s anciennes
et les p r é j u g é s et rapprochent les nations,
f
Vifs applaudissements. )
Mais dans la grande famille humaine il y a encore
des violents et des impulsifs qui substituent le cou–
teau à l'alphabet. Contre ceux-là, i l faut se défendre,
et défendre les peuples assaillis par un gouvernement
qui a g a r d é les instincts ataviques de la criminalité
politique et qui menace l'œuvre tranquille de la paix et
de la civilisation.
Dans un temps, les gouvernements faisaient des
alliances pour les conquêtes militaires. Aujourd'hui les
peuples se liguent pour la pai.v. Nous devons défendre
l'œuvre de la civilisation contre la férocité musul–
mane. O n fait des ligues pour la défense douanière,
c'est-à-dire pour la protection de la richesse : Pourquoi
ne pas s'unir pour la défense de la vie ? O n institue
des cordons sanitaires contre la peste ? E t nous ne
pourrions nous défendre contre le turc ?
(
Vifs
applau–
dissements).
Nous le pouvons si nous le voulons. Mais i l faut
que tous les peuplss qui vivent de travail s'unissent
contre les alliances particulières des gouvernements
el des oligarchies. Les infamies de la soldatesque tur–
que ne seraient pas possibles si nous étions plus
actifs, plus civilisés et meilleurs.
L e citoyen G . Cassola termine en é v o –
quant les jours pacifiques o ù personne ne
pourra plus verser le sang et quand i l
retourne à sa place, au mi l i e u de longs
applaudissements, i l est vivement félicité
par Anatole F r a n c e .
Le Professeur Formiggini
prononce u n dernier discours au n om de
l'Association universitaire
Cordafratres,
dont le but est d ' é t a b l i r des relations fra–
ternelles entre tous les peuples et q u i doit
donc r é p r o u v e r toute atteinte au droit et à
l ' h u m a n i t é .
Qu'il me soit permis, au nom d'une association sans
caractère politique, de flétrir, cette vieille et impudique
courtisane, la diplomatie.
L e Professeur Sergi donne alors lecture
de Tordre du j o u r q u i est a p p r o u v é à l'una–
n i m i t é . Un e addition contre la tyrannie
russe est p r o p o s é e par le ciloyen Michèle
B i a n c h i , par ordre de l ' Un i o n socialiste
romaine.
L e professeur S e r g i fait observer que ce
serait sortir de l'objet propre à la r é u n i o n
et qu'une autre r é u n i o n pou r r a ê t r e tenue
pour protester contre l'autocratie russe.
A m i d i , cette magnifique manifestation
est t e r m i n é e . E t l e altesle que le mouve–
ment en faveur des populations o p p r i m é e s
d'Orient rencontre dans toutes les c a p i –
tales d'Europe des a d h é s i o n s nombreuses,
réfléchies et enihousiastes pa rmi les h om –
mes de tous les partis".
P . A .
R A P P O R T
DE
N I P I RGUERD
(
VILAVET DE DIARBÉKIR)
Le bourg de Nipirguerd se trouve au nord-
est de Diarbékir, à une distance de 1G heures ;
il renf» rtne 2,500 habitants, dont 700 musul–
mans, 1,500 A rmé n i e n s et H00 chrétiens chal-
déens et syriens. L a partie septentrionale de
Nipirguerd est montagneuse; i l y a là envi–
ron vingt villages, qui se divisent en deux
parties principales, Narik et Mifcour. P l u s l o i n
s'étend la circonscription de la tribu de B a d i -
kan, les districts de Kh i a n et Kh o u l m i , qu i
d é p e n d e n t du k a ï m a k a m a t d e Passour, et que
la rivière de Kliitchalik s é p a r e du district de
Nipirguerd. A l'est, à l'ouest et au sud de N i -
pirguerd s'étendent des plaines fertiles où se
trouvent dispersés de nombreux villages,dont
cinquante sont habités par des A r mé n i e n s et
trente autres environ par des Kurdes. Le
principal district kurde se trouve à l'est et
forme la circonscription de la tribu de
Chekhdodan dont les frontières s'élendeut
jusqu'au fleuve Bathman, au delà duquel se
trouve le Ka ïma k a i n a t d ' A i t c hm .
L a population totale du district de N i p i r –
guerd — en dehors du bourg — est de plus
de 25,000 âme s , dont 12,000 Kurdes et 13,000
A rmé n i e n s . L'agriculture est l'unique occu–
pation de tout ce monde. Au sud-est de N i –
pirguerd se trouve la plaine de Bichirik qui
renferme environ quatre-vingts villages,
dont la plus grande partie est habitée par
des A rmé n i e n s . Le k a ï ma k a i n a t de Nipir–
guerd d é p e n d directement du gouvernement
de Diarbékir et i l n'y a pas de mutéssarifat
comme i n t e rmé d i a i r e .
Dans le village de Hazro de Nipirguerd
habitent trois aghas kurdes célèb; es, Bachid,
Sadoun et Sadik. H y a aussi trois beys, S u -
bine, B a d i i et Khadi, de la même famille
C i s aghas ou beys ont une grande m -
Fonds A.R.A.M