a r é p o n d u qu'il était en négociations avec
les autorités fédérales.
M . Secretan tient à ce que l'on sache que
l'expulsion de M . de Uichthofen est désirée
dans toute la Suisse.
Quant à A l i Fahri, que l'on a représenté
comme anarchiste, M . Secretan le connaît
pour un homme parfaitement honorable-. Il
a été officier de marine et i l a eu le tort
d'exprimer librement son opinion. Son dos–
sier d'anarchiste a probablement été cons–
titué par la légation de Turquie en Suisse,
A l i Fahri est un libéral, nullement un anar–
chiste.
L'opinion publique en Suisse a vu, avec
regret, installer en Suisse une agence per–
manente de Turquie. Cette opinion s'est
déjà ému e au moment des massacres d'Ar–
ménie. A ce moment, le Conseil fédéral
n'avait rien pu faire. On l'avait compris,
mais on n'a pas compris que le Conseil fédé–
ral acceptât peu après la création d'une léga–
tion de Turquie en Suisse.
M .
G O I Î A T
estime que les Chambres sont
parfaitement c omp é t e n t e s pour traiter cette
question. A propos de la gestion, l'orateur
conteste l'utilité d'une légation de Turquie
en Suisse. Tous les é t r a n g e r s sont p r o t é g é s
en Suisse, m ê m e s'ils n'ont pas de r e p r é s e n –
tants diplomatiques. Quant aux Suisses en
Turquie ils ne demandent qu'une chose,
c'est de ne pas être p r o t é g é s par la Suisse;
ils sont p r o t é g é s par les grandes puissances.
Le consulat général de Turquie à Genève
est une agence d'espionnage et de provoca–
tion. Le Conseil fédéral doit agir. Il y a des
agents provocateurs, des espions à Genève
et p e u t - ê t r e ailleurs. Le Conseil fédéral doit
tenir la promesse qu'il a faite; i l doit expul–
ser les p e r s é c u t e u r s et non les persécutés,
comme il l'a fait pour A l i Fahri. 11 n'est
nullement p r o u v é du reste q u ' A l i Fahri soit
anarchiste, ni surtout qu'il ait commis des
actes anarchistes. A l i hahri est un ancien
officier de marine tout à fait respectable; i l
a été expulsé parce qu'il aurait accusé le
Conseil fédéral d'avoir reçu des backehiches
de Munir bey, mais i l a absolument contesté
ces affirmations. C'est donc sur un rapport
inexact et une traduction inexacte qu'il a été
expulsé. Ce qui est exact, c'est que Munir
bey aurait touché 140,000 francs comme
«
backcliiche au Conseil fédéral ». M . Go b â t
sait parfaitement cpie les sommes n'ont pas
été distribuées, et que Munir bey n'a même
fait aucune tentative de corruption, fl con–
naît fort bien l'honorabilité parfaite île nos
magistrats, mais i l n'en est pas moins vrai
que Munir bey doit avoir touché cette somme.
Les faits résultent des déclarations faites
devant des citoyens suisses par le consul
général de Turquie à Genève.
Le Conseil fédéral ne peut pas juger qu'il
soit de sa dignité de conserver des relations
avec un agent diplomatique semblable.
L'existence de la légation de Turquie en
Suisse dans ces conditions est incompatible
avec l'honneur du pays.
M .
V I N C E N T
rappelle les interpellations
qui ont eu lieu d e r n i è r eme n t au Crand Con–
seil de Genève à la suite des publications de
la
Suisse.
Aujourd'hui le Conseil d'État gene–
vois s'occupe de cette affaire. L'orateur est
tenu à cet é g a r d à une e x t r ême réserve. Il
ne veut pas p r é j u g e r la décision du Conseil
fédéral, mais i l tient à ce qu'on sache que le
Conseil d'État genevois, non seulement n'a
jamais désiré la création d'un consulat géné–
ral de Turquie à Genève, mais qu'il a au
contraire toujours protesté contre cette créa–
tion. Il ne s'est jamais fait d'illusion sur le
caractère de ce consulat, et ce qu'il a prévu
est arrivé.
M . Vincent espère cpie le Conseil fédéral
se décidera à agir. Il remercie M . Secretan
d'avoir attiré l'attention du Conseil national
sur cette question. S i le Conseil fédéral se
décide à agir, i l aura derrière l u i l'opinion
des Chambres et du peuple entier.
M .
Z E M P ,
p r é s i d e n t de la Confédération,
déclare que le Conseil fédéral n'est pas
inactif. I l répète que le Conseil fédéral n'a
eu connaissance d'aucun acte accompli depuis
le mois de février 1901, dans lequel le baron
de Richthofen aurait u s u r p é le titre de con–
sul g é n é r a l . Le Conseil fédéral n'hésitera
pas à le suivre, s'il se convainc cpi'il y a des
espions ou des agents provocateurs à Genève
ou ailleurs. Mais le Conseil fédéral ne peut
pas agir sur des articles de journaux. Il ne
peut agir (pie sur des preuves officielles, et
ces preuves, MM . Secretan et Go b â t ne les
ont pas fournies. Quant aux allégations que
M . Go b â t a p r ê t é e s aux r e p r é s e n t a n t s actuels
de la Turquie en Suisse, elles seraient t r è s
graves si elles étaient exactes. Mais l'exacti–
tude de ces allégations est des plus suspectes.
