Ce n'est qu'après cette formalité que l'élec–
tion définitive peut avoir lieu.
A u
B É Z E S T I N .
—
Dans une partie du
grand bazar de S t ambou l , au Bézeslin, les
collectionneurs et les touristes avaient
coutume d'acheter des armes anciennes,
niellées, d a m a s q u i n é e s , enrichies d ' i n c r u s –
tations, mais mieux faites pour figurer
dans des panoplies inoffensives que pour
u n usage pratique. Cependant S. M . I.
A b d u l H a m i d a j u g é ce commerce dange–
reux : i l tolère provisoirement la vente des
sabres, yatagans et poignards, mais i l
interdit celle des armes à feu. D'ordre du
ministre de l a police, un délai de huit
jours a élé a c c o r d é aux marchands pour
remettre au m i n i s t è r e toutes celles qu'ils
ont en magasin ; la circulaire d i l : remettre
contre paiement,
mais Arab-Chefik s'en–
tend en affaires et le ma r c h a nd q u i récla–
merait de l u i un seul para risquerait de se
v o i r a u s s i t ô t l o g é , aux frais de l'Etat, dans
la d é l i c i e u s e prison du Or and -Zap t i eh .
C O N D AMN A T I O N E TMISE E N J U G E M E N T . —
D ' a p r è s le rapport du procureur i mp é r i a l
de l a cour d'appel de Constantinople, le
n o mm é A l i k s s a n T c h i l c h é k d j i a n , a c c u s é
comme perturbateur et auteur de p u b l i c a –
tions subversives a é t é j u g é par d é f a u t . L a
cour l'a c o n d a m n é à l a d é t e n t i o n p e r p é –
tuelle dans u n enceinte fortifiée, à la perte
de ses droits civiques et à l a confiscation
de ses biens.
Le P r é s i d e n t de l a cour criminelle de
Constantinople a de nouveau a c c o r d é un
délai de dix jours au n o mm é R é l é t e , ancien
mé d e c i n militaire à l'hôpital de Smy r n e ; i l
est a c c u s é comme c r imi n e l pour sa fuite à
A t h è n e s , o ù i l se livre à des publications
subversives. P a s s é le susdit délai, i l sera
j u g é par défaut, c o n d a m n é à l a p r i v a t i on
de ses droits civiques et à l a confiscation
de ses biens.
P . Q .
L I R E :
D I E I N F O R M A T I O N f
Editeur et Rédacteur :
Josef GRAF
Vienne, Piaristengasse, 26
LIRE :
L'EUROPÉEN
Courrier International Hebdomadaire
POLITIQUE, DROIT INTERNATIONAL
QUESTIONS
SOCIALES,
LITTÉRATURES, A R T .
Direction : V A N D E R V L , U G T (Leyde)
C h . S E I G N O B O S (Paris)
R é d a c t e u r en chef : A . - F E R D I N A N D
H E R O L D .
2 4 ,
r u e D a u p h i n e , P A R I S (vi
c
)
Articles de M M . Frédéric P A S S Y . Francis de P R E S S E N S É
John.-M. ROBERTSON, D ' M . K R O N E N B E R G . A . A U L A R D
Marcel C O L L I È R E , Xavier de R I C A R D , Raoul
A L L I E R ,
A n d r é FONTAINAS, Pierre Q U I L L A R D , Georges E E K H O U D .
Les Souffrances du Peuple Arménien
ET
LE DEVOIR DE L'EUROPE
Conférence publique faite à Berlin
le 26 juin 1902
p a r E d . B E R N S T E I N ,
d é p u t é d uR e i c h s t a g .
(
SUITE)
A ces contributions, à la rigueur suppor–
tables, i l faut encore ajouter
l'impôt sur la
production
agricole,
appelé
Imlhias,
qu i
écrase totalement le paysan. Il doit donner
au percepteur de l'impôt
une partie de tous
les produits qu'il tire du s o l ; d'après la l o i ,
cette redevance ne peut d é p a s s e r l / 8
e
,
mais
en réalité elle s'élève à 20, 40 et même 60 0/0
du produit brut.
Avec un tel s y s t ème d'impôt, le paysan
supporte un poids si colossal qu'il est poussé
au désespoir.
Si encore ces impositions étaient ordon–
nées d'une ma n i è r e à peu près régulière, les
Armé n i e n s les accepteraient avec leur pa–
tience orientale, mais ce n'est pas le cas.
La Turquie est divisée en gouvernements
—
vilayets — chacun a pour chef un Pascha.
Le gouvernement, qui n'a presque jamais
d'argent, ne paye pas le Pascha, celui-ci
veut pourtant, suivant l'ancienne coutume,
mener grand train et accumuler des r i –
chesses.
Que son traitement n'arrive pas, i l presse
ses fonctionnaires avec plus de v é h éme n c e .
Ceux-ci à leur tour pressurent le pauvre
peuple en progression croissante.
