Les fonctionnaires et agas turcs du pays ont fait une tournée
dans les villages de Tasch-Olouk, de Goguisson, de Boundouk, de
Tavoud, de Kiredj-Pounar, de Gueul-Pounar, de Héyik, de Sisné
et de Déyirmen-Déré, habités par les Arméniens, et ont ordonné
avec menaces aux maires et aux habitants de ne pas sejoindre aux
montagnards. Gomme mesure de précaution, ils ont complètement
désarmé les Arméniens et emporté toute la poudre qui se trouvait
en leur possession ; après quoi, ils ont commencé à exiger le paye–
ment immédiat des impôts. Les villageois, effrayés, ont envoyé
leurs femmes et enfants à la localité dite Kiredj-Pounar, qui, par
suite de sa position escarpée, est considérée comme relativement
sûre.
.
Dans la nuit du 4 novembre, les soldats réguliers d'Bridjik et de
Goguisson, les bachibozouks turcs et les hordes kurdes et circas-
siennes, réunis sous le commandement du Gircassien Mehmed Bey,
mudir de Goguisson, ont attaqué les villages susmentionnés et autres
villages du district, dont quinze ont été pillés et réduits en cendres.
Les assaillants ont attenté àl'honneur des Arméniennes et envoyé
plusieurs jeunes filles aux harems d'Elbistan et de Yarpouz. A
Yarpouz, ils ont garrotté les Arméniens et tué tous ceux qui ont
voulu opposer quelque résistance. Ils n'ont pas même eu pitié des
femmes et des enfants, dont une partie a été tuée et une autre con–
vertie à l'islamisme.
.
Le village de Tasch-Olouk a perdu à lui seul, à cette occasion,
700
bestiaux d'élevage (boeufs, vaches, buffles), 400 bestiaux de
labour, 170 ânes, 50 chevaux, 3000 chèvres, 48.000 kilos
(336.000
ocques) de blé, tous les meubles et toutes les provisions
des habitants.
Les églises des villages saccagés ont été profanées et pillées. La
femme, la bru et les filles de Garabed Kalaydjian, maire de Goguis–
son, ont été conduites dans les harems turcs, avec plusieurs autres
Arméniennes, Environ 10.000 Arméniens, réduits à une misère
indescriptible, se sont réfugiés avec leurs femmes et leurs enfants
par suite de ces barbaries, à Zeitoun, àFernouz et à Alabasch, où
la famine se fait déjà sentir avec les rigueurs de l'hiver.
Le tyran turc Yayidg-Oghlou, qui habite le caza d'Andérin, a
Fonds A.R.A.M