qui eû t pu g ê n e r l ' As s a s s i n dans son
travail. M . De l c a s s é estime que cette
politique inhumaine a fait son temps; i l
ne croit pas qu ' i l faille, n é c e s s a i r eme n t ,
pour ê t r e un grand homme, t o l é r e r ,
approuver, soutenir le plus hideux des
é g o r g e u r s .
Il n'a pas pris à l a l é g è r e l a r é s o l u –
tion d'agir et i l ne p a r a î t pas qu ' i l
veuille s'en tenir là : non seulement à
Mo u s h , mais un peu partout dans l a
Petite et Grande A rmé n i e , i l c r é e r a , aus–
sitôt que possible, des agences consu –
laires et p r é v e n u à temps des dangers
imminents, i l voudra sans doute y parer
comme i l le fit lors de l'affaire d ' A ï n t a b .
Le s d e r n i è r e s nouvelles que nous
avons r e ç u e s de Mo u s h et de Segherd
sont toujours fort alarmantes. A Mo u s h ,
ce sont encore des assassinats i s o l é s ;
à Segherd, i l y a eu bataille entre
tribus kurdes et leurs voisins a r mé n i e n s ,
nestoriens, c h a l d é e n s , voire turcs en
ont s û r eme n t p â t i .
V o i c i les d é p ê c h e s qui nous sont par–
venues sur ces é v é n eme n t s :
Moush, 2g juin
igo2.
Minas Aghadjanian, natif d'Arabkir et
établi à Moush comme c omme r ç a n t , a été
tué i l y a peu de jours p r è s du village de
Slivan. 11 se trouvait en route pour son pays
de naissance. Le crime a eu lieu après le
3/15
mai 1902.
Le 7/20 mai 1902, quelques Kurdes en
uniforme de soldats sont e n t r é s dans la mai–
son de A r t i n , chef du village Tchrik (à une
demi-heure de Moush). Ils ont t ué la femme
d'Artin, blessé et t o r t u r é le mari ainsi que
le domestique de la maison. Ils ne se sont
retirés q u ' a p r è s avoir enlevé cent livres tur–
ques en espèces sonnantes et des effets de
valeur.
Seyherd, 28 juin
igu2.
A la date du 9/22 mai 1902, on signalait des
attaques r é c i p r o q u e s parmi les
achirets
(
tri–
bus) kurdes du district de Kharzan. A cette
occasion, les Kurdes n'ont pas voulu man–
quer d'user de vexations contre les chrétiens
et les musulmans paisibles habitant ledit
district. Les détails manquent.
Ma i s le v é r i t a b l e instigateur,, l'au–
teur responsable de toutes ces a t r o c i t é s
se sait maintenant plus surveillé que
jamais : i l ne peut g u è r e commettre de
crimes sans que le monde civilisé en
soit presque a u s s i t ô t averti et l'horreur
s ' a c c r o î t et les e x é c r a t i on s grandissent
à chaque forfait révélé.
A l o r s qu'autrefois le silence était
o r g a n i s é par ceux-là même s qui avaient
la mi s s i on de d é n o n c e r le coupable et
la puissance de le c h â t i e r ; i l l u i est
signifié d é s o r ma i s qu'il pourrrait de–
venir pé r i l l eux pour son Imp é r i a l e F é r o –
cité d'attirer l'attention sur elle par de
trop é c l a t a n t e s boucheries.
Peu à peu l'entente universelle se fait
pour mettre hors d ' é t a t de nuire un
criminel qui se croyait a s s u r é à j ama i s
de l ' imp u n i t é . Que s ' i l se laissait em–
porter comme d'aucuns le redoutent par
son instinct sauvage et osait r é p o n d r e
aux clameurs d'indignation par un
attentat nouveau contre l ' h uma n i t é , le
c h â t i me n t ne se ferait point attendre :
Abdu l - I I ami d cette fois jouerait son
t r ô n e et p e u t - ê t r e sa vie avec toutes
chances de perdre.
P i e r r e
Q U I L I . A R D .
La Réunion de Berlin
L e c é l èb r e t h é o r i c i e n socialiste, d é –
p u t é au Re i chs t ag allemand, E . Berns-
tein, a fait, le 26 j u i n , à Be r l i n , une
con f é r enc e publique sur
Les souffrances
du peuple Arménien
et les devoirs de
l'Europe;
la r é un i on a eu lieu dans les
«
Salles Germania » devant un auditoire
de 3.500 assistants pa rmi lesquelles se
trouvaient de nombreuses personnes
appartenant aux colonies russe, b u l –
gare, roumaine et a r mé n i e n n e de Ber–
l i n .