Comme cela se pratiquait très souvent en
Europe au XVIII» siècle, le produit des imp ô t s
est
affermé
par mise aux e n c h è r e s , le
fermier
a la gendarmerie à sa disposition.
Vous pouvez juger quelle doit être la si–
tuation du contribuable, si l'on songe que le
fermier veut lui aussi faire une bonne o p é –
ration.
Tous les dix ans les charges ont a u gme n t é ,
écrasant plus lourdement le paysan a r m é –
nien ; mais à l a fin même le plus doux se
révolte quand i l sent qu'on l'étouffé. On ne
peut demander que les hommes soient des
anges dans de telles conditions.
Le port des armes est défendu aux A r mé –
niens. Comme nous l'avons vu, dans le cours
des temps, ils ont donc oubié les vertus des
guerriers, ils ont acquis les habitudes des
esclaves car ils furent et sont encore traités
comme tels.
Mais après cette description nous n'en
n'avons pas encore fini avec les vexations qui
accablent les A rmé n i e n s .
La plus grande partie du pays a rmé n i e n
turc est située sur le penchant des chaînes
de montagnes qui se trouvent à l'ouest de
l'Arafat. Sur les hauteurs de l'est habitent
les Kurdes et plus loin, à l'ouest, les Tcher-
kesses, peuplades de bergers ma h omé t a n s
nomades; ce sont des guerriers redoutables,
ils portent les armes et jamais le gouverne–
ment turc n'a pu les soumettre; ils sont le
fléau des habitants des vallées.
Le Kurde considère le paysan a rmé n i e n
comme la vache à lait, quand ses bestiaux
ont des petits le Kurde ou le Tcherkesses
l'obligent à l u i en donner une partie comme
tribut.
Autrefois, ils observaient encore une cer–
taine mesure, se disant : nous avons besoin
du paysan i l ne faut pas tout l u i prendre.
Mais depuis que la circulation monétaire a
p é n é t r é en Orient, ils ont voulu eux aussi
avoir de l'argent et ils ont cherché à extor–
quer plus du paysan.
Quelquefois les A r mé n i e n s ont pu se pro–
curer des armes, ils ont e n g a g é des combats
sanglants avec leurs oppresseurs, et l'on
s'explique pourquoi i l n'existe pas un grand
amour entre les A rmé n i e n s et ces autres peu–
plades, mais une très vive haine.
Les Kurdes comme les Turcs regardent les
A rmé n i e n s avec mépris, comme une race
inférieure; i l en est de m ê m e des Tcher–
kesses, etc.
A i n s i l'oppression et les charges du peuplé
a rmé n i e n augmentent d ' a n n é e en a n n é e et
le gouvernement de Constantinople eut-il la
sincère volonté de lui venir en aide i l en
serait dans l'impossibilité absolue avec son
s y s t ème gouvernemental actuel.
Mais quel est avant tout le premier titre
d'un gouvernement'? C'est d'avoir la volonté
et la capacité de p r o t é g e r les citoyens contre
les attentats à l a vie et à l a p r o p r i é t é . Un
gouvernement doit abdiquer s'il ne peut
remplir ces obligations*C'est précisément le
cas du gouvernement du sultan. J u s q u ' à
présent i l a été impuissant à défendre les
A rmé n i e n s contre les violences des Kurdes
et dcsTcherkesses, i l n'a
pas réussi
à les pro–
téger contre les exactions et extorsions usu-
raires des Paschas et de leurs fonctionnaires.
Malgré tout le peuple a rmé n i e n , dans son
désespoir, a repris courage, son désir d'in–
d é p e n d a n c e s'est raffermi, i l a créé des
Comités, et, ne voyant plus d'autre moyen, i l
cherche son salut en l u i -même .
Je ne veux pas nier que les révolutionnai–
res a r mé n i e n s n'aient fait usage de l a vio–
lence contre les fonctionnaires ou leurs
créatures. C'est s i humain dans les condi–
tions que nous avons décrites que nous ne
pouvons les blâmer. Il doit en arriver ainsi
quand un peuple est livré à l'arbitraire, que
l'opprimé ne peut plus faire valoir ses droits;
il ne l u i reste plus qu'à recourir au droit
natu-el et à combattre avec toutes les armes
dont i l peut faire usage.
Un peuple est perdu s'il n'emploie pas
tous les moyens pour se sauver de l'extermi–
nation.
Par le traité de Berlin de 1878, l'Europe
s'était e n g a g é e à veiller au maintien des
droits des A rmé n i e n s . De temps en temps
une des puissances signataires donnait quel–
ques calmes avertissements à la Tu r qu i e ;
avertissements qui n'ont jamais rien changé.
La Turquie sait très bien se d é r o b e r aux
avertissements incommodes.
En face de l'Europe elle a la légende que
du côté des nationalités o p p r i mé e s i l s'agit
seulement de quelques troubles suscités par
des agents de l'extérieur, d'autre part elle
enflamme de temps en temps le fanatisme
Fonds A.R.A.M