r é f o rme s que de les l u i imposer 'ainsi
du dehors. E t , prenant texte d'une
lettre du professeur Foenter qui re-.
commande au Co n g r è s de ne pas
s ' é g a r e r en a n a t h ème s et disputations
vaines contre la Turqu i e , la
Gazette de
Cologne
affecte de conclure de là que
des amis bien i n t e n t i o n n é s des A r mé –
niens ne voudraient pas ê t r e les dupes
de leurs bons sentiments et servir les
d é f e n s e u r s d'une cause douteuse -en
faisant fond sur un « tissu de men–
songes » : car les informations sur
l'état des provinces a rmé n i e n n e s ne
sont pas impartiales.
L e lendemain, 20 juillet, autre ton.
Quelque cent hommes honorables sont
r é un i s à Bruxelles pour y rappeler
une fois encore aux puissances signa–
taires l'article 61 du t r a i t é de Be r l i n .
11
est exact que lesdites puissances et
la Turquie et l'une d'elles ont p é c h é
par « omi s s i on », et elle est exacte
aussi la parole r é c e n t e de De l c a s s é à
la Chambre f r anç a i s e , à savoir que les
conditions actuelles des provinces asia–
tiques r é c l ame n t , plus encore qu'en
1878,
une amé l i o r a t i o n .
L e s congressistes de Bruxelles se
sont peut ê t r e l a i s s é r e p r é s e n t e r l'état
p r é s e n t sous une couleur encore plus
sombre qu'il n'est en r é a l i t é . Ma i s
eussent-ils absolument raison, tant
dans leurs a l l é g a t i o n s que dans leurs
demandes pour l'avenir, i l ne faut point
attendre un bon r é s u l t a t de leurs déli–
b é r a t i o n s . L a mauvaise vo l on t é du
Gouvernement turc en sera a u gme n t é e
et les puissances ne sont pas d i s p o s é e s
à des d éma r c h e s d é c i s i v e s .
Le s desiderata des A r mé n i e n s , tels
qu'ils sont e xpo s é s dans
Pro
Armenia,
se réfèrent toujours à la Cr è t e , à la
Bo umé l i e orientale; de telles r é f o rme s
ne sont possibles que dans les pro–
vinces virtuellement s é p a r é e s de la
Turquie. L e s populations locales ne
demandent que l'application des lois
existantes. A u reste, i l y a des A r m é –
niens, mais pas d ' A rmé n i e .
Cependant on peut se demander si les
puissances ne veulent pas agir, si l'Angleterre
ne veut pas se souvenir qu'elle a occupé file
de Chypre contre promesse de réformes en
Asie ; les avertissements des ambassadeurs
de l'Étranger, des A r mé n i e n s et des Turcs
d'intelligence droite et clairvoyante n'ont
aucun succès, d'où peut venir le salut pour
les peuples de Turquie — car i l ne s'agit pas
seulement des A rmé n i e n s .
Toutes les r é f o rme s ont é c h o u é j us –
qu'ici, et si quelques amé l i o r a t i o n s
partielles se sont produites, les popu –
lations de la Turqu i e ne s'entendent
pas entre elles et ne sont pas pacifiées.
Des r é f o rme s n'ont é t é a r r a c h é e s que
pour des pays qu i , en m ê m e temps,
é t a i en t s é p a r é e s de la Tu r qu i e .
Ma i s quant aux r é l o rme s d'initiative
turque elles d é p e n d e n t plus que jamais
et exclusivement de «
Yhomme qui est
assis sur le trône des Osmanlis, de sa
puissance, de son discernement, de sa
volonté
».
Car i l faut é c a r t e r l'idée que
l'islamisme par soi est ennemi de tout
p r o g r è s et les musulmans aussi dési–
rent progresser. I c i , i l faut citer encore
textuellement :
L'homme qui est assis aujourd'hui sur le
t r ô n e turc est, sans aucun doute, en posses–
sion du pouvoir de faire passer le moyen-
âge de ses possessions asiatiques à une
é p o q u e moderne.
Il ne manque pas non plus de discernement.
Si à cela se joint la volonté de faire servir à
un tel but le discernement et le pouvoir, la
Turquie peut gagner la paix intérieure, le
p r o g r è s et la place dans le monde que l u i
mé r i t e n t la richesse de son sol et les qualités
émi n e n t e s de ses peuples.
Les A rmé n i e n s doutent de cette volonté et
ils ont a s s u r éme n t leurs raisons pour cela.
