dessus. De ce que la plupart des
sarafs
(
changeurs) sont
arméniens, ils concluent vite que tous les Arméniens
sont des sarafs ; quant à l'honnêteté des intermédiaires
de bazar, qu'ils soient Grecs, Arméniens, Juifs ou
Levantins catholiques, elle est en effet douteuse ; mais
c'est une singulière méthode que de juger tout un
peuple sur quelques individus qui ont des défauts
inhérents à leur profession et non point des défauts
particuliers à leur race.
Même dans les villes, les Arméniens ressemblent
plutôt encore aujourd'hui à l'image qu'en traçait Guys
dans ses
Lettres sur la Grèce
à la fin du dix-huitième
siècle :
Ils forment la nation la plus nombreuse, la plus riche,
la plus sage : gens laborieux, infatigables, robustes, vivant
de peu et durement, ils exercent tous les métiers pénibles.
Accoutumés à vivre dans l'intérieur des provinces, ils
aiment les chevaux et les connaissent parfaitement; ils
composent presque toutes les caravanes et font la plus
grande partie du commerce de la Perse et des Indes.
Les témoignages des voyageurs les plus récents con–
cordent avec celui de Guys et c'est à peu près dans les
mêmes termes que s'expriment M. Ludovic de Con-
tenson, français, et M. H. F. B. Lynch, anglais.
Les sarafs ne forment qu'une très faible minorité
dans la nation; les gens de métier sont de beaucoup
les plus nombreux. Les
harnais
(
portefaix) de Constan–
tinople sont presque tous Arméniens, ainsi que la plu–
part des boulangers ; pendant les massacres de
1896,
la ville manqua de pain durant trois jours, les boulan–
gers arméniens étant tués ou se tenant cachés. Les
tailleurs, les menuisiers, les cordonniers, les orfèvres,
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Fonds A.R.A.M