Les procédés employés
        
        
          par M M . Quillard, de Pres–
        
        
          sensé, qui entraine le
        
        
          
            Temps
          
        
        
          après lui, et autres philar-
        
        
          mèncs, sont dignes de la
        
        
          mauvaise cause qu'ils dé–
        
        
          fendent. .
        
        
          M M .
        
        
          Quillard, de Pres–
        
        
          sensé et les autres prota–
        
        
          gonistes de la cause a r m é –
        
        
          nienne feraient bien d'aller
        
        
          une fois en Turquie (va–
        
        
          riante de la
        
        
          
            Post).
          
        
        
          VI
        
        
          Qu'ils se rassurent ce–
        
        
          pendant. Les A r m é n i e n s
        
        
          vivant en Turquie ne cou–
        
        
          rent aucun danger ; ils va-
        
        
          quen 11 ranquillemcn t à leurs
        
        
          affaires, et ne demandent
        
        
          pas mieux qu'on les laisse
        
        
          jouir en paix des richesses
        
        
          et du bien-être qu'ils s'as–
        
        
          surent par leur travail et
        
        
          leur caractère laborieux.
        
        
          C'est là un point sur lequel
        
        
          devraient méditer les agi–
        
        
          tateurs qui, aveuglés par
        
        
          des buts intéressés, veu-
        
        
          ent leur faire jouer u n
        
        
          lôle auquel ils n'aspirent
        
        
          roint.
        
        
          M. Francis de Pressensé
        
        
          avait été secrétaire d'am–
        
        
          bassade à Constantinople.
        
        
          M. Pierre Quillard y a sé–
        
        
          j o u r n é du mois de janvier
        
        
          1893
        
        
          au mois de juillet
        
        
          1896,
        
        
          soit trois ans et demi.
        
        
          VI
        
        
          «
        
        
          Il semble fatal que des
        
        
          populations dont on conti–
        
        
          nuerait à laisser i m p u n é –
        
        
          ment piller les biens et qui
        
        
          ne cesseraient pas de se
        
        
          voir exposées à des atten–
        
        
          tats, à des meurtres trop
        
        
          souvent impunis
        
        
          finissent
        
        
          par se dire que tout vaut
        
        
          mieux que la vie sous le
        
        
          cauchemar
        
        
          d'une
        
        
          héca–
        
        
          tombe ». (Discours
        
        
          de
        
        
          M. Delcassé, ministre des
        
        
          affaires
        
        
          étrangères à la
        
        
          Chambre française, sur la
        
        
          question a r m é n i e n n e , 20
        
        
          janvier 1902.)
        
        
          Au temps où i l était ambassadeur à
        
        
          Constantinople, M. Paul Cambon priait le
        
        
          ministre Hanotaux de « n'ajouter aucune
        
        
          créance aux paroles de Munir-bey. » Ce
        
        
          n'est pas désormais le seul représentant
        
        
          d'Adbul-Hamid à Paris, c'est le ministre
        
        
          des affaires étrangères ottoman, expédi–
        
        
          teur de la circulaire ci-dessus et son maître
        
        
          même, le Sultan, par qui elle a été inspi–
        
        
          rée, qui sont ainsi convaincus de men–
        
        
          songe. Mais la faute est vénielle, après
        
        
          tout, et les hommes d'Etat européens, qui
        
        
          permirent à ce souverain d'égorger trois
        
        
          cent mille de ses sujets les plus pacifiques,
        
        
          ne lui tiendront pas rigueur pour une telle
        
        
          vétille.
        
        
          
            Lettres d'Akhlath et de Moush
          
        
        
          L E T T R E
        
        
          D ' A K H L A T H
        
        
          /
        
        
          O
        
        
          
            Mai
          
        
        
          
            IÇ02.
          
        
        
          Depuis nombre d'années le district d'Akh–
        
        
          lath, privé de ses forces révolutionnaires
        
        
          garde le silence devant ses malheurs et
        
        
          gémit dans ses souffrances infernales. Après
        
        
          le départ du héros Séroope, le gouvernement
        
        
          fît faire des perquisitions au circassien A l i
        
        
          bey, commissaire de police et célèbre par
        
        
          ses cruautés. Celui-ci, a c c omp a g n é d'une
        
        
          foule de soldats, fait subir aux habitants des
        
        
          tortures inouïes ; tuer les gens par des coups
        
        
          de b â t o n , déshonorer, publiquement, devant
        
        
          les soldats et la foule, les femmes et les
        
        
          jeunes filles a rmé n i e n n e s , enlever aux Armé–
        
        
          niens môme leurs couteaux, etc., sont de–
        
        
          venus des faits habituels. Tout cela a laissé
        
        
          une telle impression sur la population
        
        
          d'Akhlath qu'aujourd'hui, les noms d'Ali bey,
        
        
          de soldats et de gouvernement, suffisent
        
        
          pour l'épouvanter. Le peuple, sans doute,
        
        
          désire mettre fin à ce triste état de choses;
        
