chrétiens, tapent sur leurs armes et mena–
cent les boutiquiers : < Vois-tu, Ghiaour, une
tète dans une minute. Et le massacre ne sera
pas long à attendre. Prépare-toi pour l'autre
monde. » En attendant, ils emportent tout
ce dont ils ont besoin, et personne ne pense
leur résister. Quant aux autorités, je ne vous
le répéterai jamais assez, elles excitent tous
les instincts sauvages de la populace turque,
soit en laissant impunis les actes criminels
dirigés contre les c h r é t i e n s , soit en armant
les hommes, ou en les fanatisant par les
softas qui p r ê c h e n t la guerre religieuse.
Ceux des habitants de notre ville qui ont
les moyens, quittent Okhrida pour s'établir
en Bulgarie, à Salonique ou à Monastir. Les
autres attendent avec angoisse le d é c h a î n e –
ment des passions.
Dibré.
—
Les habitants de
Galitchnik,
un
des plus grands villages de notre arrondis–
sement, ont reçu de nombreuses lettres des
bandits qui les ont imp o s é s pour l'année
courante. Dan Datz réclame 800 L . T., Imer
Péra, 100 L . T. (il a enlevé un enfant pour
se faire payer) ; mais le plus exigeant est
Tahir Tola qui envoya la lettre suivante aux
notables :
«
A U X NO T A B L E S DE
G A L I T C H N I K ,
«
Je vous salue tous. Vous me devez, par
«
traite, la somme de 1000 L . T. C'est pour
«
cela que je viens vous la réclamer avec la
«
p r é s e n t e lettre. Vous aurez soin de venir
«
me trouver et apporter la somme, sans
«
grand tapage, n i bruit. Dans le cas con-
«
traire, je vous préviens que vous vous en
«
repentirez ; vous savez bien qui je suis. O,
«
Galitchanais, si vous ne me remettez pas
«
l'argent, que deviendront vos 50,000 brebis
«
et vos 2,000 bestiaux? Comment oseriez-
«
vous vous aventurer hors du village ? Car,
«
si je ne puis vous prendre, ne pourrais-je
«
pas vous tuer? Est-ce que, par hasard,
«
vous auriez confiance en vos gardiens ?
«
Peut-être espérez-vous que les beys et
«
les aghas vous p r o t é g e r o n t ? Je m'en mo -
«
que, moi, des beys et des aghas. N'oubliez
«
donc pas que vous devez venir me trouver,
«
soit dans le bois, soit dans ma tour, pour
«
régler la question. Ne croyez pas que vous
«
m ' é c h a p p e r e z , je saurai vous découvrir ».
(
Suit le cachet de Tahir Tola.)
Les habitants de Galitchnik ont certaine–
ment refusé de payer ces sommes é n o r me s ,
et ils prièrent Tah i r Tola de r é d u i r e son
i mp ô t à 250 L . T. Offensé, Tahir arma ses
hommes et, avec une centaine de brigands,
cerna le village Galitchnik. Les autorités, qui
étaient p r é v e n u e s , ne firent rien pour venir
en aide aux villageois, et ces derniers durent
seuls repousser les brigands. Tah i r se retira,
mais i l revint b i e n t ô t avec 150 brigands, et
cerna de nouveau le village. 11 est encore
cerné.
V I L A Y E T DE Cossovo. —
Radoviche.
—
U n
corps de poursuite entra, ces derniers jours,
dans le village
Podreche,
où i l se livra à ses
agissements habituels. Ap r è s avoir bien
ma n g é et bu, les gendarmes c omme n c è r e n t
les perquisitions. Dans la maison d'un chré–
tien ils trouvèrent un vieux fusil hors d'état
de servir que le p r o p r i é t a i r e jugeait inutile
de cacher. Les soldats le t r o u v è r e n t très
dangereux chez un chrétien. Ils ligottèrent
le malheureux paysan et le b â t o n n è r e n t jus–
qu'au sang afin qu'il livrât d'autres fusils.
On fit la même chose avec tous les hommes
âgés de plus de dix-huit ans ; seize en sont
encore malades et quatre furent emp r i s o n n é s
à Uskub. Toutes les maisons furent pillées.
On ne put rien trouver.
—
Deux jours plus tard, furent tués par la
bande du comité musulman les deux frères
Donu et Anton Traïcovi, du m ê m e village
Podreche,
lorsqu'ils travaillaient dans leurs
champs.
V I L A Y E T D ' A N D R I N O P L E .
—
L a persécution
contre les chrétiens est aussi grande dans le
vilayet d'Andrinople que dans ceux de la
Macédoine. Le brigandage, quoique moins
é t e n d u que dans les vilayets de Monastir et
de Cossovo par exemple, décime plusieurs
arrondissements. L'arrogance des Turcs est
grande, les assassinats et les viols sont nom–
breux, mais le mal le plus grand pour cette
province est le gouverneur g é n é r a l A r i f
pacha, avec son s y s t ème de d é p o r t a t i o n s et
de répression en g é n é r a l .
Il est naturel et l é g i t i me que les paysans
e x a s p é r é s par u n constant martyre prennent
la montagne, se r é u n i s s e n t en bandes et
opposent la force à l a force.
