V I
PRÉFACE
ciences par le r a pp e l c on t i nue l des doléances de l a na t i on abandonnée :
en pleine Conférence de Lausanne, Lord Curzon, l ' u n des présidents,
caractérisait la question arménienne comme « l ' u n des grands scandales
d u monde » . '
En réalité, c'est exclusivement sur le terrain po l i t i que , et p l us p a r t i –
culièrement, sur celui de la politique des Puissances envers l a Tu r q u i e ,
q u ' i l faut chercher les mo t i f s d u revirement de l'attitude des États alliés
dans la question arménienne. Aussi, dans celte étude consacrée au
problème arménien, avons-nous dû"nécessairement concentrer toute
notre attention sur les variations de cette p o l i t i qu e . Et pour augmenter
les chances d'une appréciation impa r t i a l e , i l nous a fallu aussi ana–
lyser le caractère de l'intervention d'humanité, pratiquée avant la grande
guerre, par les Puissances, en faveur des nations q u i vivaient sous la
domi na t i on turque et en particulier de l'Arménie. Nous avons en même
temps lâché de démêler le côlé politique de l'attitude des Puissances
envers l'Arménie au sein de la Société des Nations.
Les résultats auxquels notre examen a abouti peuvent être résumés
comme suit.
Ayant renoncé par l'armistice malencontreux de Lemnos d u 30 octo–
bre 1918 à l'occupation de l'Arménie turque, les Alliés n'ont pu contrôler
le désarmement effectif de la Tu r q u i e , et ajnsi ils ont permis aux natio«
naiistes turcs de créer urt foyer de résistance au centre même des p r o –
vinces arméniennes. C'est p o u r qu o i , deux ans après l'armistice, au
mome n t où la Tu r qu i e de Constanlinople signa le Traité de Sèvres, i l
devint difficile d'imposer ce traité à l ' Ana t o l i e . La lassitude naturelle et
la situation financière des pays de l'Entente, épuisés par la guerre, s'op–
posèrent ensuite de plus en plus à ce que de nouveaux sacrifices de sang
et d'argent fussent consentis par eux pour les intérêts politiques et huma –
nitaires dans le Proche-Orient. Cet état de choses, toutefois, n ' e x p l i que
pas tout le problème. Car, les Puissances ne c r u r e n t même pas pouv o i r
recourir à u n mo y en d'action pacifique, préconisé cependant pa r le
Pacte, en décrétant contre la Turquie u n blocus économique, lequel,
selon toutes les prévisions, l'aurait fait capituler. Cette r enonc i a t i on
générale à toute pression quelconque vis-à-vis de l a Tu r qu i e doit être
attribuée à la méconnaissance, par les Alliés, des véritables rapports de
la Tu r qu i e nationaliste avec le Califat détenu par la dynastie d'Osman,
et surtout à une erreur psychologique q u i leur a\ fait supposer qu'en
Fonds A.R.A.M