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L A SOCIÉTÉ DES NATIONS E T L E S PUISSANCES
ère nouvelle. Mais bientôt le régime despotique hamidien a été remplacé
par la tyrannie non moins sanglante du Comité
Union et Progrès,
t y r a n –
n i e s'exerçant cette fois-ci non plus seulement contre les Chrétiens,
mais aussi contre les Musu lmans non - t u r c s , les Arabes, les Albanais,
les Ku r d e s . A u x deux principes fondamentaux de l'État ottoman :
le
despotisme
et
l'islamisme;
les Jeunes-Turcs ajoutèrent u n troisième:
le
nationalisme
turc.
Si l'on jette maintenant un coup d'œil d'ensemble sur l'évolution
intérieure de l'État ottoman, on est frappé par le caractère nettement
réactionnaire de ce mouvement. Les fondateurs de l ' Emp i r e avaient
voué les
rayas
à l'exploitation, mais n o n pas au massacre. Depuis le
Conquérant, le sort des Chrétiens n'a fait qu ' emp i r e r progressivement.
L'essai d u Tanzimât a échoué. Et s i , pendant cette période duTanzimàt,
les réformes étaient d u moins sincèrement préconisées pa r les Sultans
et leurs ministres, mais échouaient grâce
à
l'hostilité des autorités subal–
ternes et au fanatisme des masses, ce sont, dans les périodes subsé–
quentes, le Sultan A b d u l Hami d lui-même, et, après l u i , le'gouvernement
j eune - t u r c , q u i ont p o u r s u i v i une p o l i t i que violemment réactionnaire et
visant à l a destruction des éléments allogènes. L'histoire ottomane
depuis u n siècle n'est que l'acheminement,
à
pas, tantôt lents, tantôt
accélérés, vers l'idéal de l'Étal o t t oman lurquifié par l e fer et pa r
le feu.
B. —
Les Puissances
intervenantes.
Avant le Congrès de Paris, l ' i n t e r v en t i on a été souvent exercée
indivi–
duellement,
par la France en faveur de la r e l i g i on et des religieux catholi–
ques, par la Russie en faveur de la r e l i g i on orthodoxe et des sujets ortho–
doxes d u Sultan. Mais.même pendant cette époque, ces deux Puissances
se sont parfois unies
à
l'Angleterre pour des interventions
à
trois. Depuis
le Congrès de 1886, l'intervention en Tu r qu i e est devenue l'apanage col–
l e c t i f des six Grandes Puissances et s'est maintenue sous cette forme j u s –
qu
'
à
la fin du X I X
e
siècle. Depuis le partage des Grandes Puissances
en deux camps r i v aux , dont l'hostilité va toujours en s'accenluanl,l'inter-
venlion collective d'humanité pe r d peu
à
peu sa cohésion. On observe
déjà
la d i m i n u t i o n de sa force lors des
massacres
arméniens de 1895,
quand l'Entente seule présente u n
projet
de réformes ; on la constate pen–
dant les différentes phases de la question
Cretoise,
lorsque les Empires
c en t r aux quittent le concert européen et ne participent pas
à
l a création
de l'État autonome crétois ; on la constate, enfin, dans le rôle effacé
de l'Allemagne pendant les réformes en Macédoine. Durant les deux der–
nières années précédant la Grande Guerre, l'Allemagne, ayant acquis la
Fonds A.R.A.M