Une trentaine de maisons et de dépôts de
blé ont été livrés aux flammes.
—
Dans le village
Gradevo,
des massacres
et des viols ont été é g a l eme n t commis. Deux
femmes, une mère et sa fille, après avoir subi
tes derniers outrages, furent assassinées,
mutilées et suspendues à la porte de leur
maison.
—
Les ,villages
Klissoura
et
Logodache
ne
furent pas non plus é p a r g n é s . Les soldats y
ont répété les môme s crimes que dans les
villages que je vous ai cités plus haut. Une
vingtaine de villageois sont en danger de
mort à la suite des tortures qu'ils ont subies.
Plusieurs enfants furent aussi soumis à la
torture. Deux d'entre eux, Despod et Sofia
Anghelcovi, eurent les oreilles coupées. Le
nombre des femmes violées dépasse une d i –
zaine.
J'apprends qu'une centaine de villageois
de Lagodache et de Klissoura ont déjà réussi
à passer la frontière, a p r è s des peines
inouïes. D'autres, qui sont actuellement dans
les forêts, se p r é p a r e n t à les imiter.
—
Dans la ville même de
Djoumuïa,
les
soldats ne se g ê n e n t pas davantage ; ils p i l –
lent les maisons et b â t o n n e n t les c h r é t i e n s .
U n c omme r ç a n t , Stavro, eut la joue fendue
par un coup de sabre que lui donna un sol–
dat auquel i l avait refusé de donner de l'ar–
gent. Un autre c omme r ç a n t , Dinkata, fut
horriblement b â t o n n é é g a l eme n t par un sol–
dat qui n'avait pn obtenir de lui des mar–
chandises.
—
Un nouveau combat fut livré le 3 dé–
cembre entre les villages
Padèje
et
Troscovo.
Une centaine de villageois voulant passer la
frontière pour se réfugier en Bulgarie furent
a t t a q u é s entre ces deux villages par des sol–
dats turcs. Le combat dura toute la j o u r n é e
et i l a été meurtrier. Vingt-huit soldats
furent tués ou blesses. J'ignore à combien
se montent les victimes d o n n é e s par les
chrétiens.
Demir-Khissar,
le 29 novembre.
—
Un com–
bat vient d'être livré près du village
Chou-
govo,
entre une bande révolutionnaire et des
soldats turcs au nombre de 400.
Le combat qui avait c omme n c é l'après-
midi du 24 courant, dura j u s q u ' à la nuit. Les
Turcs avaient c h a r g é deux fois les insurgés
mais sans succès. Le soir ceux-ci a t t a q u è r e n t
l'ennemi, forcèrent les rangs et disparurent.
Les insurgés n'eurent qu'un des leurs blessé,
tandis que les pertes des Turcs sont considé–
rables.
—
Quatre combats ont été livrés cette se–
maine sur la montagne
Kresna.
—
Les bandes révolutionnaires ne sont
pas encore dispersées ma l g r é les mesures r i –
goureuses du gouvernement.
Guevgheli, le 3 décembre.
—
Les corps de
poursuite soumettent la population c h r é –
tienne des villages à des tortures atroces,
b à t o n n a n t les hommes et les emprisonnant,
violant les femmes et les enfants, pillant les
maisons.
Plus d'une vingtaine de chrétiens ont été
tués ces jours-ci dans notre arrondissement.
La police ne s'est pas même d o n n é la peine
d'établir l'identité des assassinés. Le dernier
assassinat que je connaisse a été commis
avant-hier sur la personne d'un notable de
notre ville, Pantché Tchetcoff. Il a été tué par
le fils du chef du Comité musulman, Tourkhan
Agha, secondé par un autre agent. Les assas–
sins, api'ès avoir commis le crime, sont ren–
trés tranquillement chez eux sans être i n –
quiétés par la police, ma l g r é la plainte
formulée contre eux parla famille de P a n t c h é
Tchetcoff.
•
Ces assassinats, laissés toujours impunis
par le gouvernement, qui en c o n n a î t parfai–
tement les auteurs, ont servi à terroriser la
population c h r é t i e n n e jusqu'au point que
personne n'ose sortir de la ville, que les vil–
lageois n'osent pas venir au ma r c h é ; et le
commerce c h ôme .
Kavadartzi, le 8 décembre.
—
Les assassi–
nats continuent, toujours aussi atroces et
aussi nombreux. Depuis la d e r n i è r e que je
vous ai écrite, plus de douze assassinats ont
été commis. Je vous en donnerai la liste
quand j'aurai les noms des victimes.
Les viols ne sont pas moins nombreux. Ils
sont commis avec une (•ruante barbare par
les gendarmes, par les soldats, parles parti–
culiers. Je ne vous en donnerai qu'un exem–
ple. 11 y a trois ou quatre jours, le greffier
du juge de paix de Kavadartzi, Mekhnied
effendi, et le gendre du Khodja Hadji Jussuf
effendi, a c c omp a g n é s d'une nombreuse suite,
p é n é t r a i e n t la nuit dans les maisons c h r é –
tiennes du village
Negolino,
et, braquant
leurs armes sur les villageois qui dormaient
découvraient les femmes et les jeunes filles,
cherchant la plus jolie c h r é t i e n n e . A minuit,
ils trouvèrent leur proie dans la personne de
la belle femme de Guero Bagouchkata. Alors
ils a t t a c h è r e n t celui-ci et devant ses yeux
violèrent sa femme. Guero a pris déjà la
montagne et cherche à tirer vengeance.
