L E S TURCS ONT PASSÉ L A .
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ment nombreux qu'il n'y avait pas moyen de remuer.
Nous étions près de 3.000 personnes chez les Jésuites,
un millier à l'Église évangélique, quelques centaines
à l'établissement des missionnaires américains, une
centaine chez M. Yanco Arthémi, drogman du
Consulat russe, de sorte que nos maisons étaient
vides.
Cependant on voulait nous attaquer quand même
et pour cela on tirait des coups de fusil sur l'édifice
des Jésuites, deux personnes furent blessées. I l y en
eut quelques-unes aussi chez les Américains. Le
consul anglais de Mersine eut le courage et la
témérité de parcourir la ville accompagné de quel–
ques soldats seulement. Ce fut son cheval qui le
premier reçut un projectile, le consul fut lui-même
blessé, à son tour, au bras droit. Nous en fûmes tous
profondément touchés, car i l le fit pour défendre
notre cause.
Le deuxième jour, vers le soir, une fumée épaisse
envahit Adana, nous comprîmes qu'on incendiait la
ville. Les quartiers arméniens brûlèrent toute la
journée ainsi que la nuit suivante, et tout fut réduit
en cendres,
La population est affamée, elle demande du pain,
plusieurs personnes se sont évanouies ; j ' a i perdu
aussi mon petit ange Krikoris-Raffi qui est mort de
faim le troisième jour.
Le soir du troisième jour nous priâmes un des
notables de la ville, Osman bey, d'intervenir pour
faire cesser les massacres, des drapeaux blancs de
reddition furent hissés mais la populace qui ne com–
prenait rien à ces signaux de paix, continua de plus
belle ses atrocités. Des centaines de blessés et de
Fonds A.R.A.M