L A T U R Q U I E N O U V E L L E E T L ' A N C I E N R E G I M E
nalité qu'ils appartiennent. Qu'on fasse les réformes, qu'on
applique l a Constitution, nous rentrerons sans aucune autre
condition. Sinon, non. »
Lorsqu'il s'agit d'inhumer le corps de Dama d Mahmoud
pacha, en attendant le retour dans sa patrie libérée, pendant
qu'on essayait d'ameuter contre lui, contre l a grandeur et l a
persévérance de sa protestation, les musulmans, à qui l'on
voulait faire croire qu'il avait changé de religion, que c'était
un apostat, on alla jusqu'à signifier défense à l'iman, appelé
par ses fils, de l'ambassade de Londres, de formuler les
prières rituelles si le corps de l'exilé ne retournait pas à
Constantinople, où l'on voulait le voir, le tenir, le contem–
pler, pour être bien certain que celui-là ne pouvait plus
nuire ; comme si les apôtres et les martyrs cessaient de
parler, de convaincre et de réconforter, après leur mort.
To u t le monde se rappelle ce procès écœurant, dans lequel
Munir bey revendiquait, contre les princes exilés avec lui,
exécuteurs de ses volontés formelles, l a propriété du
cadavre de Dama d Mahmoud Pacha, inhumé au cimetière
musulman du Père-Lachaise. I l fallut qu'un arrêt des tri–
bunaux français mît u n terme à ce scandale qui, sans cela,
se fût renouvelé comme lorsque, après l'assassinat de Midhat
pacha \ à Taïf, l a tête de l'ex-grand vizir fut adressée au
Palais de Constantinople, comme « objet d'art » , à l a grande
terreur des douaniers trop indiscrets.
Ceux qui croiraient qu'on avait peur des cadavres à
Y l d i z doivent, d'ailleurs, être tout à fait détrompés.
J ' a i su, récemment, par des témoignages très autorisés
que, lors du décès du noble sultan Mourad V , frère aîné et
prédécesseur du sultan régnant, ce furent d'ignobles espions
que l'on chargea d'apporter son corps au Palais impérial,
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Assassinat de Midhat pacha, d'après les documents officiels de la
Jeune Turquie,
broch. in-12 (Genève, 1898).
Fonds A.R.A.M