L a
Gazette de Cologne
ajoute que dans
divers pays européens, l'opinion publique
s'émeut et commence à croire à la néces–
sité de réformes en Turquie : « C'est au
gouvernement turc à ne pas accroître ce
mouvement par ses propres fautes. »
Non seulement des amis du premier de–
gré adressent ainsi à l'Assassin des aver–
tissements sévères ; mais ses propres su–
bo r donné s refusent d'accomplir plus long–
temps une déshonorante besogne. E n –
touré d'espions, las de tolérer les crimes
exécutés par les fonctionnaires du vilayet
sur les ordres directs de Constantinople,
le vieux va l i de Salonique Hadji Hassan
Helik pacha a donné sa démission : son
secrétaire Ibrahim eifendi avait été a r r ê t é
peu auparavant et conduit à Constanti–
nople par deux officiers de gendarmerie,
comme suspect de sympathie pour les
opprimés.
Le sucesseurde Hadji Hassan pacha est
Tewfik bey, ex-gouverneur du sandjak
de Salonique. L a population n'attend pas
sans crainte les nouveaux fonctionnaires
militaires ou civils qui vont l u i être en–
voyés par les soins de Sa Sanglante Ma –
jesté : ceux-ci n'étant point payés par le
gouvernement s'arrangeront pour faire
fortune en peu de temps, aux frais et
dommages de l'habitant et se montreront
plus rapaces que leurs prédécesseurs déjà
gavés.
Mais la crise qui bouleversait l a haute
administration de Salonique n'arrêtait
pas le cours de la justice impériale : sous
le gouvernement i n t é r ima i r e du muchir
Haïri pacha, qui gère le vilayet j u s qu ' à
l'arrivée de Tewfik bey, les « révolution–
naires » de K i l k i c h ont été jugés, le
9
mai :
huit d'entre eux ont été condamnés à sept
ans de travaux forcés, cinq à trois ans,
deux acquittés.
A Uskub, on s'est décidé à juger les
seize Bulgares de Nered, accusés du
meurtre du pappas grec Constantin, ar–
rêtés depuis octobre
1900.
Deux des incul–
pés sont morts en prison ; sur les quatorze
autres, treize ont été condamnés à deux
ans de travaux forcés, un acquitté.
Dans le vilayet de Monastir, trois ins–
titutrices et un commerçant de Monastir,
ainsi qu'un instituteur de Kr u s chéwo ,
ont été condamnés à un an de prison pour
avoir été trouvés possesseurs de livres
«
malséants ». Le secrétaire du métropo–
lite de Krcevo a été emprisonné. Enfin,
autour de Florina et de Kastoria, battues,
perquisitions et fouilles policières dans
les villages et dans la campagne pour re–
chercher le « comita » Marko.
A
L A F R O N T I È R E
S E R B E .
—
Hami d se
plaît à opposer les uns aux autres les
divers peuples de son empire et à provo–
quer le plus de meurtres possibles. Bi en
qu'il feigne en ce moment une sorte d'a–
mitié pour les Serbes, i l ne l u i déplaît
pas qu'on en tue quelques-uns. Le
26
av r i l
dernier, une quinzaine de Nizams pas–
sèrent l a frontière, près de Raschka, et
tuèrent le caporal serbe Raka Todorovics,
sous prétexte que celui-ci avait tiré sur un
oiseau de proie et qu'une altercation s'en
était suivie entre l u i et ses meurtriers. A
peine cette affaire était-elle réglée entre
les deux gouvernements, que des bandes
albanaises pa s s è r en t la frontière serbe
près d'Ormischte et tuèrent un paysan
serbe.
E N
E P I R E .
—
Tandis qu'officiellement le
sultan exprime au ministre de Grèce,
prince Mavrocordato, l'espoir que l'entre–
vue d'Abbazia est toute pacifique et pré–
sage simplement une entente de la Grèce
et de la Roumanie pour résister à l'in–
fluence slave, un excellent serviteur,
Petev effendi, mutessarif de Preveza, fait
arrêter et emprisonner à Janina le métro,
polite Kosma, coupable de propagande
panhellénique et de lèse-majesté pour
«
avoir récité la prière pour le r o i Georges
de Grèce avant l a prière pour le sultan ».
Le ministre de Grèce et l'ambassadeur
de Russie ont protesté au Palais contre
cette arrestation. S i lors de la guerre de
1897,
le r o i Georges n'avait point donné
des instructions spéciales à la marine hel–
lénique et empêché la prise de Preveza,
son r ep r é s en t an t n'aurait pas besoin au–
jourd'hui de se plaindre à Y l d i z ; et les
fâcheuses instructions données aux consuls
hellènes de Macédoine, mis au service de
la police turque, n'ont pu qu'encourager
encore l'insolence de la Bête.
