cm
          
        
        
          A R M E N I A
        
        
          en alléguant qu'une nation isolée ne
        
        
          peut intervenir et qu'une entente
        
        
          européenne est nécessaire. C'est à
        
        
          cette entente que nous travaillerons à
        
        
          Bruxelles.
        
        
          Mais i l faut, dès maintenant, prévoir
        
        
          et réfuter une objection courante fort
        
        
          en honneur auprès de ceux qui cher –
        
        
          chent par tous les moyens à éluder
        
        
          l'application du traité de B e r l i n ; c'est
        
        
          l'argument de la population qui se peut
        
        
          résumer ainsi : i l y a des Arméniens,
        
        
          il n'y a pas d'Arménie.
        
        
          L'argument est d'autant plus dange–
        
        
          reux qu'il présente une apparence
        
        
          scientifique : les Arméniens, dit-on,
        
        
          ne sont en majorité nulle pa r t ; partout
        
        
          ils sont noyés dans des masses hété–
        
        
          rogènes par la race, la langue et la
        
        
          religion. Dans un
        
        
          
            Livre Jaune
          
        
        
          français
        
        
          qui n'indique pas ses sources, on trouve
        
        
          l'évaluation suivante pour la Turquie
        
        
          d'Asie :
        
        
          Population totale 14.856,118
        
        
          Arméniens . . .
        
        
          1.475.011
        
        
          Le s statistiques du patriarche Nersès
        
        
          communiquées au Congrès de Be r l i n
        
        
          donnaient les chiffres suivants :
        
        
          Turquie d ' Europe : 400.000 Armé–
        
        
          niens.
        
        
          Asie-Mineure et Cilicie : G00.000.
        
        
          Petite Arménie (vilayet de S i vas et
        
        
          Sandjak de Kaisarieh) : 670.000.
        
        
          Grande Arménie (Erzeroum, V a n ,
        
        
          Moush , B i t l i s , No r d de Diarbékir,
        
        
          Segherd) : 1.330.000.
        
        
          Total : 3.000.000.
        
        
          L a statistique du patriarche Nersès
        
        
          semble beaucoup plus proche de l a
        
        
          vérité que celle des diplomates euro–
        
        
          péens et on peut établir que ceux-ci
        
        
          commettent une double erreur.
        
        
          1
        
        
          ° L e chiffre total de la population
        
        
          arménienne est plus considérable qu'ils
        
        
          ne le prétendent ;
        
        
          2
        
        
          ° Cette population forme en cer–
        
        
          taines régions de la Turquie d ' As i e l a
        
        
          majorité absolue.
        
        
          1
        
        
          ° CH I F F R E TOTAL DE L A P O P U L A T I ON .
        
        
          Le s sources statistiques sont à peu
        
        
          près nulles. Ce sont :
        
        
          fl) L e Salnameh, almanach officiel
        
        
          turc, incomplet et inexact ;
        
        
          
            b)
          
        
        
          Le s registres du
        
        
          
            Noufouz
          
        
        
          
            idaressi
          
        
        
          '
        
        
          bureau de dénombrement), recense–
        
        
          ment par sexe, sans tenir compte de l a
        
        
          confession religieuse qu i tient lieu de
        
        
          nationalité en Turquie ;
        
        
          c) Le s registres des Eglises et pa –
        
        
          roisses, qui servent à établir l a statis–
        
        
          tique patriarcale : mais celle-ci n'est
        
        
          point publiée et dans les pièces remises
        
        
          au gouvernement turc, les chefs des
        
        
          communautés seraient plutôt portés à
        
        
          diminuer le chiffre de la population
        
        
          pour alléger l'impôt. Pa r exemple,
        
        
          l'impôt militaire est exigible de tous
        
        
          les mâles non musulmans à partir de
        
        
          leur majorité ; mais i l est en réalité
        
        
          perçu dès l a naissance, ou même avant,
        
        
          les percepteurs affirmant volontiers que
        
        
          toute femme grosse accouchera d'un
        
        
          garçon. Dans ces conditions, on d i s s i –
        
        
          mule assez souvent le nombre des
        
        
          naissances.
        