        
          mais que peut-il faire, puisqu'il est privé de
        
        
          tous les moyens, n'ayant aucune ressource
        
        
          maiérielle et lié par les intrigues du gouver–
        
        
          neur. Il n'y a que l'activité sérieuse et persé–
        
        
          vérante d'une révolution qui puisse mettre
        
        
          fin aux dures conditions de cette vie amè r e .
        
        
          En automne, des cavaliers Hami d i é venant
        
        
          de Boulanik, ont pillé en plein jour le village
        
        
          arménien, Chamiram, d'où ils enlèvent
        
        
          36
        
        
          bœufs, et 31 autres du village Tchirkor.
        
        
          Les paysans a rmé n i e n s avec les femmes et
        
        
          enfants accourent; ils viennent supplier les
        
        
          pillards de leur laisser au moins la moitié
        
        
          de leur bétail ; les Kurdes leur r é p o n d e n t
        
        
          avec ironie : « Où sont vos fédaïs, qu'ils
        
        
          viennent lutter et nous vous les retourne–
        
        
          rons. »
        
        
          Aujourd'hui, on a constaté que ces pillages
        
        
          avait été commis sur les instructions absolues
        
        
          du gouvernement, dans l'intention de s'in–
        
        
          former s'il se trouve des fédaïs, ou si la popu–
        
        
          lation possède des armes pour se défendre.
        
        
          Quand les paysans a r mé n i e n s protestent
        
        
          contre les pillages et d é s i g n e n t les pillards,
        
        
          le gouvernement leur r é p o n d : « Nous ne
        
        
          pouvons pas empocher les brigandages des
        
        
          Hamidiés. »
        
        
          Vo i c i le printemps; le peuple a rmé n i e n les
        
        
          yeux fixés sur l'Europe, attend des secours de
        
        
          sa pitié, car les atrocités, les brigandages,
        
        
          les assassinats et les pillages se renouvellent
        
        
          toujours.
        
        
          Le 24 avril, une bande de Kurdes de
        
        
          Tchikhour arrivent au village de Papchen, à
        
        
          une distance d'une demi-heure de B i t l i s ; ils
        
        
          s'introduisent chez le prêtre Markar, où se
        
        
          trouvait aussi son beau-fils ; ils pillent la
        
        
          maison, ils tombent ensuite sur le p r ê t r e et
        
        
          son beau-fils qu'ils é t e n d e n t par terre à coups
        
        
          de hache et d'épée ; les jeunes filles crient
        
        
          au secours, on les blesse aussi et on les
        
        
          étend par terre; la jeune fille du p r ê t r e , âgée
        
        
          de 7 à 8 ans, épouvantée, arrive à peine à se
        
        
          sauver en criant au secours. Les paysans
        
        
          n'osent même pas sortir, et les brigands
        
        
          s'éloignent, après avoir pillé la maison à leur
        
        
          aise. Le p r ê t r e est agonisant; comme un
        
        
          aliéné i l crie en kurde, « hara, hara » (va-t-en,
        
        
          va-t-en),- et perd ensuite connaissance.
        
        
          Le 2 ma i , une bande de Hamidiés de
        
        
          Hassnan, attaquent les maisons des frères
        
        
          Boghosse et Racho du village de T z a g h g n é ;
        
        
          ils pillent tout le mobilier et le bétail ; les
        
        
          femmes et les jeunes filles commencent à
        
        
          crier et à pleurer, ils les attachent toutes, les
        
        
          enferment dans les maisons et s'éloignent.
        
        
          Ces brigands sont les hommes de Rizakh
        
        
          agha, chef des tribus de Hassnan, qui pillent
        
        
          librement même les villages kurdes, ils
        
        
          assassinent, ils violentent les femmes, et le
        
        
          gouvernement ne veut point les retenir et
        
        
          prendre les devants de leurs atrocités, i l les
        
        
          encourage, au contraire, à commettre ces
        
        
          crimes barbares.
        
        
          Tous les villages d'Akhlath sont remplis de
        
        
          soldats, nous ignorons les intentions du
        
        
          gouvernement. Il est défendu aux paysans
        
        
          a rmé n i e n s de sortir dès qu'il commence à
        
        
          à faire nuit; les routes sont surveillées, les
        
        
          voyageurs et les caravanes sont pillés. Qu i
        
        
          oserait protester, et à qui ?
        
