V i l a y e t de Mo na s t i r
Ce vilayet est le plus éprouvé de tous,
de Kastoria seulement plus de cinq cents
personnes ont été envoyées en prison à
Monastir.
Monastir.
Assassinai de Sandre Emift-
chiala; l'assassin est libre.
Assassinat de Pètre Marcoff et de Tba-
nase Pilicheff, par un gendarme sur la
route de Pytelé à Kaïlari.
Destruction complète des villages Do -
broveni et Popadia; hommes emprisonnés,
femmes violées.
Perlepé.
Une bande de sept révolu–
tionnaires, commandé parle maître d'école
Méthode Patchcff, s'était cachée dans la
tour de Kadino Selo. Cernés par cinquante
gendarmes, quatre cents cavaliers et quatre
cents bachibouzouks, les révolutionnaires
s'empoisonnèrent après deux jours de lutte,
ayant tué une centaine des assaillants.
Kilchevo.
Le garde champêtre Malik-
Tache, avait formé une bande très forte,
i l a élé assassiné récemment. Par repré–
sailles la police a envoyé aux prisons de
Monastir trente villageois.
Eniin nous apprenons qu'à la date du
14
mai, la courd'appel de Salonique a jugé
quarante habitants de Yôni-Keuï (district
de Strumnitza), pour menées séditieuses et
cinq autres pour faux témoignage : six
accusés ont été acquittés, quatre condam–
nés à mort, treize condamnés à la prison
perpétuelle, neuf à dix ans de prison, cinq
à cinq ans de prison; les cinq inculpés de
faux témoignage ont été condamnés à dix
ans de travaux forcés. Trois des accusés
n'avaient pu comparaître,
ils étaient morts
en prison. Ils onl cependant été condamnés
à la perte de leurs droits civiques.
CHOSES ALBANAISES.
Tandis que le
marquis de Aladro Kastriota et les divers
prétendants au gouvernement de l'Albanie
donnent des inquiétudes à Hamid, dans le
pays, les luttes entre chefs de clan sont
toujours aussi violentes : entre Riza bey
de Diakova et Baïram Surah, c'est la
guerre continuelle et on est fort embar–
rassé au Palais pour intervenir, car une
partie de la garde albanaise d'Yldiz appar–
tient au clan de Surah et i l ne faudrait pas
mécontenter des hommes de qui dépend
immédiatement la vie de Hamid.
En attendant celui-ci met à profit son
amitié avec la Grèce et la Roumanie pour
pour traquer, dans les deux royaumes, les
gens qui lui déplaisent. Le séjour de Corfou
a été interdit à quiconque est suspect de
«
Jeune Turquie », et à Bucarest on a dé-
couvertune grande conspiration albanaise;
au cours de perquisitions chez les agita-
tateurs, i l a élé saisi chez i'un d'eux, l'étu–
diant Jaspar Erebara, Vue Popa-Na 17, un
sac de lettres compromettantes et toute la
correspondance des comités albanais se–
crets de l'étranger.
SÉDITION MILITAIRE A MONASTIR.
L'an
dernier déjà, la garnison de Monastir se
mil en état de révolte parce qu'elle n'était
pas payée. Cette année le corps presque
tout entier des officiers a décidé de faire
une manifestation nouvelle. Ils envoyèrent
donc à Constantinople quatre dépêches par
des voies différentes avec la certitude que
leurs télégrammes viendraient à la con–
naissance du sultan. Mais pour empêcher
toute dénonciation et toute entente secrète
entre leurs chefs et le Palais, ils prirent
possession du bureau télégraphique et
coupèrent ainsi les communications entre
Constantinople ou Salonique et le gouver–
neur militaire Férid Pacha, général de
brigade. Celui-ci put cependant, par le
télégraphe du chemin de fer, se mettre en
rapport avec Yldiz et demander des ins–
tructions. Mais i l faudra céder, car les
troupes sont d'accord avec leurs officiers.
L'UNIFICATION DE LA DETTE.
Il s'en faut
que l'acceptation du projet Rouviersoit un
un fait accompli. Le grand Vizir et le Sous-
Secrétaire d'Etat aux finances Riza bey,
sont avec tous les ministres, sauf un, par–
tisans de l'unification proposée, qui réta–
blirait un peu d'ordre dans les finances
turques. Mais le gouvernement russe n'est
guère favorable à une opération qui faci–
literait la construction du chemin de fer
de Bagdad; i l a trouvé un excellent auxi–
liaire dans la personne de Selim Pacha
Melhamé : le Nazir des forêts, mines et
agriculture ne peut donner aucune raison
précise de son opposition ; i l est opposé
par principe et espère, s'il réussit, amener
la chute de Kutchuk-Saïd qu'il déteste.
