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LA SOCIÉTÉ DES NATIONS ET LES PUISSANCES
A i n s i donc, l a reconnaissance
de jure
de l'Arménie par les Puissan–
ces alliées ne doit aucunement prendre date d u j o u r de l a signature ou
de la ratification du traité de Sèvres. Ce traité n'a fait en réalité que
confir–
mer
une reconnaissance
tacite
intervenue, au plus tard, le j o u r de l a
remise d u projet de traité de paix par les représentants des Puissances
alliées, y compris l'Arménie (le 11ma i 1920).
Le traité de Sèvres n'innove pas, d'ailleurs, non plus en ce q u i con–
cerne la Tu r q u i e . Car cette dernière avait déjà, elle aussi, reconnu l ' i n –
dépendance de la République arménienne par le traité arméno-turc du
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j u i n 1918. Mais l'article 88 d u traité de Sèvres a l'effet très i mp o r t a n t
de convertir cette obligation de la Tu r qu i e envers l'Arménie en une
obligation i n t e r na t i ona l e .
I I
F
RONTIÈRES DE L'ARMÉNIE INDÉPENDANTE.
Mais quelle est donc cette Arménie dont l'article 88 du traité de Sèvres
proclame la liberté, l'indépendance et la souveraineté ? N'est-elle
composée que des territoires de l'ancien Emp i r e russe ou y a-t-on an –
nexé une partie de l'ancien Empire ottoman ?
Nous trouvons la réponse à cette question dans les articles 89,90 et 91
d u traité.
L'article 89 porte :
«
La Turquie et l'Arménie ainsi que les autres Hautes Parties contractantes
conviennent de soumettre à l'arbitrage du Président des États-Unis d'Amérique
la détermination de la frontière entre la Tu r q u i e et l'Arménie dans les vilayets
d'Erzeroum, Trébiionde, Van et Bitlis et d'accepter sa décision, ainsi que toutes
dispositions q u ' i l pourra prescrire relativement à l'accès de l'Arménie à l a mer et
relativement à la démilitarisation de tout territoire o t t oma n adjacent à ladite
frontière » .
Danjs ce texte, i l y a l i e u avant t ou t de noter qu'il laisse définitive–
ment en dehors de l'Arménie trois parmi les sept vilayets de l ' Ana t o l i e
orientale q u i étaient visés aussi bien par le dernier projet de réformes
européennes, incorporé dans l'accord russo-turc du 8 février 1914, que
p a r l e Mémoire, présenté à la Conférence de l a Paix par les Délégations
arméniennes ; i l en exclut également la Cilicie comprise elle aussi dans
les revendications nationales arméniennes, lesquelles se trouvent a i ns i
considérablement réduites.
Quant aux quatre vilayets sur le sort desquels doit statuer le Président
des États-Unis (Erzeroum, Trébizonde, Van et B i t l i s ) , le texte de Pa r t i -
Fonds A.R.A.M