dans les journaux français, a failli amener
un nouveau conflit politico-financier entre
la République française et S. M . I. Abd -
ul-Hamid. Une avance de 40,000 livres,
consentie d'abord par la Dette, avait été
refusée ensuite sur l'opposition du délégué
anglais. Aussi, le 14 avril, la Porte ne pût
point payer l'à-complc promis. Là-dessus,
S. E. M . Constans fit savoir au grand-vizir
que la France était obligée de protester
contre ce manque de parole et d'interrom–
pre les pourparlers pour la conversion des
emprunts d'État. Saïd se tourna alors
vers le C
1
Léon Berger, président de fa
Dette et obtint de l u i une avance de
30,000
livres, sur l'engagement d'honneur
de rembourser dans les cinq jours : sur
cette somme la traite Lorando-Tubini fut
acquittée à l'ambassade de France, le
Î5 avril.
Si les financiers européens ne l u i por–
taient secours, le gouvernement hamidien
périrait faute d'argent : les troupes non
payées, non habillées, non nourries, non
chaussées, et surtout non pourvues de
munitions seraient incapables de réprimer
les séditions prochaines.
Mais la France et l'Allemagne se dispu–
tent l'honneur de rétablir les finances otto–
manes, à leur giand profit; et sitôt que
M. Bouvier s'y est employé avec la maî–
trise qui lui est reconnue universellement,
le baron Marshall de Bieberstein, ambas–
sadeur de S. M . I. Guillaume II fait des
observations ; certes i l est désireux que le
projet Rouvier aboutisse, mais encore
faut-il que ne soit pas à l'insu de l'Alle–
magne; cela veut dire, selon le
Figaro,
qu'un syndicat allemand s'est formé pour
présenter un contre-projet à celui de
M. Rouvier et fait tous ses efforts pour le
faire accepter par la Turquie en opposant
le Palais à la Porte.
Cela se pourrait terminer, comme l'af–
faire du chemin de fer de Bagdad par
quelque combinaison savante où les finan–
ciers allemands trouveraient leur compte
en même temps que les financiers français,
avec le concours de quelques confrères
anglais, belges et austro-hongrois. Ainsi
survivraient, pour quelque temps, au détri–
ment des populations de l'empire, le régime
hamidien et l'exploitation de la Turquie
par la finance internationale.
ETUDIANTS GRECS HAMIDOPHILES.
Tandis
que leurs camarades arméniens et macé–
doniens de Genève témoignent en toute
occasion leur mépris et leur haine à l'égard
du Sultan, les étudiants grecs, ou mieux
quelques étudiants grecs accablent Sa
Sanglante Majesté de télégrammes loya–
listes. En retour, Hamid leur accorde,
comme disent les journaux turcs, de pré–
cieuses faveurs et décorations; et on peut
lire dans
YIkdam
ou dans le
Servet
des
notes telles celle-ci :
En récompense des témoignages de fidé–
lité dont dernièrement les étudiants grecs à
Genève ont fait preuve, Sa Majesté le Sultan
a bien voulu nommer médecin de l'Hôpital
Hamidié, M . le docteur Aristide Papadakiss,
avec un appointement de mille piastres.
Sa Majesté a également offert la décoration
de Médjidié de cinquième ordre à M. Nicolas
Jénnaroponlos, correspondant de
Takhydro-
mos
et aux frères Kalévra, étudiants en mé–
decine. Chacun de ces derniers recevra aussi
un cadeau de 20 livres; et une fois leurs
études achevées, ils seront appelés en fonc–
tion dans l'un des hôpitaux du gouverne–
ment. Les décorations et la somme furent
envoyées du palais, l'autre jour, au Patriar–
cat grec.
Il fut un temps où les Hellènes don–
naient leur fortune et leur vie pour l'indé–
pendance; i l s'en rencontre maintenant
qui sollicitent et quémandent les pensions
hamidiennes; ceux-ci apparemment, autre–
fois, n'eussent pas fait partie des hétairies
nationales; ils auraient renié Ypsiianti,
Botzaris, Canaris et Odysseus, et se fussent
rangés à côté des phanariotes « fidèles »
aux oppresseurs.
ARRESTATIONS, CONDAMNATIONS ET DÉCO–
RATIONS.
A u commencement du mois, un
officier turc et un fonctionnaire civil qui
avaient commis le crime d'entrer dans la
maison d'un diplomate étranger furent, à
leur sortie, appréhendés par une bande de
policiers et jetés en prison. Peu après,
sous inculpation de menées révolutionnai–
res, un grand nombre de fonctionnaires et
d'officiers ont été également arrêtés. Leur
interrogatoire a eu lieu en grande solen–
nité; assistaient à cette cérémonie S. E .