L E S ÉTUDIANTS HELLÈNES DE GENÈVE. —
Par mesure d'impartialité, nous publions
la lettre suivante qui nous est adressée par
M. Adossidès (Georges Dorys) :
Paris, 20 mai.
Mon cher ami,
Pro Armenia
du 25 avril dernier publiait,
sous la rubrique :
Etudiants grecs hamido-
philes,
un entrefilet relatif à l'incident des
quatre étudiants grecs de Genève, au sujet
duquel vous avez été sans doute imparfaite–
ment renseigné, puisque vous les considérez
comme ayant « sollicité et quémandé des
pensions haniidiennes ».
Voulez-vous me permettre d'exposer briè–
vement les faits tels qu'on peut les relever
d'ailleurs dans les principaux journaux suis–
ses et notamment dans la
Gazette de Lau–
sanne
du 17 mai, organe dont on ne peut
assurément suspecter l'indépendance d'opi–
nion ?
Quatre étudiants grecs, sujets ottomans
ayant leurs familles en Turquie, furent ac–
cusés, au mois de janvier dernier, par un
espion du Sultan — le fameux baron de
Hichthoffen, suivant les uns, par un obscur
agent de Mu n i r , suivant les autres — d'avoir
tramé je ne sais quel complot contre la vie
d ' Abdu l -Hami d et la sécurité de son trône.
Obligés qu'ils sont de rentrer un jour en
Turquie, où ils ont de plus leurs parents,
ces jeunes gens, pour déjouer cette manœu–
vre, durent signer une adresse de soumis–
sion au Sultan — obligation pénible qu'on
n'est peut-être pas plus en droit de leur
reprocher qu'à nombre d'autres persécutés
qui, comme par exemple tant de malheu–
reux Arméniens lors des massacres, durent
signer des protestations de fidélité à leur
sanglant tyran.
Ab d u l - Ham i d répondit à ces marques de
loyalisme forcé en infligeant à leurs auteurs
des récompenses officielles : décorations et
gratifications légères, semblant ignorer qu'il
serait loin par là de leur être agréable et
de leur l'aire honneur.
Des étudiants bulgares prétendirent voir
dans ces faveurs impériales une rétribution
de services infâmes, et dans un article p u –
blié par le
Genevois,
dénoncèrent comme
espions leurs quatre condisciples hellènes.
Une polémique s'en est suivie, puis une e n –
quête qui aboutit à la reconnaissance par
la presse suisse et le recteur de l'Université
de Genève devant qu i le différend fut porté,
de l'innocence absolue et de la parfaite ho–
norabilité des accusés.
Notez que ceux-ci, pour défendre leur
honneur menacé, ne furent plus arrêtés par
les prudentes considérations personnelles
qui avaient dicté leur conduite première et
qu'ils désavouèrent en quelque sorte l ' a –
dresse de soumission au Sultan en donnant
publiquement et par la voie des journaux
les raisons qu i les avaient contraints à la
signer.
Je ne voudrais pas abuser de l'hospitalité
que m'offrent vos colonnes en m'étendant
sur un passage de votre entrefilet relatif à
ces Hellènes cjui autrefois « se fussent r a n –
gés à côté des phanariotes
fidèles
aux op –
presseurs ». Sauf le talentueux polémiste
que le gouvernement français a eu l'heu–
reuse inspiration de faire reconduire à la
frontière, lors de son conflit avec la Porte, je
ne connais aucun Grec à la solde de Hamid.
Quant aux « phanariotes
fidèles
aux oppres–
seurs », vous n'ignorez pas que tout ce qu i
avait un nom au Phanar, en 1821, fut déca–
pité, et qu'Ypsilanti, Mavrocordato et tant
d'autres phanariotes furent de brillants pro–
tagonistes de l'insurrection hellénique.
Veuillez, mon cher Quillard, excuser les
dimensions de cette lettre et croyez-moi
toujours votre très dévoué,
A . ADOSSIDÈS.
Il n'est pas possible d'établir une com–
paraison entre les étudiants Hellènes de Ge–
nève et les Arméniens qui durent, au cours
des massacres, envoyer à leur bourreau
des adresses de loyalisme.
Ceux-ci signaient le couteau sur la gorge.
Les étudiants hellènes Papadakis, Jenna-
ropoulo, frères Kalevra qui se crurent
obligés d'écouter le conseil de « prudentes
considérations personnelles » et qui « désa-
Fonds A.R.A.M