DEVANT L E PROBLÈME ARMÉNIEN
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cle 89 l u i laisse
entière liberté,
p o u r v u que l a frontière future entre l a
Tu r qu i e et l'Arménie se trouve
dans
ces vilayets. Si l ' on se remémore le
martyrologe des Arméniens et les promesses solennelles qu i leur o n t
été faites par des représentants les plus qualifiés des Puissances alliées
au cours de la grande guerre, on est certainement porté à interpréter ce
passage dans le sens que la sentence d u Président W i l s o n doit attribuer à
la République arménienne une partie au moins des quatre vilayets. Mal–
heureusement, cette interprétation ne se concilie pas avec les termes des
articles suivants d u traité. L'article 90 dispose : «
Au cas
où la fixation de
la frontière, en v e r t u de l'article 89, i mp l i q u e r a le transfert à l'Arménie
de tout ou partie d u territoire desdits vilayets, l a Tu r qu i e déclare dès à
présent renoncer, à dater de la décision, à tous droits et titres sur l e
territoire transféré... » Et l'article 9 t débute ainsi : «
Si
une p o r t i on d u
territoire visé à l'article 89 est transférée à l'Arménie, une Commission
de délimitation, dont la composition sera ultérieurement fixée, sera
constituée... ». Comparé aux articles 90 et 9 1 , l'article 89 do i t donc être
interprété dans le sens qu'en aucun cas la frontière arméno-lurque ne
p o u r r a i t être tracée dans d'autres vilayets que ceux d'Erzeroum, Trébi-
zonde, Van et Bitlis, mais qu'à part cette restriction l'arbitre est entière–
men t l i b r e . I l peut partager les quatre vilayets entre les deux pays ; i l
peut les adjuger en entier à l'État arménien ; mais i l peu t aussi laisser
toute l'Arménie turque à l a Tu r qu i e :
A i ns i donc le traité de Sèvres conclu par les Puissances alliées avec
la
Turquie
n'a affirmé que l'indépendance de l'ancienne Arménie
russe.
Quant à l'indépendance de tout ou partie de l'Arménie turque, elle est
laissée à l'entière discrétion du Président des États-Unis d'Amérique.
Dans le même document i n t e r na t i ona l q u i reconnaît l'indépendance
absolue des anciens sujets d u Tsar, les Puissances alliées admettent,
d'autre part, la possibilité d u retour des Arméniens de Tu r qu i e , échap–
pés à l a déportation et au massacre, sous le j o u g ottoman. A t t i t ud e de
très mauvais augure, et que nous verrons bientôt se changer en aban–
don complet.
Les frontières delà République arménienne avec la Géorgie et l'Azer-
beïdjan ne sont pas définies, pa r le traité, avec plus de précision que
celles avec la Tu r qu i e . L'article 92 déclare : « Les frontières de l'Armé–
nie avec l'Azerbeïdjan et la Géorgie respectivement seront déterminées
d'un c ommun accord par les États intéressés. Si, dans l ' u n o u l'autre cas,
les États intéressés n'ont p u parvenir, lorsque la décision prévue à l'ar–
ticle 89 sera rendue, à déterminer d ' un c ommun accord leur frontière.
Fonds A.R.A.M