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que nous avons perdu patience, que nous n'avons plus de force
pour résister. Vous avez été élu par les suffrages du peuple et vous
devez aller où vous appelle la voix du peuple. Dites à cette impas–
sible Europe que si elle n'intervient pas en notre faveur, elle rou–
gira de honte en apprenant bientôt l'extermination de tout un
peuple chrétien. Dites aux ambassadeurs de ne pas nous laisser à
la merci du plus affreux despotisme qui existe au monde» Dites
tout cela, Monseigneur, et si l'Europe continue son mutisme, nous
saurons comment mourir. »
Mgr Izmirlian, profondément ému, exhorte ses ouailles à prendre
patience et promet de faire son devoir jusqu'au bout. Une des
Sassouniotes s'écrie que le peuple demande la liberté ou la mort.
Sa Béatitude se retire au Patriarcat et la procession s'ébranle en
criant « Sassoun ! Sassoun ! » et en entonnant
Tzdinë Jintchetz
Erzeroumi Ràïotz lernêren.
Les Arméniens se dirigent vers la
S. Porte pour remettre au grand-vézir un mémorandum rédigé par
les Hentchakistes et dont nous donnons le texte plus loin. On
verra que ce document n'a rien d'anarchiste, contrairement aux
insinuations du correspondant constantinopolitain du
Standard,
insinuations qui ont d'ailleurs été victorieusement réfutées par
M . A. Nazarbeb, directeur du
Hentchak.
D'après le
Berliner Tageblatt,
les Arméniens ont formé trois
bandes pour atteindre la S. Porte, qui était cernée par la police et
la cavalerie. La première bande simulait un convoi et suivait un
cercueil vide, qu'elle a jeté de côté dès qu'elle est parvenue à desti–
nation. La seconde faisait semblant de suivre avec curiosité quel–
ques individus qui simulaient l'ivresse ; arrivés devant la librairie
Arakel, non loin de la S. Porte, les Arméniens qui formaient cette
bande tirent dix fois sur les voitures de Turkhan Pacha, ministre
des affaires étrangères et de Halil Pacha, ministre de l'intérieur.
La troisième bande attaque quelques Turcs qui fendaient du bois et
qui, assistés de plusieurs Grecs, ont tué vingt Arméniens et blessé
plus de cent. Au quartier de Sultan Mehmed, les Turcs attaquent
les Arméniens qu'ils calomnient d'avoir empoisonné un puits ;
Kurdes et Persans attaquent également les Arméniens.
Ce qui est hors de doute aujourd'hui, c'est que la responsabilité
Fonds A.R.A.M