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POESIE
ARMENIENNE
du partisan, c'est toujours la mêmefidélitéimmémoriale
qui se révèle à travers ces textes d'immédiate emprise,
celle une fois pour toutes ancrée dans la terre arménienne
dont est inséparable cette poésie-là.
Elle en a toute la géographie : hauts plateaux, grands
lacs, abîmes et gouffres, plaines et sommets, sources
et torrents, fleuves et ruisselets. Elle en a tout le paysage
dans la diversité de ses structures et l'élévation de son
architecture : supplications et imprécations tumultueuses
des visionnaires et des mystiques ou envolées lyriques
des romantiques ; quatrains sereinement ciselés des
philosophes et clameurs de haine contre les tyrans et
les oppresseurs ; strophes vengeresses des poètes promis
au martyr et appels enflammés à la liberté et à la justice ;
simples évocations paisibles de la vie quotidienne ou
immenses élans révolutionnaires ; nostalgique douceur
d'une berceuse ou fougueuse rudesse des légendes
païennes ; hymnes à la joie qu'inspira le christianisme ;
épopées à la gloire du socialisme.
La rhétorique, envahissante parfois, et le discours,
aux tonalités solennelles et aux apparats somptueux,
à l'imagerie foisonnante et, déjà dans les écrits des âges
révolus, d'une étonnante modernité, n'y sont pas dédai–
gnés, de même qu'une tendance au développement
didactique d'une morale aux traditions ancestrales dont
la rigueur d'expression est tempérée par la joliesse
descriptive d'une ballade de trouvère ou d'un bref
proverbe. Les vers y sont toujours enserrés dans les lois
inexorables d'une métrique scrupuleusement observée
grâce à laquelle peuvent être ordonnés us et coutumes,
conseils religieux ou profanes par lesquels se perpétue
Fonds A.R.A.M