A u d é b u t l'orateur a r a p p e l é les san–
glantes horreurs dont l ' Armé n i e turque
a é t é le t h é â t r e et i l a mo n t r é que pour
l ' Eu r ope et s p é c i a l eme n t aussi pour
le peuple Al l ema nd , l a question a r m é –
nienne a une importance quelquefois
inconnue : car elle se rattache à cette
grande question que l ' on appelle la
question d'Orient, qui peut devenir à
toute minute une nouvelle pomme de
discorde pour les peuples
civilisés
d'Europe et enrayer ainsi le p r o g r è s de
la civilisation.
Toutes les c o n s i d é r a t i o n s d ' h uma n i t é
obligeraient 'les Al l ema nd s à tenir
compte de cette question; mais encore
ils auraient un devoir direct à l ' éga r d du
peuple Armé n i e n , exploité, o p p r i mé ,
ma s s a c r é : car l'Allemagne, en signant
de concert avec les autres puissances
e u r o p é e n n e s le t r a i t é de Be r l i n , a
a s s u r é le devoir de p r o t é g e r les A r mé –
niens de Turquie et de leur assurer des
conditions normales d'existence. E t
c'est devant l'accomplissement de telles
obligations que les peuples h é s i t a i e n t !
L ' o r a t eu r entre ensuite dans de lon–
gues c o n s i d é r a t i o n s sur l'état de c i v i –
lisation et le r é g ime administratif de
la Tu r qu i e . I l termina en invitant les
assistants à protester avec é n e r g i e
contre la l â c h e conduite des gouver–
nements et à montrer ainsi que le
peuple Al l ema nd ne peut pas p r ê t e r les
mains à l'extermination d'une nation s i
petite soit-elle.
(
Longs
applaudisse–
ments).
Il n ' y eut pas de contradiction et à
l ' un a n imi t é moins une voix l ' a s s emb l é e
vota l a r é s o l u t i on p r o p o s é e par Be r n s -
tein :
L a p r é s e n t e a s s emb l é e déclare :
Les souffrances du peuple A rmé n i e n en
Turquie et sa lutte pour le droit à l'autono–
mie administrative, pour la défense contre
les actes arbitraires des agents gouverne–
mentaux et les atrocités barbares de peuples
à demi civilisés mé r i t e n t non seulement toute
la sympathie de quiconque pense librement,
mais encore l'appui moral des travailleurs
du monde civilisé qu i combattent pour leur
éma n c i p a t i o n .
L'assemblée exprime la plus profonde
horreur à l'égard des sanglants massacres
dont l'Arménie a é t é le t h é â t r e « plusieurs
reprises, au cours des d e r n i è r e s a n n é e s et
qui se r é p è t e n t indéfiniment. Elle tient pour
responsable de tout renouvellement de ces
exécrables horreurs en p r em i è r e ligne le
gouvernement du Sultan et non moins aussi
les gouvernements des grandes puissances,
qui, par l'article 61 du traité de Berlin ont
accepté le mandat de donner leurs soins à
introduire en A rmé n i e la sécurité pour la vie
et les biens.
Elle demande au gouvernement Allemand
d'employer é n e r g i q u eme n t son influence sur
le gouvernement du Sultan, dans le sens des
principes ci-dessus et exprime la conviction
que si les puissances signataires du traité de
Berlin montrent seulement une volonté ferme
à l'égard du gouvernement turc, la résistance
et l a politique de diversion du Sultan et de
ses satrapes peuvent fort bien être brisées.
L'assemblée croit utile de déclarer qu'en
demandant la justice et l a sécurité pour les
A rmé n i e n s , elle n'obéit pas à un préjugé
contre la nation turque.
Elle est au contraire fermement p e r s u a d é e
que les vrais intérêts de la grande masse de
la nation turque exigent l'établissement d'un
r é g ime ju^te en A rmé n i e et que le peuple
turc a le m ê m e i n t é r ê t que les A rmé n i e n s , à
mettre fin a l'administration déplorable du
pays.
Dans cette conviction elle joint à la mani–
festation de sa sympathie profonde pour les
A r mé n i e n s qui souffrent et qu i luttent,
l'expression de ses sympathies pour tous
ceux qui, sans distinction de nationalité, en
Turquie comme ailleurs luttent pour les
réformes libérales, pour l'égalité politique
et l a justice sociale.
Le s r é s o l u t i o n s vo t é e s par l'assem-
Fonds A.R.A.M