Mekhomga, le 4 décembre.
—
Les atrocités
commises par les soldats et les bachibozouks
sur la population paisible, loin de diminuer
depuis la retraita des bandes révolutionnai–
res, sont devenues plus horribles encore.
Sûres de l'impunité, les troupes turques ne
mettent plus de frein à leurs instincts sau–
vages. Plusieurs villages ont été pillés par
elles, et la plupart des habitants soumis à la
torture. Dans le village
Nedobgrsco,
après
avoir attaché les hommes, capables de résis–
ter, les soldats violèrent devant leurs yeux
leurs femmes et leurs enfants, et quand les
hommes, impuissants d'agir, les priaient et
les suppliaient d'arrêter, les barbares leur
distribuaient des coups de crosse, leur
broyaient les os, les b r û l a i e n t au fer rouge.
La femme du prêtre bulgare qui avait pris
la fuite, dépouillée de ses v ê t eme n t s , fut
soumise à une torture atroce. Elle fut rani–
mée à plusieurs reprises pour être soumise
à de nouveaux supplices. Ils ne la laissèrent
que lorsqu'elle leur parut morte. Quinze
personnes furent ame n é e s par les soldats de
Mekhomya. L'une d'entre elles expira en
route à la suite des tortures qu'elle avait
subies.
Les même s atrocités furent commises
dans la plupart des villages du Bazlog, et
notamment à
Gadlevo, Biélilzu, Bania, Bai-
cheno.
Dans ce dernier village, quelques
vieux fusils ayant é t é saisis, tous tes habi–
tants furent soumis à la torture, et un bon
nombre d'entre eux furent emp r i s o n n é s .
Une quinzaine de villageois de Biélitza sont
aujourd'hui à l'agonie, à la suite des sup–
plices qu i leur furent a p p l i q u é s .
—
Les soldats exigent de chaque village
une q u a n t i t é d é t e rm i n é e de fusils, et quand
les villageois ne peuvent les livrer, des tor–
tures inouïes leur sont a p p l i q u é e s . L a plu–
part des notables de
Jakorouda
ont été obli–
gés de quitter ce village pour se soustraire
aux supplices qui les attendaient, ne pou–
vant livrer les 270 fusils qu'un fort corps de
poursuite était allé demander.
Une centaine de villageois ont déjà réussi
à passer la frontière bulgare pour chercher
asile dans la p r o p r i é t é voisine. Parmi eux,
se trouvent une vingtaine de villageois de
Butchevo
avec leur p r ê t r e en tête.
Slroumitza,
le 9 décembre.
—
L a vie, les
biens, l'honneur du chrétien, tout' est en
proie aux Turcs. Des particuliers, des gen–
darmes, des soldats r é q u i s i t i o n n e n t les v i l –
lages, pillent les maisons, torturent les v i l –
lageois. Bien ne peut les arrêter. Les chefs
de police, loin de poursuivre les criminels,
les encouragent en leur donnant l'exemple.
A i n s i , i l y a trois jours, le commandant des
soldats qui r é s i d e n t dans le village
Novo-
Sélo
entrait, à la tète d'un d é t a c h eme n t de
soldats, dans les maisons de M ara No'icovska
et Ilinca Jancovska et, a p r è s les avoir violées
elles-mêmes, viola leurs jeunes filles Ilinca
et Anna, a p r è s quoi i l les passa aux soldats.
Les malheureuses jeunes filles ont été telle–
ment maltraitées, qu'elles courent le danger
de mort aujourd'hui.
De nouveaux d é t a c h eme n t s d'infanterie ont
été envoyés ces derniers jours dans les v i l –
lages chrétiens pour renforcer les soldats
qui y r é s i d e n t . Le nombre de ceux-ci est
devenu effrayant; au village
Novo-Sélo,
par
exemple, i l y a 750 soldats qui, ne voulant
pas demeurer dans la caserne qui vient
d'être bâtie, sont d i s p e r s é s dans les maisons
c h r é t i e n n e s d'où ils ont chassé les p r o p r i é –
taires. Une femme enceinte, Maria Gachteva,
a été obligée d'accoucher en plein air, sur la
neige, tandis que les soldats faisaient des
orgies dans sa maison. La plupart des femmes
çt des enfants ont été violés par les soldats.
Les notables sont allés porter plainte à
Strumitza contre les soldats, mais le sous-
préfet les a arrêtés au lieu de prendre des
mesures pour mettre terme à leurs souf-
fran ces.
—
Le village
Marlinovo
est déjà désert.
Tous les habitants ont été forcés p a r l e s
soldats de l'abandonner. Environ 500 d'en-
eux se trouvent actuellement dans notre
ville.
—
Dans le village
Monouspilovo
ont été
massaci'és quatre enfants eu bas â g e , par
des soldats qui avaient violé leurs mères.
—
Les habitants du village
Dobilia,
pour
é c h a p p e r aux poursuites, a c h e t è r e n t aux
soldats 20 fusils et les leur livrèrent. Mais
ceux-ci, non contents de la somme versée,
ont soumis les habitants à une bastonnade
terrible.
Fonds A.R.A.M