turque, mais nous ne savons pas non plus ce
qui nous attend des nouveaux renforts que
le gouvernement vient d'expédier pour S trou-
mitza.
Gorna Djoumaïa.
—
U n iradé qui accor–
dait l'amnistie à tous ceux qu i avaient pris
part aux affaires révolutionnaires, fut affiché
il y a quelques semaines dans les établisse–
ments publics de notre arrondissement.
Quelques prisonniers furent relâchés et ordre
fut d o n n é aux kodjabachis d'annoncer que
les chrétiens qui avaient q u i t t é le pays pour
é c h a p p e r aux poursuites pourraient rentrer
librement chez eux. Mais ces iradés ainsi que
toutes les promesses du gouvernement turc
sont bien connus par les Macédoniens, qui
en ont souffert plus que de la persécution
ouverte. Et par bonheur personne ne s'y
prêta cette fois encore. Non seulement les
émi g r é s ne r e n t r è r e n t pas, mais même la
plupart des relâchés q u i t t è r e n t le pays mal–
gré la surveillance sous laquelle ils étaient
placés. Et ils ne se sont pas t r omp é s dans
leurs a p p r é h e n s i o n s .
Depuis quelques jours le gouvernement
cherche activement les personnes libérées à
la suite de l'amnistie, pour les faire rentrer
à la prison. Il a pu a r r ê t e r Bogdan du village
Boulchine,
qui était accusé d'avoir c omma n d é
une bande révolutionnaire. Mais les autres
amn i s t i é s et cherchés de nouveau ne furent
pas retrouvés. Parmi eux, je vous cite Anghel
du village
Mezoda,
le prêtre Ilia et Kypreto
du village
Metchkôul.
Le brigadier K e l - A l i
est e n t r é à la tête d'une dizaine de soldats
dans le village Souchitza, où i l fustigea tous
lss habitants. Le notable Gheorghi fut le
plus torturé.
V I L A Y E T D E MONA S T I R .
—
Dans les p r i –
sons de Mona s t i r , des centaines de d é t e n u s
pour des crimes politiques que l a police a
f o r g é s de toutes p i è c e s ; dans les mon –
tagnes des bandes r é v o l u t i o n n a i r e s de plus
en plus nombreuses; dans les villages, des
soldats q u i terrorisent l a popu l a t i on et
e n l è v e n t la d e r n i è r e b o u c h é e de pain des
malheureux villageois ; sur les grands che–
mins, des bandes o r g a n i s é e s par des
c om i t é s mu s u lma n s pou r l'extermination
des c h r é t i e n s . Voilà la situation g é n é r a l e
du vilayet de Monastir. Quant aux faits les
plus r é c e n t s , voici quelques-unes de nos
correspondances :
Monaslir.
—
Je vous ai écrit, i l y a presque
trois mois, sur l'affaire
VEkchi-Sou :
une
horde de bachibozouks et de soldats avait
cerné le village Ekchi-Soti, croyant qu'une
bande s'y était réfugiée. Après une perquisi–
tion minutieuse, comme rien n'y fut trouvé,
une vingtaine de villageois furent arrêtés et
t o r t u r é s d'une ma n i è r e atroce. Tous ces
d é t e n u s restent encore en prison. Il y a à
peine deux jours que l'acte d'accusation leur
fut signifié.
—
H y a quelques jours, le sous-préfet de
Florina envoya à Eckhi-Sou quatre gen–
darmes avec ordre d'arrêter le notable Stefan
Tchekoff et ses deux fils, Vassil et Ilia.
—
Le 18 j u i n , une bande révolutionnaire
fut trouvée dans les vignobles entre
Palélé
et
SorovUchevo
par le g a r d e - c h amp ê t r e de
Patélé qu i en tua la sentinelle, s'échappa et
avertit les autorités. Deux cents soldats
furent expédiés à la poursuite de la bande.
Elle fut cernée par les troupes près du village
de Sorovitchevo. L'endroit é t a n t découvert
de tout côté, la bande, qui était c omp o s é e
de dix révolutionnaires, chercha d'abord à
se retirer. Mais elle fut obligée de livrer une
bataille dont le résultat fut : 20 soldats de
tués d'un côté et un r é v o l u t i o n n a i r e de
l'autre.
C'était l'habitant de Ek c h i - So u , Krysto
Banitchenetz, q u i , l'année p a s s é e , é t a n t
arrêté, s'échappa des mains des gendarmes
qui le gardaient dans le Palais de Justice
même . Il avait pris part à de nombreux
combats et était blessé à plusieurs reprises
par les Turcs.
Quand la bande s'échappa des mains des
soldats, ces derniers, pour se venger, se
j e t è r e n t sur les villages voisins et emprison–
n è r e n t 70 villageois de Patélé et 150 de
Ekchi-Sou. Les tortures que les arrêtés
eurent à subir sont affreuses. Quatre per–
sonnes en expirèrent pendant le transport
pour Monastir.
Avec ces nouveaux d é t e n u s les prisons de
Monastir renferment plusieurs centaines de
chrétiens. Quelque deux cents attendent
depuis depuis plus de trois mois que l'acte
d'accusation leur soit signifié.
