L E
S U L T A N ET L E S P U I S S A N C E S .
—
L ' a f –
faire dos chemins de Fer orientaux dont i l
a é t é l'ait mention i c i ne semble pas devoir
ê t r e finie de si tôt, bien qu'elle ait d u ê t r e
t r a n c h é e , dans le plus bref délai, selon
l'accord intervenu l'an dernier. Ap r è s des
r e p r é s e n t a t i o n s verbales, le baron d eCa l i c e
a d e m a n d é par une noie au gouvernement
ottoman de d é s i g n e r un nouvel arbitre à
la place d ' Ha s s a n - Fe hmi L â c h a , n o mm é
gouverneur de Sa l on i qu e . U n i r a d é l u i a
ilonné satisfaction en d é s i g n a n t Djellel-
bey, ministre de l'instruction publique,
comme successeur d ' Ha s s a n - F e h i n i et en
ordonnant la r é u n i o n du tribunal arbitral.
Comme aucune dale n'est lixée pour ladite
r é u n i o n , M . Gr o s » , directeur de la So c i é t é
des Ch emi n s de fer orientaux, peut atten–
dre encore, pendant plusieurs mois, l a
d é c i s i o n « urgente » q u ' i l r é c l ame , selon
son droit.
L A P R E S S E U AM I D I E N N E .
—
Les j ou r naux
de langue f r a n ç a i s e de Constantinople
sont parfois s i n g u l i è r e m e n t e m b a r r a s s é s .
Il leur est difficile pa r exemple de ne pas
mentionner le) mouvement diplomatique
où M . de L a Bo u l î n i è r e figure et est n o mm é
à un poste important comme celui du
Ca i r e ; et cependant M . de L a Bo u l i n i ô r e
est l'auteur de la d é p ê c h e c é l è b r e o ù H a m i d
est a c c u s é formellement « d'armer les bras
des a s s ommo i r s ». D'autres fois, pour ê t r e
agi'éables à un fonctionnaire f r a n ç a i s q u i
se passerait de leurs félicitations, i l s sont
o b l i g é s de r e cou r i r aux mensonges. On l i t
alors des informations de ce g o û t :
Nous sommes heureux d'apprendre que le
vice-consulat de France à Andrinople est
érigé en consulat. M . Meyrier, qu i était vire-
consul, est promu au grade de consul de
2
e
classe et conserve le poste.
M . Meyrier est bien connu à Constantino–
ple, où i lfitses premiers d é b u t s comme
commis de chancellerie en 1877. 11 y passa
cinq a n n é e s . Après diverses p é r é g r i n a t i o n s
à Tampico, à la Havane, an Tonkin et à la
Nouvelle-Orléans, i l revint en Orient par So –
phia. Il occupe le poste d'Andrinople depuis
1896.
Il est chevalier de la Légion d'honneur
depuis le 14 juillet 1896.
Ce n'est pas par So p h i a mais pas Diar–
b é k i r que M . Meyrier est revenu en Orient :
il y é t a i t consul en novembre 1805 et avait
d o n n é asile à plusieurs centaines d ' A r m é –
niens, au risque de sa vie. L e sinistre bou–
cher Em i z P a c h a l'aurait s u p p r i m é sans
l'intervention é n e r g i q u e de M . C amb o n q u i
lil savoir au Pa l a i s que l a lêle du vali r é –
pondrait de celle du consul. M
m f i
Meyrier,
pou r son admirable d é v o u e m e n t — elle
avait conduit de D i a r b é k i r à Alexandretle,
emmenant ses quatre petits enfants dont
un à la mamelle, trois cents r é f u g i é s ar–
m é n i e n s , de D i a r b é k i r à Alexandretle,
deux semaines de marche dans un- pays
d é v a s t é et encore p a r c ou r u par les é g o r -
geurs du sultan — a reçu cette a n n é e u n
g r and prix de l ' Ac a d ém i e des sciences
morales.-Les j o u r n a u x f r a n ç a i s de Con s –
lantinoplc ne rappellent pas non plus ce
souvenir.
M A N D A T S D ' A R R Ê T .
—
L a c ou r criminelle
a a c c o r d é à Djétal Ch e v k i , a c c u s é de crime
pour s'être s a u v é à l ' é t r a n g e r dans des
intentions s é d i t i e u s e s , u n nouveau délai de
dix j ou r s pou r se p r é s e n t e r à celte cour.
P a s s é ce délai, i l sera j u g é par d é f a u t ,
ses biens seront c o n f i s q u é s et i l perdra ses
droits civiques.
P- 0 -
L I R E :
L'EUROPÉEN
Courrier International Hebdomadaire
POLITIQUE, DROIT INTERNATIONAL
QUESTIONS
SOCIALES,
LITTÉRATURES, A R T .
Direction : V A N ' D E R V I I ( i l (Leyde)
C h . S E I G N O B O S (Paris)
R é d a c t e u r en chef : A . - F E R D I N A N D
H E R O L D .
2 4 ,
r u e D a u p h i n e , P A R I S (vi')
Articles de M M . Frédéric P A S S Y , Francis de P R E S S E N S É ,
J o h n - M . R O B E R T S O N , D ' M . K R O N E N B E R G , A . A U L A R D ,
Marcel C O L L I È R E , X a v i e r de R I C A R D , Raoul
A L L I E R ,
A n d r é FONTAINAS, Pierre Q U I L L A R D , Georges EEKIIOUD.
