tribunal de La Haye. Voilà un commence–
ment plein d'espoir: comme une étoile loin–
taine parfois obnibuléc, mais toujours bril–
lante, l'idée de paix aura un jour prochain.
M. Jacques NOVICOW
M. Novicow (-Russie) dit que bien qu'il
appartienne à un grand pays—le plus grand
de tous — il n'en sera pas moins bref. 11 se
contentera de condamner la politiquede Pitt
et de ses successeurs : au commencement du
siècle et, en 1878, sous prétexte de sauve–
garder le dogme de l'intégrité de l'Empire
ottoman, l'Angleterre s'est opposée aux ré–
formes nécessaires en Turquie ; elle a tenu,
il est vrai, une attitude différente, mais alors
«
la Sainte Russie » a fait, à son tour ce
qu'avait fait jadis « la pieuse Angleterre»,
par la crainte absurde de voir se former une
Arménie indépendante. Et à propos du dé–
voué M. Ducommun, représentant de la
Suisse, que l'ordre alphabétique appelle à se
faire entendre après lui, M. Novicow fait un
éloge éloquent de la Confédération helvé–
tique, pays de concorde et d'harmonie paci–
fique.
Nous devons ajouter que parmi les
membres du Congrès qui n'ont pas pris
la parole, les atrocités arméniennes ont
été appréciées durement : M '
m e
Séverine,
qui fut des premières en France à rompre
le silence imposé, M . Frédéric Passy,
M . Moneta, le comte de Santa Rosa,
MMs Fox Bourne, Green, Perris en parti–
culier, dans des entretiens privés, ont
témoigné toute de leur indignation; et
lors de la réception au Palais, le prince
Albert de Monaco a bien voulu dire au
délégué des Etudiants arméniens qu'il
«
connaissait malheureusement l'effroyable
situation tant de l'Arménie que de la Ma –
cédoine et que de telles horreurs feraient
presque désespérer de l'humanité et de la
civilisation. »
R.
Le Déjeuner de " Pro Armenia "
Le
Pro Armenia
avait profilé du passage
à Paris des arménophiles anglais, M . Atkin,
secrétaire de
YArmenian Relief fund
et
sir Collier, fils de lord Monktown, membre
do la Chambre des lords, pour réunir en
un déjeuner intime, un certain nombre
d'arménophiles éminents de tous les pays.
Le déjeuner, qui a eu lieu samedi 5 avril,
chez Marguery, a été l'occasion d'une
manifestation importante pour la cause
arménienne. Des circonstances diverses
—
élections françaises, tenue du Congrès
delà Faix et vacances de Pâques —avaient
éloignés de Paris la plupart des membres
de noire Comité de rédaction, entre autres
nos amis Clemenceau, Jaurès, Anatole
France, de Pressensé, el notre rédacteur
en chef, Pierre Quillard. Cependant le
succès de la réunion organisée à l'impro-
viste, fut aussi complet que l'on pouvait
le désirer.
Les convives étaient l'éminent critique
danois Georges Brandès, MM . Marcel
Sembat, député de Paris, de Boberty, pro–
fesseur à l'Université de Bruxelles, le
puissant artiste Steinlen, MM . Gambaroff,
ex-professeur à l'Université de Moscou,
Charles Longuet, ancien conseiller muni–
cipal de Paris, Crawford, correspondant
des
Daily News,
de Londres, Collins, cor–
respondant du
Sun,
de New-Vork, Fuchs,
correspondant de
Lokalanzeiger,
de Berlin,
Edgard Milhaud, rédacteur à la
Petite
République,
Keldjian, secrétaire du Père
Charmotant, M
m e
Collins, l'épouse du
correspondant du
Sun
et la petite-fille du
grand agitateur irlandais O'Connor.
Le docteur Loris-Môlikoff présida, as–
sisté de Jean Longuet, secrétaire de
Pro
Armenia.
Tout d'abord, il fut donné lecture
des lettres et télégrammes d'adhésion xjue
venait de recevoir le président.
C'était la lettre suivante de Pressensé :
Le 4 avril 1902.
