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L A T U R Q U I E N O U V E L L E E T L ' A N C I E N R E G I M E
tume soit une prescription rigoureuse de l'Islam ; le Pr o –
phète l'a conseillée, i l ne l'a pas imposée
x
-
I l y a des pays
musulmans où les femmes ne sont pas voilées. L'usage du
voile est antérieur à Mahomet. La chaleur excessive et la
jalousie des hommes l'avaient introduit parmi les femmes
de l'Orient, dès la plus haute antiquité. La Bible en fait
mention. Homère représente Pénélope sous un voile. Les
charmantes figurines de Tanagra sont souvent drapées et
voilées, presque à la manière turque. La Vierge Marie était
voilée comme toutes ses compatriotes et, parmi les reliques
insignes, dont l'authenticité ne paraît pas pouvoir être mise
en doute, le voile de la cathédrale de Chartres, à laquelle i l
fut donné par l'impératrice Irène (de Constantinople), est un
document fort curieux à ce point de vue. Pieusement sous–
traite aux regards, jusqu'en 1794, on croyait si bien que
cette relique n'était pas une gaze pour couvrir seulement
le visage, mais une sorte de vêtement pour draper le corps
tout entier, qu'on l'appelait habituellement la « sainte che–
mise » et le sceau du Chapitre Chartrain porte un vêtement
à longues manches pour armoiries depuis un temps immé–
morial. D'autre part, i l n'y a pas un siècle, en Orient,
les chrétiennes Grecques, Arméniennes, Syriennes, etc.,
portaient généralement le voile. En revanche, les Circas-
siennes le portent bien rarement aujourd'hui.
I l est probable que le
Tcharchaff,
le
yachmak
et le
bacheurtu,
trois sortes différentes de voiles plus ou moins opaques,
pour les femmes turques, hors de leur maison, sera long–
temps encore en usage ; mais vous savez sans doute que chez
elles, ces dames sont vêtues à l'européenne ; les plus cossues
achètent leurs toilettes d'intérieur dans nos grands maga-
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E n 1901, le Palais, si corrompu, envoya un communiqué aux
journaux turcs — avec défense de traduire en français, — où il est dit
que « la loi du
Chéri
fait un
devoir absolu
aux dames musulmanes de
se voiler...» Mais les Musulmans éclairés furent unanimes à blâmer
cette interprétation des lois comme abusive et rétrograde.
Fonds A.R.A.M