M . le p r é s i d e n t de la Confédération estime
qu'on ne devrait pas apporter dans cette
satle des accusations de ce genre contre tes
r e p r é s e n t a n t s de puissances é t r a n g è r e s .
M .
S E C R E T A N
déclare qu'il se tient à la dis–
position du Conseil fédéral pour tous ren–
seignements. Il a avancé des faits qui résul–
tent de rapports officiels et qui sont de
notoriété publique.
M .
G O H A T
maintient que les accusations
qu'il a faites contre Munir bey reposent sui–
des affirmations positives du consul général
ottoman à Genève. Le Conseil fédéral devrait
lire é g a l eme n t ce que disent les journaux
français de Mu n i r bey. L a discussion est
close.
L a gestion du d é p a r t eme n t politique est
a p p r o u v é e , et la séance est levée à midi et
quart.
L e j o u r n a l
La Suisse
d u j e u d i 1 2 j u i n
commente en ces termes l a d i s cu s s i on du
Conseil national et annonce de nouvelles
r é v é l a t i o n s sur l'espionnage turc à G e n è v e :
L a discussion est close devant le Conseil
national. Elle ne l'est pas devant le pays.
L'opinion publique ne se contentera pas des
r é p o n s e s dilatoires et des explications em-
barrassée^ de l'honorable M . Zemp.
Elle dira qu'il résulte de ces r é p o n s e s
même s que, dans le passé, le Conseil fédéral
a fait preuve d'une l o n g a n i m i t é excessive et
inexplicable envers le sieur de Richthofen
en se contentant de l'avertir, au lieu de
l'expulser. Cette ma n s u é t u d e contraste de la
façon la plus choquante avec l'expulsion
pure et simple d'Ali Fahri, jeune Tu r c libé–
ral et de passé honorable, désigné comme
anarchiste par les rapports turcs seulement.
Comment le Conseil fédéral, qui exige de
l'Italie toute une p r o c é d u r e régulière pour
poursuivre un journal notoirement anar–
chiste, expulse-t-il, sans aucune p r o c é d u r e
judiciaire, un journaliste turc, écrivant en
turc des articles dont le caractère anarchiste
n'est nullement établi? M . Zemp parle des
a n t é c é d e n t s d'Ali Fahri que nous savons
irréprochables. Qu'il recherche ceux du ba–
ron de Richthofen, et i l fera de très i n t é r e s –
santes et piquantes découvertes, nous le lui
promettons.
M . Zemp parle avec un beau d é d a i n des
«
articles de journaux », Il ferait bien d'en–
gager le parquet fédéral à se renseigner
aussi c omp l è t eme n t et aussi s é r i e u s eme n t
que l'a fait la presse, qui est loin de dispo–
ser des même s moyens d'investigation.
Quand la presse a d é s i g n é , en 1900 et 1901,
M . Charles-Philippe de Richthofen pour ce
qu'il était et pour ce qu'il reste, le Conseil
fédéral a dit que les preuves manquaient.
Aujourd'hui les preuves sont a p p o r t é e s : le
Conseil fédéral les trouve trop anciennes.
11
est vraiment regrettable qu'il n'ait pas
devancé les journaux, mais nous e s p é r o n s
pouvoir lui soumettre bientôt quelques p i è –
ces plus fraîches qui montreront à ehacun
qu'aujourd'hui, comme n a g u è r e , les même s
faits existent et qu'ils peuvent se prouver.
Nous disons en attendant et nous r é p é –
tons qu'il est de notoriété publique : 1» que,
ma l g r é les avertissements et les menaces du
Conseil fédéral, M . de Richthofen reste à
Genève occupé des même s questions auquel
i l voua son i n t é r ê t d è s 1898 ; 2» que le
consulat g é n é r a l ottoman à Genève est un
centre d'espionnage et d'intrigues dont la
population genevoise, aussi bien que les
sujets établis à Genève, demandent à être
d é b a r r a s s é s ; 3° que, par c o n s é q u e n t , le
Conseil fédéral, pour être lidèle à ses pro–
messes d'août 1901, doit appliquer aux es–
pions et aux agents provocateurs les mesu–
res d'expulsion qu'il a prises contre tes
victimes de ces tristes personnages.
Malgré l'attitude d é c o u r a g e a n t e du Co n –
seil fédéral, nous voulons croire encore que
la séance de ma r d i aura d'heureux résultats
et que notre territoire sera bientôt p u r g é
des tristes personnages et des louches agis–
sements qui le d é s h o n o r e n t . S i , comme nous
voulons le croire, le Conseil fédéral ne veut
être c omp l è t eme n t et exactement r e n s e i g n é
que, pour pouvoir sévir avec une é n e r g i e re–
doublée, i l ne l u i est pas difficile d'être i n –
formé. Avec un peu de finesse et de bonne
volonté, i l y arrivera le plus a i s éme n t du
inonde. Le tout est de vouloir.
L I R E
Le Mouvement Socialiste
10,
rue Monsieur-le-Prince, Paris (Vf)
Bévue hebdomadaire Internationale
Directeur : Hubert L A G A R D E L L E .
Secrétaire : Emile B U R E .
Direction littéréraire : Lucien B E S N A R D .
Fonds A.R.A.M