DEVANT LE PROBLÈME ARMÉNIEN
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A r l h u r Calthorpe, agissant comme représentant des Alliés, conclut, le
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octobre 1918, avec la Turquie à Moudros, port de l'Ile de Lemnos, porta
à la cause arménienne u n terrible coup dont jusqu'à présent elle ne s'est
pas relevée. Par cet armistice, en effet, les Alliés renonçaient à l'occupa–
tion de l'Arménie t u r que . Au moment où la force m i l i t a i r e turque était
presquecomplètement anéantie.au momen t où lesTurcs auraient accepté
toutes les conditions des vainqueurs, les Alliés négligeaient ainsi de
prendre la seule mesure qu i aurait pu garantir l a délivrance de l'Armé–
nie d u j o u g turc, tant de fois promise par des déclarations et des discours
des plus solennels. L'article 24 de l'armistice prévit seulement l ' o c cupa –
tion pour le cas de nouveaux massacres : « Dans le cas où des désordres se
produiraient dans les six vilayets arméniens, d i t - i l , les Alliés se réservent
le droit d'occuper toute portion desdits vilayets». En attendant, le s
Turcs restèrent les maîtres de l'Arménie.
La convention de Lemnos m i t du moins fin à l ' o c cupp t i on ' t u r que de
la Transcaucasie (art. 11 et 15). Les Anglais entrèrent, le
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novembre,
à Bakou, occupèrent également Batoum et assumèrent le contrôle de la
Transcaucasie. L'Arménie fut dès lors réintégrée dans les territoires dont
l'avait privée la paix de Batoum (1). Malheureusement, cette occupa
lion (2), si elle sauva l'Arménie russe d ' un écrasement immédiat, n e s u t
parer aux effets désastreux de l'armistice imp r ud en t consenti par l ' am i –
ral Calthorpe. Le mouvement nationaliste turc, créé par Moustapha
Kémal Pacha, s'installa solidement dans l'Arménie t u r que , nettoyée
des Arméniens. Le 23 j u i l l e t 1919, Moustapha Kémal réunit à Erzeroum
un Congrès nationaliste turc, qui
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vota les fameuses résolutions, appelées
le
Pacte national,
proclamant les vilayets orientaux partie intégrante de
l'Empire ottoman et. s'opposant à toute intervention des puissances
étrangères en faveur des Grecs et des Arméniens. Kémal trouva, d'autre
part, des alliés zélés dans les Bolcheviks, désireux de créer des embarras
aux Alliés en Asie ; une « Li°;ue pour la libération de l'Orient » fut fondée,
eu octobre 1918, à Moscou, dans le bu t de soulever les peuples orien–
taux contre « l'impérialisme » de l'Occident. Enfin, un second Congrès,
ténu en septembre 1919 à Sivas, confirma le Pacte d'Erzeroum et déclara,
entre autres choses, que les Turcs ne donneraient « pas u n pouce même
(1)
Kars fut rendue aux autorités de la République arménienne en vertu d'un arran–
gement avec le commandant en chef anglais du 8 janvier 1919, et les régions de Cha-
rour et de Nakhitchevan, sur une décision du haut commandement anglais, notifiée au
gouvernement arménien le 24 avril 1919.
(2)
Les Anglais restèrent en Arménie depuis la mi
-
janvier
jusqu'au commencement
d'août
1919 ;
leurs derniers détachements quittèrent la Transcaucasie, par Batoum, le
1
juillet 1920.
Fonds A.R.A.M