Mais rien n'est impossible.
La situation de
l'empire n'est pas sans péril et l'avenir, au cas
de la continuation
de telles
circonstances,
augmentera
encore ces dangers
qui
viennent
plus du dedans que du dehors.
Mais plus en–
core que la force du danger sur un homme
d'une volonté aussi é n e r g i q u e que le Sultan,
l'idée peut agir qu'il suffit de vouloir pour
laisser dans l'histoire un grand nom. Cette
espérance n'est p e u t - ê t r e pas bien forte pour
les A rmé n i e n s , mais c'est la seule.
E t le j ou r na l r h é n a n conclut cette
fois qu'il s'agit pour la Turqu i e ou de
rendre i r r émé d i a b l e une situation mau–
vaise et de donner ainsi c a r r i è r e aux
«
tendances centrifuges » ou de h â t e r
la grande œu v r e de g u é r i s o n et de
c r é e r le patriotisme turc.
Il n ' é t a i t pas mutile d'analyser l on –
guement ces deux articles de la
Gazette
de Cologne.
L e second contient bien
encore les phrases de style sur les
A rmé n i e n s qui ne sont en ma j o r i t é
nulle part. Ma i s on ne parle plus de
«
tissu de mensonges » et on recon–
na î t , avec M . De l c a s s é , que la situation
est pire qu'en 1878.
Quant à l'argument que les r é f o rme s
n'ont jamais été obtenues que dans des
provinces virtuellement d é t a c h é e s de
l ' Emp i r e turc, i l ne tient pas contre
le fait que le L i b a n est a dmi n i s t r é
d'une façon p a r t i c u l i è r e et que cepen–
dant l ' au t o r i t é du Sultan s'y exerce
directement. I l faudrait remarquer en–
core que si la Bo umé l i e Orientale et la
Crète ont é t é e n l e v é e s à la Turquie, ce
n'est point parce que des r é f o rme s y
furent introduites, mais bien au con–
traire, parce que les r é f o rme s consen–
ties ou promises par le parti d 'Ha l epa ,
les c on f é r e n c e s de Constantinople, le
t r a i t é de Be r l i n , n'avaient jamais é t é
mises à e x é c u t i on .
Ma i s surtout i l faut retenir que le
j ou r na l allemand, r e n o n ç a n t à l'argu–
ment du massacre et du fanatisme
musulman p r oc l ame , comme nous-
même , qu'un seul homme est respon–
sable de tout ce qu i arrive en Turquie
et que le danger pour ce pays vient du
dedans et non du dehors. Ma l g r é les
louanges a c c o r d é e s à l'intelligence et
à la puissance d ' Ab d - u l -Hami d , un
avertissement se cache sous les fleurs :
la vo l on t é de bien faire manque peut-
ê t r e à ce souverain et s'il laisse empirer
l'état des provinces e u r o p é e n n e s et
asiatiques, s'il condamne l u i -même son
empire au d émemb r eme n t , l'Allemagne
en p â t i r a , autant et plus qu'aucune
nation e u r o p é e n n e .
Ne serait-ce pas le moment de l ' i n –
viter effectivement à se couvrir de
gloire, devant que les r é g i o n s traver–
sées par le futur chemin de fer de
Bagdad soient me n a c é e s par une occu–
pation russe des vilayets a r mé n i e n s .
L ' h uma n i t é et la justice seraient d'ac–
cord avec les i n t é r ê t s financiers de
l 'Al l emagne et de l ' Eu r ope pour s o l l i –
citer du sanglant habitant d ' Y l d i z , une
conversion tardive.
Déjà en des circonstances graves, les
r e p r é s e n t a n t s de l 'Al l emagne ont tenu
au Sultan des propos s é v è r e s : en
novembre 1895, le baron Saurma rece–
vait de Be r l i n «
l'ordre de lui faire de
sérieuses
représentations
»
et de l u i
dire que «
ïanarchie
ottomane finirait
par ébranler son trône el par lasser la
patience de l'Europe
».
U n an plus
tard, lors des massacres de Constan–
tinople, le même baron Saurma con–
tresignait la d é p ê c h e collective des
ambassadeurs au Su l t a n ; M . de Né l i -
doff «
avait proposé
d'adresser
direc–
tement au Sultan un télégramme
de
remontrances sévères. Les circonstances
paraissaient si graves que l'emploi d'un
Fonds A.R.A.M