        
          Ma i s même en prenant pour point
        
        
          de départ les chiffres officiels, i l faut
        
        
          leur faire subir une rectification i m –
        
        
          portante. Ils sont calculés d'après le
        
        
          nombre des maisons. Or , l a maison
        
        
          musulmane est beaucoup moins n om - I
        
        
          breuse que l a maison arménienne ; elle
        
        
          ne comprend guère plus de cinq per–
        
        
          sonnes, le régime du harem faisant
        
        
          sortir le fils adulte de la maison pater–
        
        
          nelle, lors de son mariage. L a maison
        
        
          arménienne, au contraire, surtout dans
        
        
          l'intérieur, est de type patriarcal ; c'est
        
        
          parfois une petite cité qui peut compter
        
        
          jusqu'à quarante ou cinquante membres
        
        
          soumis à l'autorité du père de famille ;
        
        
          mais on sera très près de l a vérité en
        
        
          s'arrêtant à une moyenne de 8 à 10
        
        
          têtes : en 1828, 10.000 familles armé–
        
        
          niennes émigraient d ' Er z e r oum en
        
        
          Rus s i e ; elles formaient un total de
        
        
          96.000
        
        
          âmes, soit 9,6 en moyenne par
        
        
          famille. Il est donc légitime de rectilier
        
        
          les chiffres ordinaires en doublant
        
        
          presque le total de l a population ar–
        
        
          ménienne par rapport à l a population
        
        
          musulmane.
        
        
          Il faut considérer en outre que les
        
        
          statistiques officielles tendent à d i m i –
        
        
          nuer encore le nombre des Arméniens
        
        
          et qu'elles sont plus ou moins r epr o –
        
        
          duites par les auteurs les plus cons–
        
        
          ciencieux ; c'est ainsi que dans l'œuvre
        
        
          relativement bien documentée de Vital
        
        
          Cunlet,
        
        
          
            La Turquie d'Asie,
          
        
        
          i l s'est
        
        
          glissé de graves inexactitudes comme
        
        
          celle-ci : pour tout le caza de K i a h d a ,
        
        
          l'auteur donne :
        
        
          Popu l a t i on totale. . . 13.000
        
        
          Arméniens
        
        
          29
        
        
          Tandis qn'en réalité un seul village
        
        
          du caza A l b i c he renferme 72 familles
        
        
          arménionnes, soit une population de
        
        
          450
        
        
          à 500 personnes au moins.
        
        
          2
        
        
          ° RÉPART I T I ON GÉOGRAPHIQUE ET SEC–
        
        
          TIONNEMENTS ARBITRAIRES.
        
        
          —
        
        
          -
        
        
          Dans les
        
        
          pays correspondant à l'ancien eyalet
        
        
          d ' Er z e r oum et aux anciens vilayets
        
        
          d ' Er z e r oum, Va n , He kk i a r i et Mo u s h
        
        
          qui représentent à peu près, sauf les
        
        
          parties occupées par la Russie et l a
        
        
          Perse, le territoire ancien de la grande
        
        
          Arménie, l'élément arménien, même
        
        
          selon la division présente, forme la
        
        
          minorité la plus forte et la plus homo –
        
        
          gène au milieu de races diverses où
        
        
          les Kurdes viennent seulement en se–
        
        
          conde ligne ; et n'étaient certains sec–
        
        
          tionnements arbitraires, ils formeraient
        
        
          la majorité absolue. Pa r exemple, les
        
        
          statistiques officielles donnent pour le
        
        
          vilayet de Va n :
        
        
          Mu s u lman s . . 241.000 (dont-210.000 Kurdes)
        
        
          Arméniens..
        
        
          79.998
        
        
          Or , sur ces 79.998 Arméniens,
        
        
          64.998
        
        
          sont groupés dans le seul
        
        
          saudjaki de V a n qui ne contient que
        
        
          61.000
        
        
          mu s u lman s ; mais ils" ont été
        
        
          noyés dans la masse musulmane de
        
        
          l'ancien vilayet de He k k i a r i , adjoint à
        
        
          celui de Van par sectionnement a r b i –
        
        
          traire. L a population de He k k i a r i se
        
        
          répartit comme suit :
        
        
          Musu lmans
        
        
          180.000
        
        
          Arméniens
        
        
          15.000
        
        
          Enc o r e ces 15.000 Arméniens sont-
        
        
          ils cantonnés dans les cazas de Mn l i -
        
        
          moud i , Mamo u r e t - u l - l l ami d , Elbaçk,
        
        
          Nordouz, Djoulamérik, Ghever, situés
        
        
          à l'est de Va n , alors qu ' i l n'y en a pas
        
        
          un seul dans les cinq cazas méridio–
        
        
          naux de He k k i a r i , Chemdinan, T c ha l ,
        
        
          Beït-ul-Chab, Ouraman, Amadié.
        
        
          C'est du reste dans les régions où
        
        
          les Arméniens sont en majorité que les
        
        
          massacres et vexations s'exercent avec
        
        
          le plus de méthode. Il en est ainsi
        
        
          dans la plaine de Mou s h :
        
        
          Arméniens
        
        
          35.000
        
        
          Musu lmans
        
        
          21.250
        
        
          Fonds A.R.A.M