Les Souffrances du Peuple Arménien
E T
LE DEVOIR DE L'EUROPE
Conférence publique faite à Berlin
le 26 juin 1902
p a r E d . B E R N S T E I N , d é p u t é d u R e i c h s t a g
Messieurs,
Le peuple dont l'histoire, ou plutôt les
souffrances et les destinées doivent nous
occuper aujourd'hui, selon l'ordre du jour
de cette r é u n i o n , habite très loin de nous à
l'écart des grandes routes du commerce
international, et le temps n'est pas bien loin
encore où relativement peu d'hommes con–
naissaient son existence. Beaucoup moins
de gens encore savaient exactement comment
vivait le peuple a rmé n i e n et à quelles condi–
tions i l parvenait à subsister. S'intéressaient
à son histoire seulement un petit nombre
de g é o g r a p h e s , d'historiens et ceux qui s'oc–
cupent de la civilisation à tous les points
de vue.
Mais peut-être allez-vous me dire : n'avons-
nous pas près de nous des souffrances et des
oppressions de toutes sortes dont nous puis–
sions nous occuper, sans aller chercher très
loin dans les districts perdus de l'Asie-Mineure
el nous intéresser à ce qui s'y passe? C'est que
les p e r s é c u t i o n s et. les cruelles et brutales
violences don t ont élé et son t encore victimes
les A r mé n i e n s ont un c a r a c t è r e si exorbi–
tant, qu'elles exigent la protestation de toutes
les nations civilisées. De temps en temps,
elles ont r emu é la conscience même des
gouvernements r é a c t i o n n a i r e s et les ont
obligés à porter leur attention sur la situa–
tion de ce peuple. E n outre, la destinée et
l'existence des A rmé n i e n s nous intéressent à
différents é g a r d s , bien plus qu'il ne peut le
paraître à beaucoup de nous à p r em i è r e vue.
Le peuple a rmé n i e n se trouve au centre de
cette grosse question qu'on appelle la ques–
tion d'Orient, question qu i de nouveau, un
jour, p r é o c c u p e r a gravement les peuples
civilisés, troublera la paix des nations occi–
dentales, jettera la discorde entre ces nations
et pourra, de ce fait, retarder la marche de
la civilisation.
En dehors de toute considération huma –
nitaire, la destinée du peuple a rmé n i e n doit
nous occuper à d'autres points de vue. L ' E u –
rope, et avec, l'Europe, le peuple allemand a
un
engagement direct
à tenir envers le peuple
a rmé n i e n . Notre gouvernement allemand, de
concert avec d'autres nations de l'Europe,
en juillet 1878, au Congrès de Be r l i n , a p r è s l a
d e r n i è r e guerre russo-turque, a pris des
engagements d é t e rm i n é s au sujet du peuple
a r m é n i e n ; et aujourd'hui les peuples sont
responsables des actes de leurs gouverne–
ments. Principalement quand i l s'agit des
revendications d ' h uma n i t é et de justice et
que les gouvernements ne remplissent pas
les obligations qu'ils ont souscrites, c'est aux
peuples à rappeler é n e r g i q u eme n t ces gou–
vernements à l'acquittement de leur dette.
Les A rmé n i e n s , traqués, o p p r imé s , é c r a s é s ,
comptent uniquement sur le secours qui peut
leur venir d'Europe, dans l'espoir et dans
une attente impatiente, ils observent anxieu–
sement les actes des grandes puissances,
l'attitude des grandes nations qui, aux termes
du traité de Berlin, sont obligées de leur
venir en aide, de les p r o t é g e r contre des
violences qu i n'ont d'autre but que de faire
d i s p a r a î t r e de la terre la nation a r mé n i e n n e .
Vous avez tous connaissance de l a guerre
russo-turque de 1877-78, elle se termina par
la défaite de la Turquie, qu i , a p r è s une éner–
gique résistance fut vaincue, par la puissante
Russie alliée à la Roumanie et à d'autres
peuples slaves. En mars 1878,1a Russie obli–
geait la Turquie à signer le traité de San
Stefano.Ce traité instituait la Russie le défen–
seur ma n d a t é des Armé n i e n s , c'est-à-dire,
si j'ose m'exprimer ainsi, le protecteur
auquel l a Turquie donnait le droit de
veiller aux intérêts des populations c h r é –
tiennes résidant sur son territoire. Sur les
intentions qu i ont a n imé la Russie dans
la revendication de ce droit de protection,,
on pouvait, et on peut avoir des s o u p ç o n s
bien fondés, bien plus, on peut tout d'abord
soulever cette question de savoir, si la Russie
p a r t i c u l i è r eme n t , a le droit de faire des
reproches à d'autres nations, quand elle-
mêinc opprime celles qui lui sont soumises.
On peut le faire principalement aujour–
d'hui, quand nous voyons comment la Russie
agit en Finlande et envers d'autres peuples
avec lesquels elle a des traités inviolables;
comment elle foule aux pieds ces t r a i t é s ;
comment elle écrase ces nationalités, avec
Fonds A.R.A.M