T RO I S I ÈME A N N É E . —
N'o
5 1 .
L e N u m é r o : France,
40
cent. — E t r ange r :
50
cent.
1 0
D É C E M B R E 1 9 0 2 .
Pro Armenia
R é d a c t e u r en Chef :
Pierre QUI LLARD
Adresser tout
ce qui concerne la Direction
à M. Pierre QUILLARD
Î O , R u e Î S T o l l ê t , l ' a r i s .
A B O N N E M E N T S :
France
8 »
Etranger
Î O »
Paraissant le
i o
et le 25 de chaque mois
C O M I T É D E R É D A C T I O N :
G. Clemenceau, Anatole France, Jean Jaurès
Francis de Pressensé, E. de Roberty
Secrétaire de r é d a c t i o n s
Jean L O N G U E T
A D M I N I S T R A T I O N :
Rue Monsieur-le Prince, 10
P A R I S (6«)
Le samedi, de 11 heures à midi.
A B O N N E M E N T S :
France
8 »
Etranger
I O »
PRO ARMENIA
est en vente:
A l
'
Administration,
10,
r. Monsieur-le-Prince;
Chez
Brasseur,
Galeries de l'OdéOn ;
Boulinier,
19,
boulevard Saint-Michel;
S O M M A I R E
:
La, Quinzaine : L'Argument d u massacre
(
P I E R R E
Q U I L L A R D ) .
Les É m i g r é s d u Caucase ( U N TÉMOIN).
Lettres de Passen et d'Erzeroum. —N o u v e l l e s
d'Orient : E n Macédoine ; L a Presse hamidienne à
Paris; L a Flotte ottomane; Les prisons hamidiennes;
Poursuites criminelles et Mandats d'arrêt (P. Q . ) . —
Les Souffrances d u Peuple arménien et le Devoir de
l'Europe (EDOUARD BERNSTEIN).
Variétés : D i k r a n
Déroyan (Vazken) ("").
LA QUINZAINE
L'Argument duMassacre
Chaque fois que la diplomatie euro–
p é e n n e fait mine de demander au Sultan
l'exécution des traités, on voit r epa r a î t r e
dans les journaux et revues inspirés d i –
rectement ou indirectement par le Palais
«
l'argument du massacre ». D'une part,
les c o mm u n i q u é s h a m i d i e n s fontsavoir
que les troupes r é g u l i è r e s , les bachi-
bouzouks et la population musulmane
se conduisent à l'égard des brigands ar–
mé n i e n s ou ma c é d o n i e n s avec la plus
grande douceur; mais on fait dire,
d'un autre côté, que sur un signe du
khalife, un massacre général des c h r é –
tiens peut être d é c h a î n é en Asie et dans
les vilayets de la Tu r qu i e d'Europe.
Les deux thèses sont contradictoires;
mais H am i d se soucie moins de la lo–
gique que de l'effet produit par de spé–
cieux mensonges sur les âme s naïves
des peuples.
L'argument du massacre a donc re–
paru, au moment de l'insurrection
A la
Société Nouvelle de Librairie,
17,
rue Cujas;
A u
Kiosque 23,
boulevard des Italiens;
117,
boulevard des Capucines;
27,
boulevard Montmartre;
ma c é d o n i e n n e . On l'a vu déve l oppe r
par M . Ernest Judet dans un article de
ce m ê m e
Petit Journal
qu i publiait au–
trefois en son s u p p l éme n t illustré, des
images extraordinaires
r e p r é s e n t a n t
l'attaque d'une mo s q u é e par les A r mé –
n i ens ; on l'a vu r e p a r a î t r e dans des
correspondances spéciales que la
Patrie
se fait adresser t a n t ô t de Vienne, tan–
tôt de Constantinople. Et c'était un
argument remis à neuf : i l y était parlé
du my s t é r i e u x et formidable trésor de
guerre ama s s é en secret par le Sultan.
Dans des journaux discrédités par la
publication trop fréquente de nouvelles
inexactes, cela ne tire pas à c on s é qu e n c e .
Mais une grande revue anglaise, la
Fort-
nightly Review,
sous la signature du
capitaine Gambier qu i possède une con–
naissance précise des choses asiatiques,
reprend à son compte une t héo r i e pres–
que semblable, en insistant, par a i l –
leurs, sur le fait que les gouvernements
d'Europe, par leur conduite atroce en
Ch i ne , ont à p e i n e qua l i t é pourreprocher
à quiconque ce qu'ils ont fait eux-
m ê m e s .
Le Su l t an , selon le capitaine Gam–
bier, est le contraire d ' un prodigue ; i l
est r é e l l eme n t pa r c imon i eux ; i l n'aime
pas payer de soldes n i de pensions; ce–
pendant de vastes sommes d'argent
doivent aller quelque part, m ê m e en
tenant compte des frais é n o r me s d'es–
pionnage et de propagande pan i s l ami -
ques, des fonds con s i dé r ab l e s , r égu l i è r e –
ment p r é v u s pour les besoins de l ' A r -
Chez
Blancard,
à Marseille;
Cohen,
à Montpellier;
Eggimann,
à Genève.
mée, de la flotte et des services civils,
des mi l l i on s et des millions-demeurent
i n emp l oy é s et ne voient jamais la l u –
mi è r e du jour. « On croit g é n é r a l eme n t
que le Sultan empile un trésor de guerre
pour un emploi futur, — imitant
l'exemple de la Russie où tout ce qu i
peut é c h a p p e r aux griffes des fonction–
naires, des nobles r u i n é s et autres,
prend le m ê m e chemi n . »
Voilà pour l'avenir; quant au p r é –
sent, le capitaine Gambier voit u n exem–
ple de la crainte i n s p i r é e par Ab d - u l -
H am i d aux puissances e u r o p é e n n e s
dans le rapide d é n o u eme n t de l'expédi–
tion de Mi t y l ène . Il tient pour très pro–
bable qu ' un massacre de F r a n ç a i s en
Syrie et en Palestine se serait produit
au premier acte d'hostilité ouverte de
la France et qu'une insurrection à
T u n i s et à Alger, où la domi na t i on
française est détestée par les i nd i g è n e s ,
aurait engagé la France dans une guerre
c oû t e u s e et sanglante.
Il ne pa r a î t pas cependant que l'opi–
nion du capitaine Gambier soit justifiée,
ni pour le p r é s en t ou le passé, n i pour
l'avenir. Sans doute
Ab d - u l - Ham i d
rêve d'être le chef effectif de tout
l ' I s l am; mais i l s'en faut que ses désirs
soient réalisés de si t ô t . N i dans la
Perse schismatique, ni dans l'Inde, n i
au Maroc, ni en Ch i n e , ni m ê m e en
Algérie ou à T u n i s son a u t o r i t é de
Khalife ne fait aucun p r og r è s et elle est
nulle en Arabie et p a r t i c u l i è r eme n t
dans la région sacrée autour de la Mec-
Fonds A.R.A.M