i " Nous repoussons toute solidarité entre
les peuples ottomans et le régime sous lequel
nous vivons depuis vingt-cinq ans, régime
d'oppression, l'unique source des méfaits qui
se commettent dans l'Empire et qui soulè–
vent l'indignation de l'humanité tout en–
tière ;
2
0
Nous entendons établir entre les diffé–
rents peuples et races de l'Empire une en–
tente qui assurera à tous, sans distinction,
la pleine jouissance de leurs droits reconnus
par les Hatts impériaux et consacrés par les
traités internationaux, leur procurera les
moyens de satisfaire d'une manière com–
plète leur légitime aspiration de prendre part
à l'administration locale, les mettra sur un
pied d'égalité au point de vue des droits
comme des charges incombant à tous les
citoyens, leur inspirera le sentiment de fidé–
lité et de loyalisme envers le trône et la dy–
nastie d'Osman, qui seule peut maintenir
leur union ;
3
° Nous nous appliquerons en toute cir–
constance à faire converger les vœux de tous
les peuples ottomans et les efforts de tous
les patriotes :
a)
maintien de l'intégrité et de
l'indissolubilité de l'Empire ottoman;
b)
ré–
tablissement de l'ordre et de la paix à l'inté–
rieur, condition essentielle du progrès ;
c) respect des lois fondamentales de l'Em–
pire, notamment de la Constitution promul–
guée en
1876,
qui en est incontestablement la
partie la plus importante et qui offre la ga–
rantie la plus sûre et la plus précieuse des
réformes générales, des droits et des libertés
politiques des peuples ottomans contre l'ar–
bitraire ;
4
°
Nous proclamons notre ferme résolution
de respecter les traités internationaux et par–
ticulièrement le traité de Berlin, dont les dis–
positions, en ce qui concerne l'ordre intérieur
de la Turquie, devront être étendues à toutes
les provinces de l'Empire.
CONCLUSION
Tels étant les principes sur lesquels l'en–
tente est établie, nous constituons un comité
permanent qui s'efforcera de faire prévaloir
ces principes et se livrera aux démarches
nécessaires, auprès des puissances signa–
taires du traité de Paris de l'année i856 et
du traité de Berlin de l'année
1878,
afin d'ob–
tenir leur concours morai et une action bien–
veillante de leur part, ayant pour objet la
mise en exécution des engagements interna–
tionaux stipulant l'ordre intérieur en Tur–
quie, ainsi que de tous les actes internatio–
naux découlant des susdits traités et leur
adaptation à tous les vilayets de l'Empire,
de la manière la plus profitable à chacun
d'eux.
Le Congrès a ensuite voté la déclara–
tion suivante :
Les représentants des peuples de l'Em–
pire Ottoman, qui ont pris part au Congrès
ouvert le
4
février
1892
à Paris, après avoir
pris connaissance des déclarations ci-dessus,
protestant contre le régime actuel de la
Turquie,
S'engagent à travailler en commun en
vue :
l° De transformer le présent régime de
liberté et de justice tel que l'assurerait le
rétablissement de la Constitution ;
2"
De rappeler aux Puissances Européen–
nes qu'il est de leur devoir et de l'intérêt gé–
néral de l'humanité de faire exécuter les
clauses des traités et actes internationaux
intervenus entre elles et la Sublime Porte,
de manière à en faire profiter toutes les par–
ties de l'Empire Ottoman.
L'accord a été complet entre l a grande
majorité des Ottomans de toutes nationa–
lités et les Arméniens présents au Congrès
sur l'urgence de réclamer des Puissances
l'exécution des engagements stipulés par
les traités et actes internationaux en fa–
veur de quelques-unes des provinces de
la Turquie d'Europe et d'Asie dont les
Ottomans voudraient que toutes pussent
profiter.
D'autre part, les Arméniens, tout en
déclarant qu'ils sont prêts à collaborer
à toute action ayant pour but de transfor–
mer le régime actuel, ont fait remarquer,
pourtant, qu'en tant que délégués des
Comités Arméniens, constitués dans le
but d'exécuter le programme précisé dans
leur présente déclaration au Congrès, ils
n'ont pas qualité pour se prononcer sur
le mode de réformes générales de l'em–
pire, mais qu'ils ne sont nullement hos–
tiles à l'établissement d'un régime central
constitutionnel, qui respecterait les for–
mes spéciales et locales, prévues par le
traité de Berlin et les actes internationaux
qui en découlent, pour les provinces ha–
bitées par les Arméniens et particuliè–
rement désignées par lesdits Traités et
actes.
