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LA. SOCIÉTÉ DES NATIONS ET LES PUISSANCES
déclin de l'État dans les réformes, et o n t continué à mener contre elles
une lutte désespérée.
En résumé, les traits généraux caractéristiques de l'intervention d ' hu –
manité en Tu r qu i e nous paraissent être les suivants :
1*
La
cause
de l'intervention en Tu r q u i e est dans le caractère despo–
tique de l ' Emp i r e ottoman, fondé su r l'inégalité des Musulmans et des
Chrétiens et évoluant progressivement, d u régime de l'exploitation des
seconds par les premiers, vers l a conception d ' unÉtat nationaliste turc
poursuivant la politique de l a t u r qu i f i c a t i on violente o u de la destruc–
t i o n de tous les éléments allogènes.
Débutant pa r l'action isolée de la Russie, l'intervention d'humanité
n'a pas tardé à prendre u n caractère
collectif,
q u i s'est affirmé surtout
depuis le Congrès de Paris, mais q u i a été affaibli, pendant le XX* siècle,
par la défection des Empires c en t r aux . Concentrée a u j o u r d ' hu i entre
les mains des vainqueurs de l a Grande Guerre, l'intervention d'humanité
tend à passer entre celles de l a Société des Nations.
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Malgré les grandes divergences entre les buts politiques particuliers
poursuivis par les Grandes Puissances dans le Proche Orient, leur inter–
vention collective en faveur des sujets chrétiens de la Porte a pu s'élever
au-dessus de ces divergences et poursuivre, comme bu t c ommun , la
pacification de l a Tu r qu i e nécessaire à l a paix d u monde. Elle a donc eu
u n véritable caractère
humanitaire.
Pour atteindre son bu t , l'intervention collective des Puissances n'a
eu recours au démembrement de l ' Emp i r e ottoman qu'en dernier l i e u ,
après avoir épuisé tous les autres moyens. Elle a toujours débuté par la
proposition de
réformes,
générales o u destinées à une seule province,
lesquelles réformes, loyalement appliquées, n'auraient p u que consoli–
der l a cohésion et l a force intérieure de l'État. Ce n'est que devant l'inexé–
cution obstinée des réformes stipulées, et devant les insurrections et les
massacres q u i en résultaient que les Puissances passaient aux étapes
suivantes de l eu r i n t e r v en t i on —
l'autonomie
et l a
séparation
complète
de telle ou telle province de l ' Emp i r e . Ne poursuivant toujours que la
protection des droiis de l ' homme , l'intervention d'humanité des Puis–
sances a été obligée, par la politique turque elle-même, de t ou r ne r au
démembrement progressif de l a Tu r qu i e .
Fonds A.R.A.M