A u x portes m ê m e de Mona s t i r , dans la
seconde semaine d ' a o û t , une rencontre a
eu lieu' entre des « brigands m a c é d o n i e n s »
et la gendarmerie turque. Le s brigands,
r e t r a n c h é s dans une ma i s on p a r t i c u l i è r e ,
se sont é c h a p p é s a p r è s avoir t u é quatorze
gendarmes. L e 7 a o û t , à Gr a d s k o , une
bataille qu i a d u r é c i n q heures s'est livrée
entre la colonne d u lieutenant de r é s e r v e
Stoyanof et u n bataillon de r é g u l i e r s turcs
c o mm a n d é s par Ma hmo u d N é d i m bey. De
quatre heures du soir à d i x heures et demie
le combat se poursuivit, m a l g r é l a n u i t ; à
ce moment a r r i v è r e n t de Vé l è s , p a r c h em i n
de fer, deux autres bataillons turcs q u i
c e r n è r e n t les i n s u r g é s . C e u x - c i , avec des
bombes de dynamite r omp i r en t le co r don
de troupe et se d i s p e r s è r e n t vers K o u m a -
novo et P i r l é p é , laissant 7 morts et
emmenant 13 b l e s s é s , dont le chef Stoya–
nof. L e nombre des morts turcs est
i n c onnu ; quarante soldats b l e s s é s sont
s o i g n é s dans les hospices de V é l è s .
Cependant les a u t o r i t é s turques font
afficher, dans toutes les villes, des p r o c l a –
mations mirifiques : on demande à la
population bulgare, au n om du Su l t an ,
de demeurer t r a nqu i l l e et d'avoir confiance
dans l a bonne v o l o n t é d u m a î t r e . Ce l u i - c i
veut é g a l e m e n t le bien de ses sujets sans
distinction de n a t i o n a l i t é n i de confession
religieuse. L a popu l a t i on c h r é t i e n n e doit
donc d é p o s e r les armes pour gagner à u n
d e g r é encore plus haut l ' amou r de son
souverain q u i a d o n n é à tous ses fonction–
naires l'ordre de l a traiter avec bienveil–
lance et j u s t i c e .
Ce u x cjui auraient la n a ï v e t é de croire
aux promesses i mp é r i a l e s n'ont q u ' à se
rappeler l'affaire de Gu e l l i e h Gu z a n , en
1894.
L à aussi Z é k h i - P a c h a avait promis
l'amnistie aux A r m é n i e n s q u i s ' é t a i e n t
r é f u g i é s dans la montagne : i l fit c o n g r u -
ment massacrer tous ceux q u i se fièrent à sa
parole, des vieillards, des femmes et des
enfants, deux cents e nv i r on d'un seul coup.
E N V I E I L L E S E R R I E .
—
Il en est en V i e i l l e
Serbie comme en Ma c é d o i n e : au c om–
mencement d u mo i s , deux cents A l b a n a i s
ont envahi l'église de R a m l u g , b r i s é l ' i c o –
nostase, e m p o r t é les objets de valeur.
D'autres ont fait de m ê m e à S c h i p a s c lmi z a .
A P r i z r e n d , I b r a h im Ru s t em, avec trois
cents hommes, s'est i n s t a l l é dans des ma i –
sons c h r é t i e n n e s et s'y fait n o u r r i r par les
habitants ; les a u t o r i t é s ottomanes n ' y
voient a u c un i n c o n v é n i e n t .
Que si les o p p r i m é s se vou l a i en t p l a i nd r e ,
les gens d'Ipek et, à leur t ê t e R i z a - b e y ,
offrent au Su l t a n de d é c l a r e r l a guerre à l a
Serbie ; ils se chargent, disent-ils, de tous
les frais, frais d'hommes et frais d'argent.
A u reste ils sont p r ê t s à se r é v o l t e r et à
demander l a s u z e r a i n e t é de l ' Au t r i c h e , si
à Constantinople, on n'agit pas dans le
sens i n d i q u é par leur t é l é g r a mm e plein de
loyalisme et de s oumi s s i on .
¥ *
G R È V E S D E F ON C T I ONNA I R E S E T R E F U S D E
L'IMPÔT.
—
P é r i o d i q u e m e n t les ouvriers de
l'Arsenal de K a s s i m P a c h a ,
ouvriers
d é p e n d a n t d u m i n i s t è r e de l a marine et
soumis à l'inscription ma r i t ime , se rebellent
faute d ' ê t r e p a y é s . L ' a n dernier, l a s é d i t i o n
fut assez grave pou r que H a m i d d é l é g u â t
un de ses aides de camp q u i traita d'un
arrangement. Cette a n n é e les officiers se
sont joints à leurs hommes ; n é g o c i a t i o n s ,
transaction : une partie des a r r i é r é s fut
p a y é aux m é c o n t e n t s . P u i s , qu a nd tout fut
r e n t r é p r ov i s o i r emen t dans l'ordre, v i ng t
des officiers protestataires furent a r r ê t é s
et e x p é d i é s en exil. C'est ainsi q u ' i l sied de
compter sur la c l éme n c e i mp é r i a l e et le
respect de l a parole d o n n é e .
A Rassora, g r è v e des e m p l o y é s c i v i l s et
des officiers q u i ont cessé de p a r a î t r e en
ville r e v ê t u s de leur uniforme.
A P r i z r e n d , g r è v e de contribuables : les
Tu r c s de l a ville avaient d e m a n d é à
H am i d - P a c h a d'assurer la t r a n q u i l l i t é de l a
ville et de destituer les fonctionnaires trop
ouvertement p r é v a r i c a t e u r s .
H a m i d - P a –
cha ayant pris c o n g é , un c om i t é do vingt-
quatre personnes s'est f o rmé pou r d é f e n d r e
les i n t é r ê t s mu n i c i p a u x : i l songerait à
s'emparer de l'administration des postes et
Fonds A.R.A.M