Kurdes craintifs prirent leurs mesures pour déguerpir. Mais les
soldats envahirent le bazar et crièrent à ces derniers en kurde :
«
Ne craignez rien. Le Sultan vous ordonne de massacrer les infi–
dèles et de piller leurs boutiques. La trompette vous donnait le
signal de mettre le feu au bazar. »
Les Kurdes ne se firent pas prier. Ils continuèrent de massacrer
les chrétiens et incendièrent 1200 boutiques (les autorités avaient
coupé les aqueducs pour ne pas permettre d'éteindre le feu). Les
chrétiens qui s'étaient cachés dans ces boutiques furent brûlés vifs.
La nuit, les Kurdes des environs, guidés par ces flammes, essayè–
rent de pénétrer dans la ville pour participer au pillage ; mais les
autorités leur firent entendre qu'on n'avait pas besoin de leur con–
cours et les dirigèrent sur les villages chrétiens, pour y répéter
les scènes de Diarbékir. .
Lesmassacres continuèrent le lendemain. Une vingtaine deKurdes
brisaient, à coups de hache et de marteau, les portes des maisons
arméniennes, avec le concours des soldats, et des milliers de musul–
mans et de musulmanes pillaient ces maisons, tout en torturant,
mutilant et assassinant les chrétiens sous les yeux de leurs femmes
et de leurs enfants. Le nombre des maisons qui ont reçu ces visites
s'élève à 1.500.
Ces monstres déshonorèrent les mères chrétiennes sous les yeux
de leurs enfants. Ils violèrent les vierges, en se les arrachant à
coups de sabre. Quelques-unes de ces malheureuses furent inter–
nées dans les harems, après avoir été converties par force à l'isla–
misme.
Les musulmans pénétrèrent dans l'église de Sourp Sarkis, après
en avoir brûlé les portes. Ils brisèrent les autels, jetèrent dans les
lieux d'aisances les évangiles et les croix, dépecèrent à coups de
hache et écorchèrent le prêtre Haroutyoun et le bedeau Mardiros
dont les corps, ainsi que ceux des autres chrétiens massacrés
furent laissés en pâture aux chiens pendant trois ou quatre jours.
On profana l'église, et l'on ne permit plus aux chrétiens d'y entrer.
On dit que les musulmans se proposent de la convertir en mosquée
et de la nommer
Enis Pacha Djamissi.
Les pillards ont d'ailleurs
emporté les reliques, y compris un clou de la vraie croix, con-
Fonds A.R.A.M