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on obtint de nouveau du Sultan la promesse de réformes qui de–
vaient apporter un terme aux massacres et aux brigandages.
La diplomatie turque, alors comme aujourd'hui, promettait
beaucoup à l'Europe; mais aucune des améliorations demandées
n'était réalisée. Les chrétiens de l'Empire ottoman continuèrent à
souffrir.
Zeitoun, de même que Sassoun, avait gardé sur ses montagnes
inaccessibles l'indépendance arménienne et ne payait pas tribut au
gouvernement.
En 1862, les Turcs, voulant faire payer la dîme à ses habitants,
envahirent toute la région et se disposèrent à attaquer Zeitoun.
Mgr Hassoun, patriarche arménien catholique de Constantinople,
voyant que les Arméniens, après une défense héroïque, allaient
succomber sous le nombre et être entièrement massacrés, tourna
ses regards vers la France, nation protectrice des intérêts chrétiens
en Orient. I l adressa directement à Napoléon I I I une lettre restée
célèbre, dans laquelle il déplorait la triste situation des Arméniens
et demandait la protection de la France et son intervention auprès
du gouvernement turc.
Cette démarche eut un effet immédiat; le ministère français, par
l'entremise du marquis de Moustier, ambassadeur à Constantinople,
adressa une note à la Sublime Porte pour, affirmer que la France
avait toujours reconnu le district de Zeitoun comme indépendant
et exempt des impôts. La note, assez vive, demandait que les mas–
sacres fussent arrêtés immédiatement.
Les Anglais, à cette époque, ne furent pas accusés d'être inter–
venus dans la révolte de Zeitoun.
Ali-Pacha, le grand Ali, alors grand vizir, inquiet de l'appui
énergique qu'avait donné la France aux Arméniens, et craignant
que Zeitoun ne devînt pour la Turquie un second Monténégro (ce
furent les propres expressions d'Ali-Pacha), rapporta l'ordre qui
avait été donné au corps d'armée d'Alep de marcher sur Zeitoun.
I l fit mander en même temps Mgr Hassoun, à qui il reprocha amè–
rement de s'être adressé à la France dans un moment où la catho–
licité ne courait aucun danger, car la population de Zeitoun rele–
vait du patriarche grégorien d'Etchmiadzin.
Fonds A.R.A.M