Florina-
—
Dans ma d e r n i è r e lettre je vous
avais dit que tous les hommes â g é s de dix-
huit à soixante ans, du village
Tyrsié
sont
arrêtés à la suite du combat qui y fut livré
entre une bande révolutionnaire et les sol–
dats. Leur nombre est de 120. Le reste des
habitants : les vieillards et les femmes, allè–
rent à Monastir porter plainte devant le
Gouverneur général, mais i l ne leur fut pas
permis de faire des d éma r c h e s .
Dans les villages Armensco et Bo u k h , des
d é t a c h eme n t s de soldats o p è r e n t des per–
quisitions et appliquent des tortures atroces
afin que les armes leur soient livrées. De
même dans les autres villages de notre arron–
dissement. On est parvenu, grâce à ces tor–
tures, à saisir : dans le village
Patélé,
45
fu–
sils; à
Pelyrsco,
5;
à
Zelénitché,
1:
à
Zago-
ritchani,
1.
—
Lazo Bitzano, du village Zelénitché, fut
soumis à la torture. On exige qu'il livre
quarante fusils, et en attendant dix soldats
demeurent chez l u i .
—
Naki Boutzeff est mort à Zsgoritchani,
à la suite des blessures qu'il a subies.
Koussy Doné et A l c x i Ivanoff, du village
Sorovitchevo, sont tellement t o r t u r é s , qu'on
a dû les transporter en voiture jusqu'aux
portes de la prison.
—
Kotzé lvantchoff, de Florina, fut aussi
arrêté. Il fut soumis à la torture puis violé
parles soldats, de même que tous les jeunes
prisonniers.
L a population turque de Florina ne parle
que de massacrer les c h r é t i e n s .
Kitchevo.
—
L a vengeance des Turcs qui
ne sont pas satisfaits dans leurs caprices par
les chrétiens, est terrible. Des familles en–
tières sont d é t r u i t e s pour une peau de mou–
ton. Voilà le dernier cas de vengeance que
je viens d'apprendre :
Govré Marcoff, du village
Midimlzi,
ayant
refusé de l'argent à Sali-Agha du village
Zajas,
celui-ci tua, i l y a quatre mois, son
p è i e . Sali-Agha envoya après un de ses
hommes chez Govré, qui le conseilla d'aller
voir Sali-Agha, s'il ne veut pas qu'il soit
plus s é v è r eme n t puni. Govré refusa. Il y a
deux jours, Sali-Agha mit le feu à la maison
de Govré et la cerna avec ses hommes. Le
malheureux chrétien n ' é t a n t pas dans la
maison, voulut y entrer pour sauver sa
femme et ses enfants. Mais i l fut blessé par
Sali-Agha et emp ê c h é d'y entrer. L a femme
de Govré, sa belle-sœur et ses deux enfants
t r o u v è r e n t la mort dans cet incendie.
—
L e 23 j u i n , un Tcherkesse du village
Novo-Solo d é n o n ç a au sous-préfet de K i t –
chevo, comme é t a n t des révolutionnaires,
25
personnes du village Rakitnitza. U n corps
de poursuite fut organisé, et notre sous-
préfet se mit à sa tête. En route i l entraîna
avec l u i les bachibozouks de quatre villages
turcs, et toute la horde tomba sur le village
Rakitnitza. Sans qu'aucune instruction soit
faite, sans que les villageois aient le temps
de prouver qu'ils étaient innocents, la horde
se rua sur eux, en massacra huit et en prit
quatre vivants sans compter les femmes et
les enfants. Le reste des chrétiens ne put
é c h a p p e r au massacre que grâce à la fuite.
Ap r è s le massacre, les bachibozouks et les
soldats pillèrent tout le village, violèrent les
femmes qu'ils t r o u v è r e n t dans les maisons
et mirent le feu au village. Tout un quartier
fut c omp l è t eme n t détruit.
—
Le village
Ossoï
fut détruit ces jours-ci.
Le gardien de ce village, Sali-Agha, un b r i –
gand sanguinaire que le gouvernement a
imposé aux villageois, ayant d ema n d é une
forte somme d'argent aux notables, se vit
offensé par leur refus. Il organisa alors une
bande de brigands et attaqua le village. Les
habitants s'étant enfuis, i l mit le feu aux
quatre coins et tout le village devint la proie
des flammes. L a bande, a p r è s avoir fait un
bon butin, s'éloigna du village pour conti–
nuer ses exploits. Sur la route de Yavoletz,
elle rencontra deux c h r é t i e n s et les mit en
pièces. Aucune poursuite ne fut organisée
contre elle.
Okhrida.
—
Je vous ai écrit la d e r n i è r e
fois de l'assassinat de Chengheloff qui fut
tué par le beau-frère de Mefaïl-Agha et ses
compagnons. Ce même brigand à la tête de
sa bande, à laquelle se j o i gn i t celle du
comité musulman de Resné sous le comman–
dement de Haïdor, vient de tuer le jeune
homme Yvan Glavintcheff, de Okhrida. Ce
dernier é t a n t allé à Re s n é pour le ma r c h é ,
les deux bandes des comités musulmans
terroristes de Okhrida et de Re s n é qui fai–
saient des orgies dans le château de Mefaïl-
Agha à
Leskowetz,
furent averties et se pos–
t è r e n t sur la montagne
Pelrino.
Lorsque le
Fonds A.R.A.M