Cher Monsieur,
J'aurais été particulièrement heureux de
pouvoir prendre part à la réunion des amis
de l'Arménie et témoigner une fois de plus
la sympathie profonde que je ressens pour
cette grande cause. Une obligation impé–
rieuse m'appelle à Lyon. Tout en regrettant
vivement que ce contretemps me prive du
plaisir de rencontrer des hommes de toute
nationalité et venus de tous les points de
l'horizon et que rassemble un amour com–
mun pour une nation martyr, je me console,
en espérant que, du moins, je ne vous ferai
jamais défaut chaque fois qu'il s'agira d'agir
pour votre pays et, soit par la plume, soit
par la parole, dans la presse ou dans des
conférences comme celle que j'ai eu récem–
ment l'honneur de donner à Genève à l'Asso–
ciation des Etudiants arméniens d'Europe,
de plaider pour vos droits et contre votre
tyran. Le
Pro Armenia
que rédige avec tant
de dévouement et de talent notre ami Pierre
Quillard et à la direction duquel je me féli–
cite de participer avec des hommes comme
Anatole France, Clemenceau, Jaurès et Ro-
berty, n'a, par suite de diverses circonstances,
pas la fortune d'être représenté comme i l
aurait dû l'être en ce jour : vous me per–
mettrez d'affirmer en son nom que sa rédac–
tion tout entière est de cœur avec quiconque
travaille, lutte ou souffre pour l'Arménie.
Croyez, je vous prie, cher Monsieur, à mes
sentiments tes plus dévoués.
Francis de PRESSENSÉ.
Relenu par le Congrès de la Paix, à
Monaco, Pierre Quillard avait envoyé de
son côté, le télégramme que voici :
Saluez cordialement, au nom de
Pro Ar–
menia,
nos amis anglais fidèles à la glorieuse
mémoire de Gladstone.
Pierre
QI'ILLAUD.
De MM . d'Estournelles de Constant,
Denys Cochin, député, M . Paul Violet, de
l'Institut, le docteur Loris-Mélikofl avait
avait reçu les télégrammes suivants :
Fidèle à la grande cause de la pitié pour
les opprimés, je suis plus que jamais cordia–
lement avec vous par la pensée.
D'ESTOURNF.LLE de CONSTANT.
Suis bien touché aimable invitation, mais
ne puis venir Paris avant lundi, mille regrets
et meilleurs vœux.
Denys
COCHIN.
Empêché, envoie regrets et sympathies
ardentes pour l'Arménie.
VIOLET.
Les deux fils de Mahmoud-Pacha, les
princes Loutfoullah et Sabaheddin, avaient
aussi exprimé leur regret de ne pouvoir,
par suite d'engagements antérieurs, venir
témoigner « de leur sympathie pour la
population arménienne de l'empire otto–
man ».
MM . Lavisse, de l'Académie française et
Victor Bérard, de la
Revue de Paris,
s'excusaient de ne pouvoir s'associer par
leur présence à cette manifestation, à l a –
quelle ils ont tenu à adhérer pleinemenl.
Le Congrès des Etudiants arméniens
d'Europe, réuni à Genève, avait également
envoyé un télégramme de sympathie.
Au dessert, notre collaborateur E . de
Roberty, adressa à nos amis d'Angleterre
le salut du Comité de rédaction de
Pro
Armenia.
Au nomdes arménophiles anglais,
M . Atkin fit en quelques phrases concises
et énergiques, l'exposé de la question
arménienne. Il montra la nécessité pour
tous ceux qui sympathisaient avec le
peuple-martyr de faire taire leurs diffé–
rences d'opinions politiques. Il insista
longuement sur la grandeur de ce spec–
tacle d'hommes venus des extrémités de
l'horizon politique, unis pour la cause de
l'humanité et dont le rapprochement des
noms de Marcel Sembat et de Denys Co–
chin, était pour la France une éclatante
illustration.
De même aussi en Angleterre-, l u i qui
était un libéral avancé, se trouvait d'accord
dans cette question avec des conservateurs
convaincus. Mais, déclara M . Atkin, i l ne
suffît pas que les arménophiles de tous les
pays se rencontrent ainsi dans une même
pensée.
Il est nécessaire qu'ils joignent leurs
efforts et que, par leur organisation, ils
précisent leurs moyens d'action.
M . Atkin exhorte les Arméniens, eux
aussi, à s'unir tous pour la délivrance de
leur malheureuse race.
En terminant, i l boil aux rédacteurs de
Pro Armenia
et à tous les défenseurs de ta
cause arménienne. M . Marcel Sembat ,
député de Paris, remercie tout d'abord
Fonds A.R.A.M