Dans une curieuse brochure, publiée à Genève en
1896,
Arméniens et Arménophiles
par le
V I E U X D E L A
M O N T A G N E ,
et où l'apologie du gouvernement hamidien
est conçue de manière à flatter les préjugés courants,
les Arméniens sont représentés comme des rois de
l'argent, des princes de l a spéculation. Sur les sommes
dépensées par S. M . I . « les quatre cinquièmes se per–
dent en route et au profit de qui ? des fonctionnaires
arméniens ».
Dans ces conditions, n'est-il pas tout naturel, d'une part,
que les Arméniens gavés de richesses aient pensé profiter
de la latitude qui leur était laissée pour escalader le trône,
et, d'autre part, que les Musulmans exploités, ruinés, asser–
vis par la puissance de SaMajesté l'argent, aient eu la main
lourde le jour où ils ont pu se payer sur l a bête de tout ce
que la misère les avait contraints d'endurer.
L a haine qui divise les Musulmans des Arméniens n'a
pas d'autre origine que cette exploitation à outrance qui est
similaire de celle des Juifs en France, en Angleterre, en
Pologne, en Autriche-Hongrie. L a question religieuse n'y
est pour rien ; la lutte s'appelle antisémitisme en Europe,
elle s'appelle question arménienne en Turquie. Au fond,
c'est absolument la même chose,
the struggle for life,
entre
l'omnipotence de l a ploutocratie sans vergogne, sans scru–
pule et sans cœur, et les revendications des populations
intelligentes, travailleuses, généreuses, patriotes qui, sortant
de la légalité pour rentrer dans le droit, veulent reprendre
par la force, et d'un seul coup, tout ce dont l'astuce, la ruse,
la mauvaise foi appuyées sur la légalité ont mis des années
à les dépouiller.
Ceux des Européens qui ne connaissent
le,
peuple
arménien que par les Arméniens des villes seraient
assez portés à tenir pour exact le portrait tracé c i -
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Fonds A.R.A.M