L ' A E
F A I R E D E T I A R I .
—
E n réponse à
une question de M . Yo x a l l , député de
Nottingham, L o r d Cranborne, sous-secré–
taire d'Etat aux Affaires E t r angè r e s , a
donné les détails suivants sur l'affaire de
T i a r i :
L'agent consulaire anglais de Mossoul a
rapporté qu'à la lin d'avril
10.000
Kurdes s'é–
taient dirigés vers les montagnes de Tiari
dans l'intention de piller et tuer les chrétiens,
dont quinze avaient été massacrés sur l'heure.
L'ambassadeur de Sa Majesté à Constanti–
nople a aussitôt porté l'affaire à la connais–
sance de la Porte et a été informé que des
instructions formelles avaient été envoyées
aux autorités locales pour tenir les Kurdes en
échec et prévenir toute violence. Sir O'Con-
nor a été informé par le Gouvernement turc
qu'il existait une vieille inimitié entre la po–
pulation de Tiari et quelques tribus voisines,
et qu'en apprenant récemment le danger
d'une rupture, le vali de Mossoul a pris des
précautions pour prévenir une collision. Il a
donc adressé un avertissement au chef kurde,
et i l en est résulté que la cause de l'inintelli–
gence entre les deux parties a été écartée. Le
massacre de quinze chrétiens est nié.
L o r d Cranborne n'aime pas les ques–
tions indiscrètes. Mais bien que les mem–
bres du Parlement anglais sachent quelle
créance i l faut prêter aux communications
ottomanes, le ministre aurait pu, d'un mot,
indiquer qu'il faisait confiance à son agent
plus volontiers qu'aux démentis de la
Porte. Cependant l'ambassadeur anglais
avait fait au moins les démarches néces–
saires, et i l serait à souhaiter que S.
E .
M . Constans mon t r â t toujours un même
souci de son devoir et y fût invité formel–
lement par M . Delcassé. Et si le ministre
et l'ambassadeur témoignent de quelque
négligence, i l se pourrait rencontrer à
Paris, comme à Londres, des députés qui
les l'éveilleraient de leur trop béate quié–
tude.
L A
S U I S S E
E T L E S R É F U G I É S
O T T O M A N S .
—
Déjà la Belgique avait, à l'imitation de
quelques grandes puissances, violé les
droits de l'hospitalité à l'égard des réfugiés
ottomans. L a Suisse semble disposée à se
montrer également intolérante.
Le commissaire Aubert, de Genève, a
convoqué et interrogé A l i Ga l i b e t , Hikmct
Babau, directeurs de
VIstirdad (Les re–
vendications)
et A l i Fa h r i , directeur de
YIntikam (La Vengeance)
et de
Tokma
(
L'Assommoir),
sur une plainte du gou–
vernement ottoman. I l leur a donné à
entendre qu'ils seraient expulsés, s'ils
continuaient à parler du sultan dans les
seuls termes qui conviennent, en faisant
observer que « les Suisses ont de nom–
breux intérêts en Turquie ».
Les rédacteurs de
YIntikam
adressent
un éloquent appel à la Confédération hel–
vétique, et la prient de leur continuer
sa généreuse hospitalité. I l n'est pas cer–
tain qu'ils soient écoutés.
L E S
E M I G R É S .
—
Une commission pour
laquelle a été ouvert un crédit de
200,000
livres turques a été chargée d'installer en
Asie-Mineure huit mille émigrés bosnia–
ques : deux mille maisons doivent être
construites pour les recevoir, à moins que
peu soucieux d'attendre ils n'imitent
l'exemple donné ailleurs et ne préfèrent
s'emparer tout de suite des maisons et des
terres arméniennes.
Trois cent quatre-vingt-huit Tcherkesses
transportés à Ismidt ont été envoyés
ensuite en Syrie.
L.v
C O N F É R E N C E
D E
L I L L E .
—
M .
de
Montluc, conseiller à la Cour d'appel
de Douai, membre de l'Institut de droit
International, président de la section l i l –
loise de la Ligue Internationale de la Paix
et de l a Liberté, a fait, à L i l l e , le
27
avril,
une conférence sur l'Arménie. Le savant
et éloquent juriste a fait connaître à ses au–
diteurs le peuple a rmén i en , si apte à l a c i
vilisation; i l a d é non c é , a v e c la plus grande
Fonds A.R.A.M