        
          11
        
        
          y a soixante soldats dans le village de
        
        
          Tadvan, principal fort d'Akhlath. Le com–
        
        
          mandant ayant appelé Tharo, chef du village
        
        
          lui fait des menaces et dit : « Amenez-moi
        
        
          une femme ou je détruis votre village ». Dans
        
        
          la nuit du 3 mai, ce commandant avec quel–
        
        
          ques soldats attaque la maison de la veuve
        
        
          Achad (Achad était un fédaï, qui fut brûlé
        
        
          dans un fenil avec Simon), sous prétexte d'y
        
        
          trouver des fédaïs. L a veuve, affolée, perd
        
        
          connaissance; son domestique parvient à se
        
        
          sauver par la lucarne et en informer quel–
        
        
          ques jeunes gens ; on réussit à sauver la
        
        
          veuve d'Achad en la tirant dehors par une
        
        
          cordé. Le lendemain matin le commandant
        
        
          soumet les paysans à l'interrogatoire : « Pour–
        
        
          quoi avez- vous quitté vos maisons contre nos
        
        
          ordres », leur d i t - i l et se précipite avec son
        
        
          épée sur un a rmé n i e n Boghosse, qu'on arrive
        
        
          à peine à sauver.
        
        
          A Bitlis, quelques soldats, déguisés en
        
        
          fédaïs, se cachent dans une vallée, près d e l à
        
        
          ville ; par l'intermédiaire d'un mouchard,
        
        
          n omm é Migho, i l font venir du quartier Aver-
        
        
          méïdan, Kotché, S é r o o p e et quelques autres
        
        
          jeunes gens, qui les saluent de loin avec joie
        
        
          s'approchent croyant que ce sont de vrais
        
        
          fédaïs. Mais, aussitôt, ils s'aperçoivent de
        
        
          la réalité et veulent s'enfuir ; les soldats les
        
        
          environnent, les a r r ê t e n t et les conduisent
        
        
          en prison.
        
        
          Voilà la situation générale à Akhlath,
        
        
          voilà les jeux du gouvernement; dans une
        
        
          telle situation intolérable, nous sommes
        
        
          vraiment emb a r r a s s é s et surtout uniquement
        
        
          parce que nous sommes privés des moyens
        
        
          pour lutter, la mort seule est notre part....
        
        
          Que les cœu r s sensibles sur qui pèse la
        
        
          responsabilité de votre sang, ne nous laissent
        
        
          pas mourir d é s h o n o r é s et sans vengeance.
        
        
          L E T T R E D E M O U S H
        
        
          Chers Camarades,
        
        
          Ma plume est impuissante pour vous d é –
        
        
          crire en détails notre situation lamentable ;
        
        
          les mots me manquent
        
        
          La population est
        
        
          dans une extrême misère ; c o n d amn é e à tra–
        
        
          vailler toute la j o u r n é e sous le soleil b r û l a n t
        
        
          et à verser sa sueur, elle n'arrive pas à se
        
        
          procurer le pain quotidien ; soumise à la bar–
        
        
          barie des Turcs et des Kurdes, l'existence lui
        
        
          est devenue intolérable. Le gouvernement
        
        
          turc a pris maintenant toutes les mesures en
        
        
          mains pour a n é a n t i r c omp l è t eme n t les v i l -
        
        
          lapes a rmé n i e n s des environs de Moush et
        
        
          Sassoum pour faire place aux Turcs fanati–
        
        
          ques, aux Kurdes barbares et sauvages, aux
        
        
          Circassiens sanguinaires et brigands.
        
        
          Dans le but d'exécuter le plan du gouver–
        
        
          nement turc, plus de trois mille émi g r é s cir–
        
        
          cassiens, ayant toutes les instructions con–
        
        
          venables, occupent la plaine de Moush et les
        
        
          villages environnants ; ils attendent le mas–
        
        
          sacre de Sassoun, pour aller s'emparer
        
        
          des beaux villages a r mé n i e n s situés sur la
        
        
          chaîne des montagnes de Sassoun ; comme
        
        
          déjà, i l y a une dizaine d ' a n n é e s , ils sont
        
        
          venus s'étalflir par force dans les villages
        
        
          a rmé n i e n s de Varto et Kh a n t r è s , situés à
        
        
          l'est d e l à plaine de Moush, après avoir détruit
        
        
          quelques milliers de maisons.
        
        
          D'un autre côté sont arrivés ici, ces jours-ci,
        
        
          Fonds A.R.A.M