Les membres ottomans du Congrès,
parmi lesquels les Grecs et les Albanais
qui y ont participé, ont déclaré, de leur
côté, à une grande majorité, que l a diver–
gence de vues qui s'est produite sur ce
point particulier, ne les empêcherait nul–
lement de rechercher les remèdes les plus
efficaces aux maux dont souffrent les A r –
méniens et à poursuivre :
i " L'accomplissement des vœux légiti–
mes des Arméniens relativement à l'orga–
nisation de l'administration locale des
provinces qu'ils habitent et de toutes les
autres provinces ;
2
0
L'établissement d'un gouvernement
central s'appuyant sur les idées libérales
et qui serait l a meilleure garantie du
maintien des droits nationaux, comme du
fonctionnement régulier des administra–
tions provinciales et dont les Arméniens
bénéficieraient au même titre et dans la
même mesure que tous les peuples de
l'Empire.
NOUVELLES D'ORIENT
E N MACÉDO I NE .
Le gouvernement de
S. M . I. Abd - u l -Hami d ou ses représen–
tants officieux « les personnes interpo–
sées », comme écrit M . Francis de Pres–
sensé, continuent en Macédoine l'œuvre
de massacre, de pillage et d'éviction. Mais
les révolutionnaires macédoniens répon–
dent par des représailles sanglantes aux
violences et assassinats impériaux.
C i le bilan des dernières semaines.
Monastir.
Le
10
janvier, trois Turcs,
déguisés en gendarmes, sont entrés dans
le village de Djavan ; au nom du mudir de
P r i b i l , ils ont arrêté :
Momi r Iancouloff,
Risto Stoyanoff,
Tané Stépanoff.
Le soir, i l s emmenèrent leurs prison–
niers et les massacrèrent à quelque dis–
tance du village. Les gens de Djavan, par
acquit de conscience, ont porté plainte.
Vodena.
A l a manière des aghas
kurdes en Arménie, certains beys de Ma –
cédoine usurpent les terres, forêts et biens
des villageois environnants. Karaman-
bey accapara ainsi toutes les terres de
Kroutcha. Puis l'ambition l u i vint de
s'annexer encore le village de Rossilo.
Le seul homme qui l u i pût faire opposition
était Toma Vlaka; i l le tua donc, s'empara
de ses champs, et ensuite de ceux qui ap–
partenaient aux autres paysans de l'en–
droit. I l y fit construire un château-fort;
de là i l pille et rançonne à son gré. Les
gens de Rossilo ont porté plainte.
Dibra.
Le gouverneur a quitté la
place, laissant les rênes libres aux deux
puissants brigands Chakir bey et Nouri-
Pousticowski qu i envoient leurs hommes
dans les villages pour y enlever ce qu'a
pu oublier de prendre le fisc hamidien.
Les nommés Damyan Arsoft et Protché-
Dameff ont été capturés par la bande et
relâchés contre forte rançon.
Rossoky.
Le village fut incendié, le
i5 novembre
1 901 ,
par Seferim Sefer.
Celui-ci s'en alla travailler ailleurs ; mais
i l fut aussitôt remplacé. Le
19
janvier, à
la rentrée d'une procession — c'était fête
du rite orthodoxe — Me t - A l i a -Ka r d i ns k i
et cinq des siens barrèrent les portes de
l'église et ne se retirèrent qu'après avoir
perçu une somme assez importante.
Le
21
janvier, K i ame l Dotz, fils d'un
père illustre, Saïd Dotz, s'installa avec
quatre de ses compagnons chez Eftem
Sbrinoff. Le lendemain i l apprit que Ra –
phaël Neucoff était nouveau marié et s'alla
installer chez l u i , dans l'idée de prendre
sa femme : Neucoff put s'enfuir à temps.
Le soir, pour se distraire, K i ame l Dotz
incendia l a maison de Karatheodovi ; le
Fonds A.R.A.M