but de conjurer un si grand malheur, va trouver le principal chef
des Kurdes montagnards et s'engage à tout l u i abandonner pourvu
qu'il l u i épargnât la vie de ses ouailles. Ce chef y consent et i l jure
de tenir sa parole. En effet, i l se montre plus loyal à cet égard que
son collègue
discipliné
Rechid Bey. Le prêtre trouve à peine le
temps de consommer les Saintes Espèces. Et la lugubre procession
se met en marche. Les Tell'- Erminiotes consternés, mais bénissant
le ciel d'un salut inespéré, ne pouvaient s'empêcher de verser
des torrents de larmes en voyant de loin flamber leurs foyers
chéris et l'église où ils venaient de prier pour la dernière fois.
Le beau bourg de TeU'-Ermen n'est plus qu'un amas de cendres
et de ruines. Les pertes s'élèvent à environ quarante mille livres
turques. Ils ont été tous charitablement accueillis par leurs frères
de Mardine.
Les massacres de Marache commencèrent le matin du 18 octobre
dernier et durèrent toute la journée. Les atrocités qui y furent
commises ne sont guère inférieures à celles de Diarbékir : tuerie,
pillage, incendie, attentats contre de jeunes chrétiennes, etc., etc.
Les autorités locales refusaient aux pauvres chrétiens la conso–
lation d'ensevelir leurs morts qui sont jetés ignominieusement dans
.
des eaux immondes. De plus, le mahométisme est imposé à ces
pauvres gens qui sont traînés par force dans les mosquées.
Les notables des trois communautés arméniennes, catholique,
grégorienne et protestante, sont jetés en prison où ils subissent
tous les manvais traitements que la barbarie, sans frein et sans
vergogne, peut imaginer.
L'évêque arménien catholique, Mgr Turkian, malgré l'exiguïté
de ses ressources, nourrit pendant plusieurs semaines un très grand
nombre de ses conationaux, qu'ils fussent catholiques, grégoriens
ou protestants.
Profondément touchées d'une telle charité, trois cents familles
grégoriennes embrassent le catholicisme, ce qui porte à mille le
nombre des maisons arméniennes catholiques de cette ville. Leur
dévoué pasteur doit pourvoir encore à l'entretien de deux mille six
cents affamés; cent seize de ses fidèles sont tombés sous le yatagan
des massacreurs.
Fonds A.R.A.M