88
LA TURQUIE NOUVELLE ET L'ANCIEN REGIME
Toutes assurément ne sont pas aussi instruites qu'il serait
désirable, i l s'en faut de beaucoup, malgré l'obligation
koranique d'instruire la femme comme l'homme, et i l y
aura beaucoup à faire à ce point de vue ; mais vous serez
peut-être étonnés d'apprendre qu'il y a des femmes turques
très lettrées et que plusieurs ont publié des œuvres remar–
quables, enfin qu'il y a des
Revues,
presque uniquement
rédigées par des « collaboratrices musulmanes
1
».
Là encore, là surtout, l'évolution ne fait que commencer.
Après une si dure compression d'un pouvoir tyrannique,
rétrograde, qui n'a pas empêché, pourtant, toute émanci–
pation, il faudra peut-être de longues années pour vaincre
de vieux préjugés, pour dissiper des appréhensions qui
sont, à l'origine, fort louables ; mais, avec la liberté telle
qu'elle doit être comprise, d'une instruction solide, morale
et saine, les femmes turques n'auront rien à envier à leurs
congénères et l'État sera le premier à bénéficier de leurs
progrès.
Jai terminé, Mesdames, cette trop longue et trop diffuse
causerie, dont vous voudrez bien m'excuser, en songeant
aux difficultés de ma tâche et à l'insuffisance des moyens
qui m'étaient offerts, pour vous parler un peu de ce que fut
la Turquie d'hier et de ce qu'est la Turquie d'aujourd'hui.
1
«
Quelques dames musulmanes lettrées, appartenant à l a haute
Société et connaissant des langues européennes, ont formé, par
l'initiative d'une très grande Dame, une société littéraire en vue de
sauvegarder les droits de l a femme musulmane », dit un écho de l a
Turquie,
du 19 décembre, qui annonce la publication d'un journal
de ces dames et l a demande d'admission des femmes à l'Université
de Constantinople. — Bien plus ! des dames musulmanes ont demandé
à l ' U . P . d'assister aux séances de l a Chambre, menaçant, en cas de
refus, d'imiter les « suffragettes de Londres » et de manifester à leur
tour. ( L a
Turquie, M
décembre 1908.)
Fonds A.R.A.M