Chefik Pacha
[
Arab-Chefik),
ministre de la
police, S. E. Fehmi Pacha, chef de la
police secrète, S. E . Tcherkes Pacha,
aide de camp de S. M. I. le sultan Abd -
ul-Hamid, très clément et très miséricor–
dieux. On ne dit pas que les pauvres dia–
bles arrêtés aient pu faire des révélations
importantes, malgré les mauvais traite–
ments auxquefs ils furent soumis; mais i l
est certain que l'opération fut avantageuse
aux mouchards bien avisés, sinon aux
finances turques.
Au même moment, des agents provoca–
teurs ont déposé dans un wagon de la
ligne de Sirkedji-San-Slephano des pla–
cards séditieux où i l était mal parlé du
Sultan. Il leur fut aisé ensuite d'envahir
le wagon, et à la station de Yedi-Koulé,
ils arrêtèrent quatre Arméniens, dont le
fils du négociant connu Papazian et aussi
de malheureux jardiniers bulgares qui
revenaient de leur travail.
Voici pour les dernières semaines, d'a–
près les journaux turcs, le bilan des con–
damnations :
Une note officielle parue dans la
Gazette
des Tribunaux,
annonce que Ibrahim Edhem,
ex-second greffier du tribunal de première
instance de Milas, accusé de faire partie des
perturbateurs, a été jugé par défaut par la
cour criminelle.
Ayant été reconnu coupable, i l a été con–
damné à la détention perpétuelle dans une
enceinte fortifiée, à la perte de ses droits
civiques et à la confiscation de ses biens.
— 11
ressort d'un communiqué du procu–
reur impérial de la cour criminelle que Cher-
vani Zadé Mahmoud Tahir, étudiant à l'école
militaire, accusé de s'être sauvé à Genève
dans des intentions séditieuses, a été jugé
par défaut. Sa culpabilité ayant été établie,
il a été condamné à la détention perpétuelle
dans une enceinte fortifiée, à la perte de ses
droits civiques et à la confiscation de ses
biens.
La
Gazelle des Tribunaux
annonce que
Hassan Riza, de Philippopoli, qui est en
fuite, et qui vient d'être jugé par défaut par
la cour criminelle aété reconnu coupable de
s'être affilié à des perturbateurs. 11 a été en
conséquence condamné à la détention perpé–
tuelle dans une enceinte fortifiée, à la perte
de ses droits civiques et à la confiscation de
ses biens.
La
Gazelle des Tribunaux
annonce que le
sieur Zéki de Tachlidja, accusé de s'être
sauvé à l'Étranger dans des intentions sédi–
tieuses, a été jugé par coutumace. Il a été
condamné à la détention perpétuelle dans
une enceinte fortifiée, à la perte de ses droits
civiques et à la confiscation de ses biens.
Nous ne saurions mieux faire que de
mettre en regard des arrestations et des
condamnations la liste des « distinctions
honorifiques » infligées par S. M . I. à quel–
ques diplomates, médecins, vétérinaires
et employés des Postes français.
Ont été accordés :
Le grand cordon de l'ordre du
Médjidié
à
M. Rouet, premier drogman de l'ambassade
de France.
La 2e classe du même ordre (grand offi–
cier) à M. C. Piccioni, chef adjoint du cabinet
du ministère des affaires étrangères, M. Jul-
lemier, chef du bureau du personnel.
La 3e classe de
YOsmanié
(
commandeur),
à MM. Martin et Prévost, secrétaires de l'am–
bassade de France.
La 3
e
classe du
Médjidié
(
commandeur) à
M. Maruéjouls, à M. le comte de Salverte,
secrétaire de l'ambassade de France;
A M. Chambry et à M. de Saunhac, inspec–
teurs généraux des haras français ;
A MM. Gerzonnet et Cloître, chef et sous-
chef du bureau du ministère de la Marine;
A M. le D' Dubar, médecin à l'Administra–
tion des Postes et dos Télégraphes.
La 4e classe de
YOsmanié
à M. Herfort,
attaché au cabinet du ministre des Affaires
étrangères.
La 4e classe du
Médjidié
(
officier) à M.
Maunoury, vétérinaire des haras français ;
A M. Laporte, élève consul en disponibilité;
A M. de La Croix, du ministère des Affaires
étrangères ;
Fonds A.R.A.M