formément aux ordonnances locales et le
conduit au ministère de la police. Dans le
rapport Garabed est qualifié de « vaga–
bond dangereux ».
Kiskor,
en passant sur le pont de Ga-
lata, a salué un commissaire de police par
qui i l avait été arrêté un an auparavant.
Cette attitude semble louche et révolu–
tionnaire. Arrestation de Ki s ko r .
Dikran et Mihran
vont passer leur
j ou r né e à Tchipridji-Tchaïs. D i k r a n s'é–
loigne de quelques mètres pour uriner.
Un policier l'arrête. Mi h r a n survient et
s'informe. I l est arrêté à son tour. Vaga–
bonds dangereux.
Dikran,
tailleur, se rend un matin de
bonne heure au bazar pour y faire des
achats. Ar r i vé trop tôt, i l entre dans un
café en attendant l'ouverture du bazar.
Un agent à qui i l avait refusé de l'argent
l'aperçoit et l'arrête. Révolutionnaire dan–
gereux.
Garabed, Armienaz et Toross
faisaient
de la musique, vers huit heures du soir,
chez l ' un d'entre eux. U n agent, attiré par
le son de l'instrument, entre dans l a mai–
son et les arrête sous l'inculpation de com–
plot. Révolutionnaires dangereux.
Miguir et Garbiss,
marchands de pois–
sons, veulent installer leur éventaire de–
vant la boutique d'un épicier grec, qui
jette leurs poissons par terre. U n agent
appelé fixe d'abord à
4
o
piastres l'in–
demnité due aux Armé n i e n s et les invite
à venir au poste se faire payer. Dans l'in–
tervalle i l se ravise, touche de l'épicier un
pourboire de
20
piastres et quand Mi gu i r
et Garbiss viennent se faire payer, ils sont
arrêtés comme vagabonds dangereux.
Miguirditch et un autre Arménien
cau–
sent, assis devant la fenêtre. Passent deux
espions qui les aperçoivent, vont cher–
cher des agents et font a r r ê t e r les deux
hommes, sous prétexte que leur conver–
sation avait un caractère révolutionnaire.
A noter qu'aucun des deux espions ne
comprend l'arménien et que Miguirditch
avait refusé de l'argent à l'un d'entre eux.
L a liste pou r r a i t ê t r e p r o l o n g é e à
l ' i n f i n i . Qu a n d on songe que ces vexa –
tions continuelles s'exercent à Cons–
tantinople m ê m e , sous les yeux b i e n –
veillants des ambassadeurs e u r o p é e n s ,
i l est a i s é d ' imag i ne r ce q u i se passe à
l ' i n t é r i e u r de l'Anatolie, dans des v i l –
lages é l o i gné s des routes et, en h i ve r ,
r é e l l eme n t s é p a r é s du monde pendant
de longs mo i s , surtout si l ' on songe que
partout l a Bê t e Rouge entretient des
ém i s s a i r e s ou trouve des c o l l a bo r a –
teurs b é n é v o l e s pou r son œ u v r e de
tyrannie et de mo r t .
R.
TOAST DE SÉVERINE
A u Banquet du C o n g r è s de la I'aix
«
Je bois à toi, Armén i e torturée, cent
fois saignée, cent fois renaissante ; lais–
sée, par la lâcheté européenne, en proie
aux barbares — toi dont les femmes, à
Sassoun, préférèrent la mort à la honte
et se lancèrent dans l'abîme, leurs enfants
serrés contre leur sein nu ! »
Les Orphelinats Arméniens
A la suite d'une représentation dra–
matique organisée par M . ArchasTcho-
banian, sous le patronage de la
Ligue
des droits de l'homme,
et où notre
illustre collaborateur Anatole France
avait fait un éloquent appel à la cha–
rité française pour les orphelinats
a rmén i ens , une somme de trois mille
francs avait été transmise au patriar–
che Ormanian qui remercia en ces
termes :
«
Nous devons toujours implorer
la continuation des secours pour le
soulagement des orphelins et des veuves
et de tous les orphelins a rmén i ens dans
les provinces. »
Ce langage prudent et modé r é
semble excessif aux journalistes qui se
sont constitués en France les défen–
seurs du Grand Assassin et dépensent
un zèle tout chevaleresque à réhabili–
ter la touchante victime d'Yldiz ; ils y
relèvent tout au moins « une forme
malheureuse de rédaction qui fait
sous-entendre un appel en aide à des
détresses immenses et peut-être dissi–
mulées ».
Aucune rhétorique ne vaut des faits
et des chiffres précis. Nous nous con–
tenterons de donner les tableaux sta–
tistiques dressés par les soins du pa–
triarcat a rmén i en et que notre rédac–
teur en chef Pierre Quillard publia
l'an dernier dans
La Revue de Paris,
sans que personne fît alors la moindre
objection. Nous ferons observer qu'il
faudrait ajouter i c i les orphelinats de
Césarée, Erzeroum, Angora, And r i -
nople, Smyrne, institués par les com–
munau t és locales, ainsi que les orphe–
linats des missions étrangères catho–
liques ou protestantes, pour lesquels
les chiffres exacts nous font défaut.
ORPHELINATS OUVERTS AUX FRAIS
DU PATRIARCAT
Nombre Nombre
Dates
des or-
des
d'ou-
V i l l e s
phelins veuves
verture
Erzeroum. .
356
i32
j u i n
i8g5.
Van
. . . .
6.000 4 -
0 0 0
4
orpheli–
nats de déc.
1897
à sept.
1898.
B i t l i s . . . .
1.649
772
oct
1897.
Mouch . . . 6
.632
3.668
janv.
1898.
Di a r b é k i r . .
2.344
1.288
janv.
1898.
Kharpout. .
2.021
624
déc.
1897.
A r a p k i r . . .
2.102
863
mars
1898.
Aï n t a b . . .
536
125
sept.
1898.
O r f a . . . .
4.128
1.257
oct.
1897.
Marach. . .
4?
°
274
mars
1898.
S i v a s . . . .
1
.
o53
65
o
nov.
1897.
Malatia. . . i.853
837
Zeïtoun. . .
445
3
a5
Baïbourt . .
1.3
i5
45
o
avril
1898.
T c h i m i c h
Guézet . .
280
110
sept.
1898.
Tcharsand-
jak. . . .
220
170
août
1898.
Da v e n d é . .
5
o
19
j u i l .
1898.
Husniman-
sour . . .
60
21
sept.
1898.
VILLES OU IL N'A PAS ÉTÉ POSSIBLE ENCORE
D'OUVRIR DES ORPHELINATS
Nombre
Nombre
des or–
des
V i l l e s
phelinats
veuves
Eghin
I
.219
36
o
i . i 6 5
725
Erzindjan
975
3
i5
75
265
Amasia
55
o
23
o
K i g h i
523
180
D i v r i g
362
142
Tchinkanch-Adich .
335
3
oi
Adana
3
o3
i45
Segherd
i45
70
Chabin Ka r a kissar.
117
55
Hadjin
65
32
K i l i s
60
35
Keniagh. . . .
i5
10
Soit au total
38,278
orphel ins
et
18,670
veuves,
et si l ' on y ajoute
729
orphelins
recueillis et entrete–
nus par des particuliers,
39,007
or-
phelins.
Ce sont là des détresses
immenses
et
non
dissimulées;
mais elles n'atteignent
pas à l'horreur démesurée de la vérité
totale.
Fonds A.R.A.M