L A T U R Q U I E N O U V E L L E E T L ' A N C I E N RÉGIME
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les instances des Libéraux ottomans, sans arriver toutefois
à en détruire l'engeance. Et ce n'est pas la moindre curiosité
de ce temps que de voir à Péra, aux Petits-Champs, partout,
quelques-uns de ces espions se promener, avec la cocarde
rouge et blanche des Libéraux constitutionnels, au milieu
des officiers et civils que leur vilain métier fit tour–
menter et proscrire ! Quelques-uns même n'ont-ils pas eu
l'audace de faire dire par des journaux réputés qu'ils avaient
souffert de l'exil et travaillé pour la Liberté, et certains
n'ont pas eu trop à s'en repentir, car — comme nos ex–
régicides devenus barons de l'Empire — ils ont su, pour une
raison ou pour une autre, conserver leurs postes ou s'empa–
rer des fonctions les plus recherchées
1
.
Mais, pendant que les exilés patriotes, en Europe, appre–
naient à connaître sur place les effets de la civilisation, les
institutions libérales, ils se mettaient en contact avec les
Ottomans restés dans leur pays, par leurs Comités, leurs
journaux, comme à Paris, à Genève et en Egypte, dès 1878,
la
Jeune Turquie
d'Halil Ganem, puis, le
Mizan
de Mourad
bey,le
Mechveret
d'Ahmed Riza
2
,
avec la devise positiviste
«
Ordre et progrès «(d'abord interdite par l'Union et Progrès),
l'Osmanli,
le
Moniteur ottoman,
le
Terekki
du prince Sabahed-
dine, Fazli bey, etc
3
.
D'autre part, les exilés de l'intérieur de
l'empire devenaient nécessairement les Apôtres et les propa–
gateurs des idées de réforme. L'évolution politique se pré–
parait ainsi. Malheureusement les groupements, trop nom-
1
II y en a même qui se firent élire députés ; on en a invalidé plu–
sieurs; il en reste encore.
8
Voir dans la collection de ce journal les numéros du 15 août 1897
et du 1
er
janvier 1906, entre autres, avec le
Programme de la Jeune
Turquie.
3
Organe de la
Ligue,
fondée par le prince Sabaheddine, le
Terekki
(
Progrès)
était une sorte de correspondance publiée en turc, depuis
plusieurs années, et envoyée par des émissaires aux affidés, jusqu'aux
extrémités de l'empire ottoman.
Fonds A.R.A.M