L A T U R Q U I E N O U V E L L E E T L ' A N C I E N R É G I M E
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capable de ressusciter cet empire qu'elle convoitait. Cette
fois, la Russie a mieux compris le rôle qui lui convenait.
E t c'est l'Autriche (faut-il dire de complicité avec l'Alle–
magne ?) qui est intervenue, aux seuls applaudissements
des intéressés du Palais, en annexant, malgré elles, la
Bosnie et l'Herzégovine.
Mais qui donc n'a pas été frappé de la sagesse du gouverne–
ment de la Turquie calmant les ardeurs irréfléchies que
guettaient, ou peut-être suscitaient, les rivaux, mécontents.
N'oubliant pas que ces incidents sont encore l'une des
conséquences douloureuses du passé, de la liquidation de
l'Ancien Régime, i l s'est tourné vers les grandes puis–
sances pour leur dire, simplement : — Oui, nous, Otto–
mans, nous sommes affligés de voir des peuples civilisés
profiter de nos soucis, de nos embarras, pour nous créer
des difficultés graves, pour nous enlever des forces. Mais
vous, signataires du traité de Berlin, sûres de votre puissance,
vous êtes encore plus directement offensées que nous ne
pouvons l'être, en voyant ainsi déchirer vos conventions ;
veuillez donc examiner ce que vous avez à dire ou à faire.
Votre dignité ne peut pas être moins susceptible que la
nôtre...
E t c'est ainsi que la nouvelle question posée contre la
Turquie pourra, nous l'espérons, se régler à l'amiable, par
la sagesse des Turcs et la bonne volonté de la France et
de ses amis
l
.
I l faut que tout le monde en prenne son parti,
1
Après un boycottage des marchandises autrichiennes dans tous
les ports ottomans, un arrangement vient d'être conclu entre les deux
parties ; une indemnité pécuniaire a été acceptée par la Turqujie (avec
d'autres compensations), malgré la déclaration du président de la
Chambre ottomane, Ahmed Riza, disant « à quelques ambassadeurs
«
que la Turquie, ne vendant pas ses provinces, ne pourrait pas
«
accepter l'indemnité de l'Autriche-Hongrie et que, si le Gouverne-
«
ment acceptait une indemnité, le Comité s'y opposerait». (Dépêche
du
Temps,
8
janvier 1909.)
Fonds A.R.A.M