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L A SOCIÉTÉ DES NATIONS ET LES PUISSANCES
Puissances étaient donc tenues de confier la tutelle du peuple arménien
à une des « nations développées q u i , en raison de leurs ressources, de
l eu r expérience ou de leur position géographique », seraient « le mi eux à
même d'assumer cette responsabilité » et qu i t exerceraient cette tutelle
en qualité de mandataire et au nom de la Société ». Le paragraphe 4 de
l'article 22 était en outre spécialement applicable aux Arméniens de T u r –
quie, car i l traite de « certaines communautés qu i appartenaient autre–
fois à l'Empire ottoman » et qu i ont « atteint un degré de développement
t e l que l eu r existence comme nations indépendantes peut être reconnue
provisoirement à la condition que les conseils et l'aide d ' un manda–
t a i r e gu i den t l eu r administration j u s q u ' a u mome n t où elles seront capa–
bles de se conduire seules ».
C'était donc pour le Conseil suprême non seulement u n droit, mais u n
devoir de chercher à app l i que r au peuple arménien les bienfaits de
l'article 22 d u Pacte de l a Société des Nations. Malheureusement, le
Conseil engagea son i n i t i a t i v e dans une voie q u i l a vouait à u n échec
certain. A u l i e u de choisir, en stricte conformité avec l a teneur d u Pacte,
p a rmi les « nations développées », u n mandataire qu i exercerait la
tutelle de l'Arménie au nom de la Société des Nations, le Conseilsuprême,
en effet, par l'intermédiaire de l o r d Curzon, proposa la protection d u
futur État indépendant arménien à la Société des Nations elle-même (1).
Le Mémorandum qu'à l a suite de cette proposition d u Conseil suprême,
le Conseil de la Société des Nations adopta le 11 avril 1920 prouve d'une
manière éclatante- l'Impuissance d'agir dans laquelle se trouvait cette
Société après le refus de la Conférence de la Paix de mettre à sa disposi–
tion une force réelle, capable de g a r an t i r l'exécution de ses décisions.
Ce Mémorandum débute d'abord par la constatation,intéressante à tous
les points de vue, que
c
le Conseil suprême des Principales Puissances
alliées, désireux d'assurer à l a Nation arménienne l'existence, l'ordre
et l a sécurité, a décidé d'inslituer une République indépendante
d'Arménie ». Puis, i l continue en déclarant que de la c ommun i c a t i on de
l o r d Curzon < i l résulte que l a Société des Nations est sollicitée d'accep–
ter vis-à-vis de l'Arménie le manda t prévu par l'article 22 d u Pacte ». Et
à cet égard i l affirme que « le Conseil est entièrement d'accord avec le
Conseil suprême, en ce q u i concerne les demandes de la Nation armé–
nienne : i l considère que la c ons t i t u t i on de l'Arménie en État sur la base
de l'indépendance et de l a sécurité est u n devoir d'humanité et u n b u t
(
i ) Télégramme de lord-Canon du
13
mars
1920.
V. Mémorandum présenté par le
Secrétaire général de la Société des Nations a la première Assemblée (.Documents,
n» 56, p. 3).
Fonds A.R.A.M