D E U X I È M E A NN É E .
N ° 5.
Le numéro : France, 4 0 cent. — Etranger : 5 0 cent.
a5 J A N V I E R
1 9 0 2
Pro Armen i a
Rédacteur en chef :
P i e r r e
Q U I L L A R D
Adrssser
tçut ce ïui concerne la direction
à M. Pierre Quillard
Î O , r u e N o l l e t ,
P a r i s
A B O N N E M E N T S :
France
8 »
Étranger
10 »
paraissant le 10 et le 25 de chaque mois
C O M I T É D E R É D A C T I O N :
G. Cl emenceau, Anatole France , Jean Jaurès • ^ • ^^^
^r^^^ixœxtxœœKxo*
Franc i s de Pressensé, E . de Roberty
Pro Armenia
est en vente chez les libraires et dans les principaux kiosques de Paris.
Secrétaire de rédaction:
J e a n
L O N G U E T
Vendredi
de i l h. à midi, 17, rue Cujas
ADMINISTRATION : .
Société nouvelle de Librairie
et d'Édition
(
LibrairieG.
BELLAIS)
1 7 ,
r u e C u j a s ,
P A R I S
TÉLÉPHONE : 801-04
S O M M A I R E
Déclarations du chef révolutionnaire
A n l r a -
n
i k (•*•).
' .
L a Quinzaine
(
P I E R R E Q U I L L A R D ) .
L'Interpellation du 20 j a n v i e r (compte r e n d u
in extenso).
Nouvelles d'Orient : E n Macédoine, — Ma n d a t
d'arrêt contre Ma hm o u d pacha. — Autres
mandats d'arrêt.
(
P .
Q.)
Documents : L'Arménie avant les massacres
(
fin)
(
E.-J.
D I L L O N ) .
LA QUINZAINE
L e 14 décembre 1901, M . Delcassé,
répondant à M . Ma r c e l Sembat, avait
r e c onnu que les lettres et les d o c u –
ments cités à l a tribune par c e l u i - c i ,
d'après
Pro Armenia,
contenaient
incontestablement une grande part de
vérité ; mais i l n ' en v ou l a i t pas faire
état, parce que , d i s a i t - i l , « ceux qu i
font rémunération de ces massacres
ne les connaissent que pa r des récits
qu'ils n'ont pu eux-mêmes c o n –
trôler » .
Le 20 j anv i e r 1902, M . Delcassé,
répondant à M . Gustave Rouane t q u i
apportait contre le sultan et ses c om –
plices de tout o rdr e les mêmes ac cusa –
tions, plus précises encore et plus
détaillées, s'est abstenu d'en dénier ou
d'en contester sur aucun po i nt l a p a r –
faite exactitude.
Do n c pour le passé, même en l ' ab –
sence d ' un L i v r e Jaune, toutes les
atrocités c ommi ses , tous les faits allé–
gués sont acquis à l'histoire.
P o u r le présent, M . Delcassé a mo n –
tré, dans une partie de son d i s cour s ,
un étrange o p t imi sme . Les Arméniens,
selon l u i , auraient beaucoup profité de
no i r e i n t e r ven t i on à Constantinople et I
«
un Arménien d'Arménie » l u i a écrit
que les massacres avaient pu être arrê–
tés, grâce aux remont rances des am –
bassadeurs et à l a rup t ur e des r e l a –
tions d i p l oma t i que s avec le gouve rne –
ment français.
Qn ' i l y ait eu une rémission mome n –
tanée, le fait a été reconnu i c i même ;
et on n ' y contestera pas n o n plus, que
la présence des cuirassés à Mételin ait
contribué à cet heur eux effet. Ma i s l a
saison, le terrible hiver des hauts p l a –
teaux, avec des températures de 30 à
35
degrés au-dessous de zéro, n'est
pas pr op i c e aux massacres : c'est pour
H a m i d et ses égorgeursla mo r t e saison.
Cependant les i n f o rma t i ons les plus
récentes — M . Delcassé n'en peut nier
l'authenticilé certaine — disent que le
sultan n ' a renoncé que j u s qu ' au p r i n –
temps, à l ' ex t e rmi na t i on des Sas s ou –
niotes et que l'œuvre sanglante sera
reprise aussi dans l a plaine de Mo u s h ,
dès l a fonte des neiges.
I l est d'ailleurs contraire aux faits
que, même en h i ve r , l'Assassin chôme
entièrement. I l est très probable que,
le 20 j anv i e r , M . Delcassé n'avait pas
eu le l o i s i r de p r end r e connaissance
des dépêches publiées par les agences
.
européennes à l a date d u 18 et q u i ont
dû être communiquées aux diverses
chancelleries quelques j o u r s aupa r a –
vant, sous une f o rme sans doute p l us
alarmante. Ces dépêches, postérieures
àlaleltre de l'« Arménien d'Arménie»,
en
i n f i rmen t ma l heur eus ement le
témoignage : elles relatent l'affaire
d ' Ama t .
Ama t est u n impo r t an t village situé
à proximité de l a frontière turco-russe,
sur les dernières pentes de l ' A g h r i -
Da g h , à l'entrée de l a grande plaine
d ' Al as g l i e r d , non l o i n de Ha s d ou r ,
r endu célèbre par un massacre peu
anc i en . Le s soldats de l ' endr o i t ava i en t
jeté l eur dévolu sur l a fille d ' un n o t a –
ble Man o uk Séropian. Ils attaquèrent
une première fois l a ma i s on pour e n –
lever l a jeune fille ; ma i s les parents
avaient pu l'éloigner. Le s assaillants
r ev i nr ent le l end ema i n ; i l s r e n –
contrèrent de l a résistance; sur qu o i ,
ils tirèrent leurs sabres et blessèrent
de n omb r e ux Arméniens p a rm i les–
quels l ' onc l e de l a jeune fille. P o u r se
justifier, i l s prétendirent, c on t r a i r e –
ment à l a vérité, qu ' i l s étaient venus
réclamerune dette à Man o uk Séropian.,
Le s gens d ' Ama t demandent le retrait
de l a garn i s on .
Do n c , i l s'en faut de beaucoup que
l a pacification soit réelle en terre ar –
ménienne.
Toutefois M . Delcassé se refuse à
«
appeler l'attention de l ' Eu r o p e sur
la v i o l a t i on flagrante des engagements
pris par le sultan » , tout en manifes–
tant l'espérance p l at on i que que les
puissances y porteront d'elles-mêmes
leur attention.
L e motif allégué, c'est toujours qu ' on
risque ainsi de p r ovoque r une c on f l a –
g r a t i on générale. C'était l ' ar gument de
réserve de M . Ga b r i e l Hano t aux , quand
Fonds A.R.A.M