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LA. T U R Q U I E N O U V E L L E E T L ' A N C I E N
R E G I M E
licence donnée par le Koran d'épouser plusieurs femmes, et
seulement en certaines conditions, est à peu près tombée en
désuétude. Diverses raisons, et vous en devinez plusieurs,
ont amené les Musulmans à la monogamie. On citerait,
malaisément, aujourd'hui, des Turcs bigames ; ils pré–
tendent même l'être moins que beaucoup trop d'Euro–
péens. Et j'en connais, du rang le plus élevé, qui ne se
sont pas mariés, sans jurer de n'avoir qu'une seule épouse.
Le sultan Abdul-Medjid disait déjà que l'influence des
harems, tels qu'ils étaient autrefois admis, avec la poly–
gamie, empêchait les Turs de vivre par l'âme et par le
cœur, et i l s'expliquait que les chrétiens se contentent
d'une seule femme. Aujourd'hui, presque tous les Turcs
sont de l'avis des chrétiens et de leur ancien sultan.
Les conditions dans lesquelles on peut obtenir le divorce
mais ici nous n'aurons bientôt plus rien, je le crains, à
envier à l'Islam ! — facilitent beaucoup, i l est vrai, les
changements, car, conséquence des mœurs antiques des
Arabes, les répudiations verbales, trois fois renouvelées par
l'époux, à intervalles déterminés, peuvent suffire pour
rompre un mariage et permettre, après peu de temps, d'en
contracter un autre, quoique le Koran déclare que « le
divorce est la chose permise qui déplaît le plus à
Dieu. »
I l convient, d'ailleurs, de remarquer que la femme peut
aussi demander le divorce, que l'inégalité dès deux époux
qui ne respectent pas leurs devoirs n'est point admise,
comme en Europe ; l'époux coupable, est, aussi bien que
l'épouse, condamné à la lapidation, peine, i l est vrai,
comme tant d'autres, inappliquée depuis plusieurs siècles,
pour le mari et pour la femme. Mais l'ex-mari doit pension,
indemnité, s'il y a lieu, à l'épouse répudiée ; il aurait dû aussi
un douaire à sa veuve. Et comme celle-ci]"a, sur la femme
chrétienne, cet avantage — oui, Mesdames, vous l'a-t-on
dit? — qu'elle n'apporte point de dot et qu'elle use libre-
Fonds A.R.A.M